Yves DUTEIL est de la génération des Francis CABREL, Alain SOUCHON ou autres Julien CLERC. Né Parisien en 1949, il est lié aux familles Dreyfus et Deutsch, ascendance qui lui permet sans-doute certaines facilités pour trouver ses premiers contrats chez Dreyfus et Polygram. Bonne famille donc, mais s'il s'intéresse très vite à la musique, les études ne le bottent guère et nous le retrouvons dès l'âge de 20 ans dans le petit conservatoire de MIREILLE.

Son début de carrière n'est finalement pas si simple. De tremplins en premières parties - Juliette GRECO, REGINE -, il finit par enregistrer son premier simple "Virages" en 72. Marquons une pause : Yves est souvent visualisé comme un chanteur aux textes kitsch, enfantins ou carrément rustiques. Eh bien, donnez-vous la peine d'écouter "Virages". Certes, l'orchestration sonne très seventies, mais la chanson est dynamique, les paroles se retiennent ; la mélodie est superbe et le refrain une vraie merveille que j'ai personnellement souvent en tête. Bien sûr, DUTEIL y chante déjà de sa voix limpide et douce. Cette chanson eût mérité un destin de classique.

L'album sort deux années plus tard et se prénomme donc L'écritoire. Le titre éponyme introduit par une boîte à musique tape en plein mille dans le style de notre chanteur. Sa voix suave emporte les auditeurs dans un monde onirique, enjoué, plein d'images traditionnelles décrites avec un art de poète consommé. Cette deuxième chanson est un autre must. On se moque souvent des ambiances que l'artiste aime à mettre en musique. On trouve une de ses premières compositions souvent cataloguées comme kitsch ici, la magnifique "La tendre image du bonheur". Ma foi, moi je veux bien, mais au final, je la trouve romantique et pleine de vibrations, comme sa petite sœur "Je suis une larme".

Il y a aussi les performances littéraires qu'Yves accomplit depuis toujours : écoutez donc la belle comptine qu'est "Un lilas pour Eulalie", jeux de mots et rimes étonnantes, voire impertinentes, s'y succèdent avec bonheur. On relève aussi le chouette refrain de "Marie merveille - Marie bonheur". Bien sûr, on est au cœur des années 70 et la musique sonne indéniablement de cette époque, mais cela n'enlève rien à sa valeur. Mélodiquement, c'est souvent très fort, et la beauté des textes se marie à la perfection avec des airs superbes. "Et puis voilà que tu reviens" est un vrai symbole du romantisme. Oui, oui je m'en souviens fort bien.

C'est donc romantique à souhait, voyez plutôt "Dès que j'ai besoin de toi". Pas étonnant que les esprits les plus sentimentaux aiment à se nourrir des chansons de cet artiste, qui ne trompera jamais son public et sera toujours le chantre des chansons les plus romantiques qui soient. La jolie petite bossa de "J'ai le cœur en bois" montre toute sa pusillanimité. Et puis quelle plus belle déclaration que "L'amour est une maison" ! Ce n'est sans-doute pas très adapté aux standards des années 2015, mais au final, c'est classique.

Un talent énorme, souvent décrié par les moqueurs de tous poils, mais adulé par ses fans. Il faut tenter l'écoute si vous ne connaissez pas l'artiste mieux que par les caricatures qu'on en a faites, vous pourriez fort bien être très surpris. En tout cas, voilà un début de carrière plus que prometteur. Yves DUTEIL se positionne d'emblée parmi les grands tenants de la chanson française traditionnelle, à l'égal de BRASSENS et de FERRAT. J'ai découvert cet artiste attachant lors de l'instant magique du premier amour, elle aimait DUTEIL et me l'a fait découvrir pendant quatre éternités. Merci à toi, bisous !