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Peter GABRIEL - I (1977)
Par MARCO STIVELL le 26 Décembre 2011          Consultée 9171 fois

"Dehors les anges, dehors !" écrivait Peter GABRIEL en 1975, annonçant à la terre entière son départ de Genesis, ce que certains ne lui ont toujours pas pardonné (à Genesis, pas à "Dieu" Peter bien sûr). Prenant le temps de s'occuper de sa petite Anna (qui rappelons-le, avait connu une naissance difficile en 1974) et tentant de réapprendre laborieusement le piano, le chanteur s'éloigne des projecteurs pendant un peu plus d'un an. Puis ayant réuni quelques compositions, il appelle auprès de lui Phil Collins à la batterie, Anthony Phillips au piano, Mike Rutherford à la basse, et John Goodsall (Brand X) à la guitare pour tester en musique. Il cherchait avant tout à être rassuré, car le Peter GABRIEL de 1976 n'a pas confiance en lui. Du tout. Le groupe précité ne sera pas celui de son premier album. Il va se jeter à corps perdu dans une entreprise imposante pour lui : faire appel à toute la clique des grands musiciens américains d'alors. Tony Levin, Allan Schwartzberg, les guitaristes redoutables Steve Hunter et Dick Wagner empruntés à Lou Reed, et Bob Ezrin à la production, se cacher derrière eux en quelque sorte. Pour être un peu mieux rassuré, il garde la présence de l'anglais (comme lui) Robert Fripp à ses côtés. Le disque peut ainsi voir le jour.

C'est donc le premier effort solo de Peter GABRIEL. Plus qu'un effort, ce début de carrière dans l'angoisse se ressent quelque peu dès la pochette : le visage fantomatique qui apparaît contre la vitre de la voiture accidentée sous la pluie semble traduire un début de carrière complètement à reculons. Quant à l’absence de titre, elle contribue également à caractériser un artiste qui se cherche (et qui va d’ailleurs mettre longtemps avant de se trouver).

Côté musique, s'il y a au moins une chose que Peter était sûr de vouloir faire, c'était de s’éloigner le plus possible de l’univers de Genesis. Fini et bien fini le temps des contes et des fables, seule reste "Moribund the Burgermeister", histoire un peu fantasque d’un maire en proie à des hallucinations dignes d’un The Lamb Lies Down on Broadway. On y rencontre un massif London Symphony Orchestra, ce que Genesis n'avait jamais pris le parti de tester. La versatilité des tons pris par la voix de Peter, du plaintif à cette grosse voix rauque, est saisissante. A part cela, rien de plus éloigné de Selling England by the Pound effectivement que ce hard-rock mordant propre à "Modern Love" et "Slowburn". Quand ce n'est pas l'orgue Hammond de Jozef Chirowski qui ronfle, c'est monsieur Larry "Synergy" Fast qui fait briller ses synthés bidouillés. Quoi d'autre encore ? Cet amusant flash-back années 30, "Excuse Me" (texte écrit par Martin Hall), où se mêlent un piano-squelette et un Robert Fripp métamorphosé en joueur de banjo... Ou encore ce blues de bar enfumé à 4 heures du matin appelé "Waiting for the Big One" qui donne de l'urticaire au bon fan de rock progressif. Le morceau est pourtant plaisant, surtout dans ses parties instrumentales. Quant au rock péplum de "Down the Dolce Vita", il m'a longtemps semblé un peu passe-partout, et pourtant la richesse musicale y est palpable...

Dans d'autres chansons, Peter s'est aussi essayé à quelques expérimentations moins "nettes", incluses dans des suites d'idées loin d'être décousues. On trouve par exemple un passage tango sur "Humdrum" ! Ce qui confère à l’album une certaine diversité. On peut difficilement trouver un album plus représentatif d’un artiste qui avance à tâtons. Pour moi, cette première œuvre solo se résume, malgré l'excellence du reste, essentiellement à trois chansons. D’abord, ze méga-tube, le très folkisant "Solsbury Hill" et sa mélodie irrésistible et lumineuse, que le matraquage (plus personnel que radio) ne peut altérer. Et selon les dires de Peter, cette chanson ne parle PAS de son départ de Genesis. Ensuite "Humdrum", notamment pour sa fin resplendissante, portée par l’orchestre. C'est aussi la dernière fois que le chanteur utilise la flûte. Enfin, celle qui est souvent considérée comme étant la pièce maîtresse de l’ensemble : "Here Comes the Flood". J'en connais qui la qualifient de seule version valable (et plus que valable), il faut reconnaître que cette alternance entre couplets soft et grandes envolées lors des refrains convient parfaitement à la fin d'un album déjà bien garni en belles idées. Là c'est tout simplement mythique, et le solo de Dick Wagner est d'une justesse à couper le souffle... Que demander de plus ?

Ce premier album (plus tard renommé Car par les fans, en référence à la pochette) est le plus "british" de Peter GABRIEL en solo, et fait vraiment office de "grosse production hollywoodienne", surtout quand on le compare à l'opus à venir. Il est d'ailleurs amusant de constater combien Robert Fripp est plutôt "noyé" dans un ensemble plutôt direct, lui qui est si habitué à des musiques plus sophistiquées. Pour la suite, ce sera clairement différent. Quoiqu'il en soit, sans forcément regorger de classiques, ce premier album marque le coup avec force, son succès ajoutant au fait qu'il y a bien une vie après Genesis...

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   MARCO STIVELL

 
   BIONIC2802

 
   (2 chroniques)



- Peter Gabriel (chant)
- Tony Levin (basse)
- Robert Fripp (guitare)
- Steve Hunter (guitare)
- Allan Schwartzberg (batterie)
- Jozef Chirowski (claviers)


1. Moribund The Burgermeister
2. Solsbury Hill
3. Modern Love
4. Excuse Me
5. Humdrum
6. Slowburn
7. Waiting For The Big One
8. Down The Dolce Vita
9. Here Comes The Flood



             



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