Si RUNRIG semble bien décidé à tirer sa révérence à l'issue d'une dernière tournée qui bat son plein au moment où sont écrites ces lignes, le coeur de l'Ecosse continue de battre dans le corps encore vivace de ce groupe devenue emblème d'une nation. Il y a dans la musique de RUNRIG la mélancolie des couchers de soleil sur la plage de Portobello, la rudesse des Highlands, la bonté des locaux, un émerveillement intact, 45 ans après les débuts du groupe, pour les paysages et l'âme de l'Ecosse, dans sa grande et évidente sincérité. Si le groupe chante son pays, ses ritournelles n'ont pas toutes rencontré le succès, et ce sont ces titres mésestimés que le sextet a décidé de compiler sur cet album au titre savoureux. Disponible sous forme de CD simple, The Ones That Got Away est également inclus au sein du coffret Rarities fraîchement paru, qui se veut indispensable pour ceux qui souhaitent mettre à jour leurs connaissances sur le groupe (les amateurs n'y découvriront rien d'inédit).

Ces titres qui se sont échappés, ce sont ces morceaux accessibles, réussis mais somme toute classiques, peu aventureux, qui auraient pu connaître une grande destinée, mais sont restés bien au chaud en seconde classe, hors de portée des quelques tubes qui ont permis au groupe de connaître une carrière si longue. Il y a parmi eux "The Greatest Flame" (un des rares titres de la période Donnie Munro ici présentés), titre pour lequel Chrysalis, la maison de disque du groupe en 1993, fondait de grands espoirs. Malgré ses évidentes qualités, notamment en matière de flamboyance des mélodies, le titre fut boudé par les radios, jugé trop lent, ou trop "Ecossais" pour les médias britanniques... bref, une pépite que l'on prend plaisir à redécouvrir. "The Wedding", qui aurait pu devenir le premier single de l'album Mara avant que "Things That Are" ne lui soit préféré est également de la partie, et constitue un sympathique ajout avec son feeling rock et son ambiance particulièrement dansante. La splendide ballade "Life Is", un des premiers morceaux enregistrés par le chanteur Bruce Guthro à son arrivée dans le groupe en 1999, est également de la partie, et l'émotion qu'il dégage reste intacte.

Si plusieurs morceaux sont présentés dans leur version studio, d'autres sont présentés dans des versions différentes. "Every River", superbe ballade intimiste, se voit par exemple transfigurée par cette version symphonique, puissante et bouleversante, issue du répertoire solo de Bruce Guthro. "In Search of Angels" est pour sa part présentée dans une version live interprétée par le claviériste du groupe, Brien Hurren, et captée en compagnie de la chorale Craigie de Stirling. Une splendeur. Il y a aussi, et surtout, une version réenregistrée de "Somewhere", titre issu du dernier album du groupe, "The Story", et originellement présenté dans une version atmosphérique interprétée par Rory MacDonald. C'est cette fois-ci Bruce Guthro, accompagné de la chanteuse écossaise Julie Fowlis, amie de longue date du groupe, qui se charge de donner une vie nouvelle à ce titre devenu folk, porteur d'ambiances nouvelles finalement plus intéressantes que sur la version originale du titre.

Nous pourrions continuer la liste par le menu. L'essentiel est ailleurs. RUNRIG nous offre ici la poire après le fromage, la cerise sur le gâteau qui, au lieu de refermer le livre des histoires dorées, nous donne envie de l'ouvrir à nouveau pour en relire toutes les pages. Une piqûre de rappel bienvenue pour se replonger dans la féconde discographie du plus grand groupe que l'Ecosse ait enfanté.