Quand on a un tube comme "Lollipop" qui cartonne sur toutes les ondes, je présume que le monde nous appartient. J’imagine que c’est ce que devait ressentir Lil WAYNE en 2010, au moment de la sortie de son huitième LP, Rebirth. Une renaissance, me direz-vous, mais attention vous n’êtes pas prêts, car Weezy voit Rebirth comme son album de rock. Non, non, vous ne rêvez pas, c’est effectivement un choix plutôt audacieux pour le rappeur qui évolue habituellement sur des instrus bounce ou crunk, mais ce n’est pas nécessairement pour le mieux.

Reconnu pour ses talents de lyriciste et son influence dans le monde du rap, WAYNE tente de se réinventer en explorant le genre rock qu’il affectionne particulièrement, d’ailleurs il a sorti sa guitare électrique pour la pochette de l’album, reste à savoir si cette expérience se définit comme une réussite ou un faux pas artistique.

Les paroles, un domaine où Weezy excelle habituellement et qui a participé à sa renommée, sont assez décevantes sur cet opus. Les textes semblent forcés et dépourvus de créativité ou d’ingéniosité comme sur "One Way Trip" (Papa was a rollin’ stone, I was born to rock) ou le single "Drop The World" (Bitch, Imma pick the world up and Imma drop it on your fucking head/And I could die now, rebirth, motherfucker), un featuring avec EMINEM que même la présence de ce dernier ne réussit pas à sauver.

Les compositions elles-mêmes manquent de profondeur, par exemple "Paradice" et "Get A Life" qui sont particulièrement chiantes, avec des mélodies répétitives ainsi que des arrangements mous et peu inspirés. Il n’y a que quand Weezy s’associe à sa protégée, SHANELL, chanteuse originaire d’Atlanta, que les morceaux parviennent à donner dans l’émotion, comme dans "American Star", "Runnin" ou le single "Prom Queen" (les membres de KORN dans le clip pour la crédibilité, ça c’est fait).

La collaboration avec SHANELL donne l’occasion à WAYNE de se montrer sous son meilleur jour sur ces quelques tracks, mais pour le reste, on aperçoit des influences qu’il ne maîtrise pas totalement sur "The Price Is Wrong" et le single "On Fire". D’autres titres semblent s’inspirer de rock 90’s gentillet, par exemple les singles "Knockout" en featuring avec Nicki MINAJ ou "Da Da Da" qui sonne plus comme du Black EYED PEAS qu’autre chose. Heureusement, il y a quand même certaines chansons dans le lot qui passent le test pour Lil WAYNE, comme sa déclaration d’amour pour la weed "Ground Zero" où son énergie brute est au rendez-vous (Don’t look now but the ground is gone (I’m so high that the ground is gone/And I don’t even know which cloud I’m on).

S’il est bien souvent considéré comme un des meilleurs rappeurs de sa génération, le rock n’est clairement pas le domaine de prédilection de Lil WAYNE et Rebirth donne plutôt l’impression d’une superposition maladroite de deux mondes que Weezy ne parvient pas à lier suffisamment pour convaincre. Dans sa phase emo, Weezy vit son rêve de rockstar mais n’abandonne pas pour autant son addiction à l’auto-tune (l’album a même failli s’appeler Rebirth Of Auto-Tune). Quand le rap dirty south rencontre le rock à coup de beats génériques, certains diront que le projet est un caprice raté et d’autres y verront un artiste en avance sur son temps.