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- Membre : Yes, Graeme Edge & Adrian Gurvitz

The MOODY BLUES - Keys Of The Kingdom (1991)
Par MARCO STIVELL le 25 Octobre 2024          Consultée 278 fois

Bleu que cet album souffre et Bleu – là haut dans le ciel ou sur la terre, en Auvergne – comme il nous fait souffrir ! Avec Keys of the Kingdom, qui captive de prime abord certes grâce à une pochette bien trompe-l'oeil par son côté bariolé, rien ne va. Ou presque, car tout ne peut être noir, mais franchement, c'est si dur ! Nous sommes en 1991. Les années en 1 étaient propices à une belle inspiration pour les MOODY BLUES : Every Good Boy Deserves Favour en 71, Long Distance Voyager en 81, grand temps de retrouvailles d'ailleurs cette dernière et qui leur a tant souri musicalement, mais pour 91, c'est non, l'inverse en diable. À croire que le barbu ange déchu, rendu sympa bien plus tard grâce à la télé et l'acteur Tom Ellis, est venu mettre son grain de sel, festoyer. Keys of the Kingdom, les clefs du royaume, mais en fait ce dernier, c'est l'Enfer ! Et n'en déplaise aux metalleux, à peu de choses près, le mot 'agréable' ne saurait lui convenir.

1991 donc, la fin des années 80, d'une starisation exceptionnelle pour un groupe dinosaure du rock, et même de l'adoubement par MTV, sans succès notable à la clef ; à grand-peine dans le top 30 au Canada, une pauvre 54ème place au Royaume-Uni tandis que les U.S.A. (94ème) n'ont jamais paru aussi lointains. Pour les MOODY BLUES, la redescente est lourde. Le nouvel album, toujours sous la houlette de Tony Visconti mais pour la dernière fois, est une production partagée avec deux autres larrons : Alan Tarney, natif de Cumbria et responsable de nombreux hits en singles comme en albums pour Cliff RICHARD, A-HA entre autres, ainsi que Christopher Neil, originaire d'Irlande et lui aussi d'un pédigrée déjà solide, avec pour fer-de-lance à l'époque ces chers MIKE & THE MECHANICS. La gestion devient difficile et Graeme Edge, bien que crédité en membre à part entière, ne joue que sur trois titres, claquant la porte (temporairement) parce qu'il en a salement marre d'être remplacé par des drum machines. Il a même un substitut 'physique' pour deux titres, le sessionman Andy Duncan !

Et si cela ne suffisait point, un gros point noir vient entacher la carrière des MOODY BLUES : l'éviction de Patrick Moraz dès les premiers enregistrements, au bout de plus de dix ans de bons services. Sans s'attarder davantage, cette séparation menée devant les tribunaux et même les caméras demeure l'une des plus moches et incompréhensibles de l'histoire du rock, surtout venant d'un groupe aussi classieux, humain. À ce titre, le seul élément bénéfique, quoique très mesuré mais bien perceptible sur Keys of the Kingdom, c'est le retour de Ray Thomas, rendu marginal voire carrément absent en termes de création comme de chant/instrumentation sur les albums de 1986 et 88. Retour donc, et pas des moindres, pour le peu de fois où on l'entend vraiment. Moraz viré et malgré le coup de colère de Edge, la suite verra les MOODY BLUES retrouver un peu de leur esprit passé, genre de 'future of days passed' mais sans jamais plus de claviériste attitré.

Avant cela, il faut passer par ces cinquante-trois minutes regrettables. Oui, regrettables parce que le son, prélevé dans des lieux emblématiques de Londres comme la Hit Factory ainsi que l'Olympic de Mayfair, est énorme, super beau, en accord avec l'idée de la pochette. Comme celle-ci toutefois (on sait que c'est la grande période de HELLOWEEN et consorts, m'enfin !), il est mal géré, le titre est bien loin d'abriter une oeuvre de classic-rock digne de ce nom. Ne parlons pas des compositions, ou plutôt si, pour dire que ni John Lodge ni Justin Hayward n'ont pu trouver matière à nous enchanter, pareillement. Les Moodies sonnent plutôt 'muddies' ici (mud signifiant la boue), un gâchis où l'on sent de vraies bonnes idées mais qui tombent toujours à plat, sonnent creux, pataugent dans une production luxuriante. Il est vrai que les boîtes à rythmes de Visconti sont plus pesantes que d'habitude, et ne parlons pas des cuivres irritants, réels comme sur "Magic" ou bien programmés par Moraz sur "Say What You Mean".

Ce titre, d'ailleurs, est une sacrée blague avec ses deux parties affichées dans le titre. Déjà en matière de funk 80's impersonnel, il brille pas mal, mais en plus on se farcit ce final avec monologue de type "Thriller", assez subversif, au refrain indigent et martelé ("say what you mean, mean what you say!"), et aux cordes baroques-disco de type RONDÒ VENEZIANO. Justin Hayward n'est pourtant pas beaucoup plus inspiré quand ailleurs, il écrit "Say It With Love", pop aérienne à l'effet rock de stade, certes porteur mais moins que ses efforts comparables auparavant. Elle permet au moins d'affirmer une chose : la guitare électrique est bien le seul élément constant en qualité (plutôt entre le bon et le haut) sur tout l'album ! À travers de jolies nappes mais un peu passe-partout, les claviéristes 'remplaçants' du disque, à savoir Paul Bliss et Tobias 'Bias' Boshell, ce dernier étant mieux connu grâce à son ancien groupe TREES (fleuron du folk-rock britannique 70's avec le bien connu The Garden of Jane Delawney), ne s'illustrent guère beaucoup.

D'autres chansons de Hayward suivent, "Hope and Pray", "Bless the Wings (That Bring You Back)", soit du power-slow ou rock de lover très léchés, liste à laquelle il faut ajouter les titres en commun avec John Lodge comme "Is This Heaven?", d'abord folk-jazz qui devient folk-reggae mais non sans cordes forcées ni un pont étrange avec des sifflements et des claquettes. Lodge fournit "Magic", au son arena et franchement difficile à cause des cuivres mais pas que, alors qu'un "Shadows on the Wall" se révèle déjà plus intéressant dans l'ambiance, avec une mélodie mignonnette, sans plus alors que tout se veut épique, seule la guitare y parvenant bien. Le tandem écrit encore un morceau bluesy et loin d'être essentiel, "Once is Enough", parcouru de cuivres-synthé pour le pire là encore, heureusement ajouté comme bonus à la version CD.

C'est surtout que si on écoute ce format-là, on constate qu'entre ce titre et celui qui suit, c'est le jour et la nuit. Et pour le coup, on peut dire merci Ray Thomas de venir sauver les meubles, car sans conteste, c'est son apport à la création qui permet à Keys of the Kingdom de ne pas être un naufrage en règle. "Celtic Sonant" reprend les choses où il les avait laissées en 1983 sur l'album The Present, en portant bien son nom et en puisant autant dans ses origines galloises (peuple brittonique, comme la Cornouailles et notre Bretagne) que, en plus largement celte, une ouverture aux mélodies gaéliques (Ecosse, Man, Irlande) les plus populaires.

Les bruits de mer, les synthés oniriques pour une dernière entente/chant du cygne de Patrick Moraz avec les MOODY BLUES (bien meilleure que "Magic", placée après, elle, hélas), la flûte enfin revenue, l'aspect marin (meilleurs choeurs du disque, sans surprise) et la douceur féérique, Thomas jouant un peu de lyrisme dans son chant... En voilà un morceau à retenir. Un seul ? Presque, puisque Thomas co-écrit avec Hayward le conclusif "Never Blame the Rainbows for the Rain" d'une qualité certaine lui aussi, évoquant un peu les ballades 70's hivernales du folk-rock et du progressif (clavier tourbillonnant en prime), bien aidé par le choeur masculin final, pour l'ensemble une mélodie et une ambiance convaincante. Vraiment pas assez toutefois pour considérer ce disque autrement qu'un retour de bâton amer, une oeuvre dispensable, un prélude naturel à une longue période d'absence (hormis en live).

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   MARCO STIVELL

 
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- Justin Hayward (chant, guitares)
- John Lodge (chant, basse)
- Ray Thomas (chant, flûte)
- Graeme Edge (batterie, percussions)
- Patrick Moraz (claviers)
- Bias Boshell, Paul Bliss (claviers, programmations)
- Andy Duncan (batterie)
- Nigel Hitchcock (saxophone alto)
- Jamie Talbot (saxophone ténor)
- Guy Barker (trompette)
- Pete Beachill (trombone)


1. Say It With Love
2. Bless The Wings (that Bring You Back)
3. Is This Heaven?
4. Say What You Mean – Part I & Part Ii
5. Lean On Me (tonight)
6. Hope And Pray
7. Shadows On The Wall
8. Once Is Enough
9. Celtic Sonant
10. Magic
11. Never Blame The Rainbows For The Rain



             



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