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Brenda LEE - Sincerely (1962)
Par LE KINGBEE le 7 Janvier 2020          Consultée 1007 fois

En 1962, Brenda LEE n’a pas encore 18 ans quand elle enregistre son sixième disque. Pour Decca, il n’y a qu’une seule stratégie, il faut empiler les galettes avant que la jeunette ne devienne une vieille chanteuse où ponde de la marmaille à tout va. En 62, Decca avait déjà mis au point une technique de marketing basée sur la jeunesse de Brenda et sur un répertoire passe partout. Oui mais voilà, à vouloir faire du fric sans tenir compte des désirs de l’artiste et encore moins celui des auditeurs, on finit imparablement par transformer une gamine pleine de peps en une Perrette équipée de son pot au lait.

C’est dommage parce que la gentille Brenda méritait bien mieux. L’année précédente, Decca avait réussi à placer sa chanteuse au générique de "Two Little Bears", un navet avec Eddie Albert. En 62, Brenda est presque en âge de se marier, pour Decca il ne faut pas traîner, ses disques se vendent encore correctement. Le précédent All The Way a atteint la 17ème place des charts US et la 20ème chez les anglais. Il y a encore matière, il faut rentabiliser les nombreuses sessions auxquelles la petite chanteuse se prête sans grincher, ni faire la mauvaise tête.

Sincerely est issu de trois sessions datant du 25, 26 et 29 octobre 61. C’est encore une fois au Bradley Studio que se rend Brenda pour ces trois séances ; le studio bat encore son plein et la chanteuse est ici comme chez elle. Depuis sa première session en juillet 56 le guitariste Grady Martin et le bassiste Bob Moore n’ont cessé de la mettre en confiance. Brenda tourne toujours avec la même équipe, certains sidemen lui font parfois une infidélité lorsqu'ils sont en tournée ou qu'ils enregistrent ce jour là pour d’autres artistes, mais Brenda bénéficient généralement d’une excellente mise en place et la cohésion entre les différents accompagnateurs est toujours aussi bien rodée. Dix chansons sont retenues parmi les trois séances, les deux dernières sont piochées dans une séance de janvier pour "Fool Rush In", "How Deep Is The Ocean" provenant quant à elle d’une session du 20 mai. A cette époque, la majorité des 33 tours comprenaient 12 plages, en rapport avec les formats radio du moment et de la compression.

Derrière un décor genre papier mâché, Brenda se fait rêveuse. En étudiant les différents titres, on se demande si Brenda ne serait pas amoureuse. L’orientation de Decca ne laisse aucun doute, la firme a transformé l’ancienne petite fille chanteuse de Rock'n'Roll en une chanteuse de ballade et de chansons sentimentales. Autre chose, les graphistes persistent à couper la chanteuse. Pas une seule pochette ne la représente debout. Sa petite taille a toujours été perçue comme un handicap par Decca.

Ce 6ème opus est clairement ancré dans la ballade et la chanson sentimentale. D’entrée "You Always Hurt The One You Love" met les pendules à l’heure. La direction artistique de Decca ne s’est pas casé le bonichon, il s’agit là d’une reprise d’un ancien Number One des Mills Brothers gravé pour… Decca en 1944. En clair on fait du neuf avec du vieux. Kay STARR, Patti PAGE, Peggy LEE, Connie FRANCIS et une certaine Ada LEE reprenaient le titre avec des orchestrations très collet monté, alors que Brenda apporte ici un brin de souplesse. Pour l’anecdote, le morceau sera repris par Eric CLAPTON sur son dernier album de Noël.

Pas la peine d’aller chercher bien loin pour le second titre. Avec "Lazy River", Decca opte pour un vieux titre des années 30 du pianiste acteur chanteur Holly Carmichael, sans avoir à en payer les droits, ceux-ci ayant déjà été pris en charge pour les Mills Brothers en 41. On peut penser que Decca lorgnait sur un succès similaire à celui de Bobby DARIN qui avait fait monter cette guimauve sur la seconde marche des charts anglais en janvier 61. On continue dans le style Berlingot avec "You've Got Me Crying Again" chanté par Bing CROSBY durant les thirties. Mais encore une fois, si le titre a de quoi faire peur, la production d’Owen Bradley et l’inspiration de Grady Martin, longtemps influencé par le Western Swing et le Jazz, apporte comme un vent nouveau. Ajoutez-y la superbe diction et le timbre de Brenda et vous avez entre les mains l’équivalent d’une 2CV transformée en… Super 5 Baccara.

La ballade tendance Jazzy et la chanson d’amour sonnent comme un credo, on a beau prendre le disque par l’autre côté de la lorgnette, rien ne change. On pioche encore plus loin, cette fois ci on force Brenda à reprendre un vieux Jazz des années 20 avec "I'll Always Be In Love With You". La souplesse du chant et la participation de la troupe de choristes d’Anita Kerr contribue à faire de cette sucrerie un titre acceptable.
Allez, on reprend le même concept avec comme trames principales Jazz old time (années 40), rythmes modérato, paroles aussi collantes qu’un premier baiser, avec pour conclusion "I Miss You So". Il m’arrive parfois d’être mauvaise langue ou de mauvaise foi : "Fools Rush In (Where Angels Fear To Tread)" vient booster l’ensemble, mais ne vous attendez pas à attraper un lumbago en dansant dessus où alors c’est que vous n’êtes pas doué ou peu en forme. Je vous rassure, si le tempo s’emballe légèrement, le fond reste identique : vieux Jazz de Bob CROSBY (frère de Bing) et pas de pognon à dépenser bêtement, Decca étant le premier à avoir pressé le 78 tours. ELVIS reprendra le morceau en 72 en rajoutant cinq bons kilos de sucre. Chez nous Dario MORENO l’adapta sous le titre "Ne Dis Pas" et autant dire qu’il aurait dû mettre son titre en pratique.

Parmi les grosses bourdes de l’industrie du disque, "Only You (And You Alone)" mérite le pompon. Buck Ram n’imaginait certainement faire un tel carton lorsque le titre enregistré par les PLATTERS pour Federal n’est pas édité, Syd Nathan patron du label la trouvant trop guimauve. Le titre sera réenregistré un an plus tard par Mercury qui se frottera les mains. L’histoire ne nous dit pas si Mercury remercia Nathan pour cette incroyable aubaine. Symbole de la chanson romantique, "Only You" a fait l’objet de nombreuses reprises. Si de nombreux amateurs nostalgiques du passé restent attachés à la version des PLATTERS (celle avec Tony Williams), celle de Brenda évite tout surdosage par rapport à l’originale tant rabâchée. Terminons ces modestes lignes avec "I’ll Be Seeing You" autre titre oscillant entre mélo et romantisme clinquant. Si cette guimauve est au générique d’une comédie musicale de Broadway puis d’une comédie dramatique hollywoodienne, Billie HOLIDAY et Bing CROSBY la rendront célèbre avant la fin de la Seconde Guerre. Repris sans vergogne, la version de Brenda se révèle agréable, la chanteuse prenant soin d’enlever les cuillerées de sucres contrairement à certains artistes adeptes du diabète. Nous nous permettons de conseiller la reprise par le duo Françoise HARDY/Iggy POP.

Avec ce disque, Decca enferme sa chanteuse dans un répertoire romantique où ballades, chansons sentimentales et Jazz Vocal viennent s’emmêler à qui mieux mieux. Intrinsèquement, chaque piste reste inattaquable même s’il se dégage quelques fragrances parfois trop sucrées ou trop persistantes. Reste à savoir où classer ce disque : en Jazz Vocal ou Variété Internationale ? Note réelle 2,5.

Edité sous plusieurs pressages principalement en Mono, cette chronique provient de l’écoute du pressage UK édité par Brunswick.

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- Brenda Lee (chant)
- Grady Martin (guitare)
- Hank Garland (guitare)
- Harold Bradley (guitare)
- Joseph Zinkan (basse 1-2-3-4-5-6-8-10-12)
- Bob Moore (basse )
- John Greubel (batterie 1-2-3-4-5-8-10-12)
- Buddy Harman (batterie 6-7-9-11)
- Floyd Cramer (piano 1-2-3-4-5-6-8-9-10-12)
- Boots Randolph (saxophone 6-7-9-11)
- Charlie Mccoy (harmonica 7-11)
- Anita Kerr (chœurs 1-3-4-6-7-9-10-11)
- Evelyn Wilson (chœurs 1-3-4-6-7-9-10-11)
- Mary Ellen Puckett (chœurs 1-3-4-6-7-9-10-11)
- Mildred Kirkham (chœurs 1-3-4-6-7-9-10-11)
- Doug Kirkham (chœurs 1-3-4-6-7-9-10-11)


1. You Always Hurt The One You Love
2. Lazy River
3. You've Got Me Crying Again
4. It's The Talk Of The Town
5. Send Me Some Lovin'
6. How Deep Is The Ocean (how High Is The Sky)
7. I'll Always Be In Love With You
8. I Miss You So
9. Fools Rush In (where Angels Fear To Tread)
10. Only You (and Only Me)
11. Hold Me
12. I'll Be Seeing You



             



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