Dans la seconde moitié de l'année 96, alors que Roots fait un flambard aux quatre coins du globe, Max Cavalera doit abruptement abandonner son poste de frontman suite au décès de Dana Wells, fils de la manageuse de SEPULTURA Gloria Bujnowski, sa compagne. Andreas remplit le rôle pour le concert puis Max revient. Mais cet événement rompt le frêle équilibre de nos rock stars, dont les 3 membres "les moins visibles" se plaignent de la trop grande exposition dont bénéficie Max médiatiquement. Ils souhaitent vider Gloria, c'en est trop pour Max qui part en claquant la porte fin 96.

Nous voilà sans chanteur à l'aube de mettre au monde le successeur de Roots. Alors les auditions s'enchaînent pour trouver la perle rare, enfin... le hurleur le plus déjanté ! Chuck Billy de TESTAMENT et Phil Demmel de MACHINE HEAD passent l'épreuve sans succès. Le choix se porte sur l'afro américain Derrick Green, un illustre inconnu du surnom de "Predator" au physique impressionnant. La pochette du nouveau né qui s'ensuit prénommé Against continue dans le trip ambiance tribale, on se doute que le contenu sera de la même veine.

"Against" est là pour annoncer la couleur, c'est très court mais on ne s'est pas calmé pour autant et les aspects speed core méchants sont toujours là. Puis "Choke" est chargé d'avertir le monde de cette nouvelle menace. Les indiens Xavantes sont dans la video pour perpétuer la tradition du metal tribal à la SEPULTURA. Légèrement moins efficace que l'éponyme "Roots", Green y tient fort bien son rôle de chanteur frontman. Rien de réellement remarquable toutefois. Ambiance semblable sur "Tribus" torturée et verdâtre, les aspects tribaux deviennent ici presque world. Voila pour les singles.

Globalement donc, l'album est dominé par des titres à la furieuse ambiance hard core... très très core, oubliez les copains ricains, tout ça est méchant et bien raw. Ainsi, "Rumors" nous replonge la tête la première dans un chaudron groove metal d'ou toute trace mélodique a bien du mal à subsister. Très violent, "Boycott" donne à Derrick l'occase de placer des premiers vocaux bien allumés. Le rythme est simpliste mais reste efficace, comme du BIOHAZARD en plus méchant. "Unconscious", "Drowned Out" et "Hatred Aside" rivalisent d'agression, sans proposer pour autant la moindre ligne mélodique, c'est dommage.

Sur "Reza", on s'approche d'une consistance death entre les growls et les blast d'Igor... De quoi se défoncer la tronche en concert. Le break est beau, ça faisait longtemps ! Et oui, c'est Joao des légendaires RATOS DE PORAO au chant, faut être brésilien pour comprendre hélas, puisque personne ne les connaît ici. Sympa ! On retient aussi le joli break ambient "Floaters In Mud" Plus d'une minute d'intro sur "Old Earth", qui se veut presque ambient sur les couplets avant d'exploser en furia sur le refrain. "Common Bonds" se traîne dans un environnement putride, ce morceau a presque une odeur... mais manque de fumet...

Plusieurs instrumentaux sont de la partie : "T3rcemillenium" Reprend là ou "Kiaowas" nous avait laissé, une guitare folk frustre, des percus judicieuse. C'est sur ce genre de compos que les brésiliens amènent leurs âmes sur un plateau d'argent, tout ça respire le Brésil et l'Amazonie. Sans doute mon moment préféré de l'album. "FOE" est un chouette intermède agressif avec de belles portions d'Igor puis on traverse le pacifique pour se retrouver au pays du soleil levant sur "Kamaihachi", enfin, un riff qui déménage et une ambiance à couper au cordeau, on y retrouve le SEPULTURA de Chaos AD, mélange de tribal et de riff inoxydables. La "fue", flute nippone jouée par Kodo, donne une belle identité à l'ensemble.

Mon amour pour la terre brésilienne ne me rendra pas aveugle ! La domination d'un hard core extrèmement dur et violent sur ce nouvel opus ne doit pas masquer la réalité : certes, SEPULTURA a rebondit malgré le départ de son leader, et a proposé une suite logique à Roots, mais ma conclusion est sensiblement la même. Manque de mélodie générale, sur Chaos AD, les riffs et les breaks se mettaient au service de la mélodie même simplissime, depuis Roots et sur ce Against, elles ont quasiment disparues au profit de l'agression permanente. Si on excepte Choke et les instrumentaux, je ne retiens rien de cet album.