Tout apôtre du bon goût ne peut qu’avoir une vive réaction à la vision de cette épouvantable pochette jaunâtre. Comment ? Mais comment peut-on en arriver là ? Bon, bref, passons, cette image est une catastrophe de marketing, un véritable assassinat. C’est pourtant la même équipe qui est reconduite après le succès - même relatif - du premier album : Wolfe et Scott à la composition et David McKay à la console. Un vrai changement a eu lieu cependant puisque Bonnie a dû subir une opération des cordes vocales, ce qui va lui laisser une voix rocailleuse de manière permanente ! Imaginez donc, l’histoire de la musique populaire s’en est trouvée toute retournée ! Bref, nous sommes en 1978 et la jeune femme a 26 ans.

Je ne vais pas vous les faire dans l’ordre, car on trouve dans cet album canari un des plus grands singles de l’histoire, le numéro deux pour être précis : "Its A Heartache". Ce single, vendu à la hauteur de six millions d’ exemplaires, est un véritable symbole doublé d’une bombe retentissante. Le refrain tonitruant chantée avec la voix si particulière de Bonnie TYLER fait partie de l’inconscient collectif. On l’entend partout, sur chaque radio, dans des pubs, des jingles, bref, il s’agit d’un classique évident ! Le genre pratiqué est très proche de la countrypolitan, avec sa jolie rythmique acoustique, mais finalement, avec une voix pareille, Bonnie n’était-elle pas condamnée à chanter de la country ?

"Heaven", qui avait ouvert les hostilités à la base, ne reçoit qu’un accueil peu intéressé. Cette song me rappelle certains élans d’Elvis dans les seventies. Ce blend de country et de pop n’est pas désagréable, un manque de fond reste à déplorer. Le mid-slow "Here Am I" a connu un petit succès sporadique en Norvège, mais n’a rien d’un classique. Encore un slow avec "Hey Love", mais celui-ci me semble un brin plus convaincant, toujours de la même obédience musicale. Rien ne change vraiment avec "If I Sing You A Lovesong", trop sirupeux, on baisse un peu. Tous ces slows singles sont sympas mais contrairement au single numéro deux, ils n’ont aucune postérité et leur qualité n’est que moyenne. On reste dans la countrypolitan de qualité avec "Blame Me".

Enfin, un changement, il y a pas mal d’AOR, presque du Hard-rock dans "Living For The City" avec un beat de synthés obsédant et une gratte très seventies, titre super bien foutu, à retenir, et dont le break sonne carrément prog. J’ajoute que la voix de Bonnie fait mouche dans ce genre de titre, on se prend à rêver de l‘entendre chanter du métal, ma parole !
"Yesterday’s Dream" présente une facette plus pop-rock avec son hammond et une vibe très mainstream de belle tenue. "A Natural Woman" est un autre slow naviguant entre la country pour sa lap steel et l’AOR pour l’ambiance générale. De la pop quoi ! Le refrain composé par Carole KING et son époux Gerry Goffin se laisse bien apprivoiser et cette version de Bonnie TYLER est très accceptable. L’autre reprise de l’album est "Baby Goodnight", dont l’originale provient de L’INCREDIBLE STRING BAND écossais, les goûts de l’artiste sont éclectiques et promettent pour la suite de sa carrière, avec une belle guitare bien cristalline.

L’album charte partout… Sauf en Grande Bretagne ! Nul n’est prophète en son pays ! Mais le monde entier se pâme devant le talent vocal de la jeune femme… sur un morceau ! Un joli brin de morceau que ce "crève coeur" qu’on aime tous à chantonner de temps en temps. Il faut admettre que la présence de "It’s A Heartache" prêche pour une bonne note tant ce titre est essentiel. Je garde le super "Living For The City" pour la bonne cause de la mémoire, le reste est toujours de bon aloi. Alors, il va peut-être sonner too much à certains de mettre un quatre au deuxième tome des aventures de Bonnie TYLER, mais telle est la force de "It’s A Heartache", c’est comme ça !