J.R CASH est né en 1932 pendant la grande dépression, à Kingsland, sud de l'Arkansas, dans une famille pauvre de planteurs. De trois ans l’aîné d'ELVIS, il est aussi son voisin, Tupelo, la ville natale du King, étant à deux heures de route de l'autre côté du grand Mississippi. Ses jeunes années sont bercées par le gospel qu'il chante à l'église et dans les champs, et marquées par la perte terrible de son frère aîné, coupé en deux par une scie circulaire. C'est aussi le moment où il commence à écrire des chansons. Il s'engage à San Antonio dans l'US air force à l'âge de 18 ans. Il s'y choisit le prénom de John. Opérateur radio, il part en Allemagne où il reçoit notamment le message de la mort de Staline en 53. Et où il fonde ses premiers groupes. A son retour en 54, il quitte l'armée et se marie avec Vivian Liberto, avec laquelle il a eu 4 filles. Installé à Memphis, la Mecque du son, il auditionne pour Sam Philips, le patron des Sun Records avec les TENNESSEE TWO : Luther Perkins à la guitare et Marshall Grant à la basse.

C'est ainsi que Philips produit ses premiers Singles dont on retrouve ici le deuxième "Cry Cry Cry", son premier vrai succès. Il s'agit d'un mix de Country et de Rockabilly comme le pratiquent les poulains de l'écurie Sun. C'est ce que fait Elvis à la même époque, en incontestablement moins couillu, moins pêchu. Mais c'est une composition originale qu'il déclame à la Hank WILLIAMS de manière encore assez traditionnelle. Le single suivant est le légendaire "Folsom Prison Blues" qui porte la marque d'une plus grande modernité, et permet à la voix grave de CASH de s'exprimer avec verve. Mais, c'est le troisième single "I Walk the Line" qui va véritablement casser la baraque, en devenant le classique que l'on sait et qui lui ouvre les portes de la renommée. Carl PERKINS lui souffle le nom et Sam Philips lui glisse l'idée d'en accélérer le tempo. Voilà comment naît un super classique, qu'il enregistrera plusieurs fois et qui traversera les générations jusqu'à aujourd'hui. Elle est classée 30ème dans les 500 plus grandes chansons de l'histoire par Rolling Stone. Ces trois singles sortent tous en 55 et 56.

"So Doggone Lonesome" est le quatrième et moins connu des singles de ce premier album. C'est pourtant la plus rock des compositions. On reste tout de même assez loin du Rockabilly beaucoup plus enjoué et gai pratiqué par son camarade de promotion Carl PERKINS. Comme on ne le sait pas encore, Johnny penche déjà plus vers une country traditionnelle que vers le Rock de Jerry Lee LEWIS ou Elvis PRESLEY. Pour l'instant, le souci est de parvenir à vivre de la musique. C'est alors une existence incessante de tournées épuisantes qui débute et qui le mène à de sévères addictions. Les intonations louchent parfois vers un trip plus bluesy comme sur l'efficace "I Was There When It Happened", mais les rythmes choisis par l'artiste sont trop steady pour être réellement catalogués "Rock" : voyez la country de "Remember Me", "I Heard That Whitles Blow" ou le gospel "If the Good Lord Willing". "The Wreck of Old '97" est certes plus rapide mas le chant de Johnny y est clairement countrysant.

Du coup, on retrouve les aspects vraiment rock sur une minorité de morceaux : dans "The Rock Island Line", Johnny dit à ses musiciens d'accélérer le rythme durant l'enregistrement – on l'entend dans la chanson -, ce qui tend à prouver sa volonté d'échapper au traditionnel et de se lancer dans le grand bain de la fusion. Le titre se présente donc comme un vrai rockabilly, ce qui explique sans doute le rattachement de Johnny CASH au mouvement rock à ses débuts. On peut aisément lui adjoindre "Country Boy" et surtout "Doin My Time" pour entériner le statut de rocker du Johnny CASH des débuts.

Au final, c'est un premier album de grande qualité, si ce n'est de grande originalité. On lui préfère donc de ce point de vue les premiers Elvis PRESLEY ou Jerry Lee LEWIS. Nous sommes d'ailleurs assez éloignés du rock'n'roll fendard de Gene VINCENT ou du Rockabilly de Carl PERKINS. Toutefois, en ce qui concerne la voix et le talent de composition, une autoroute s'ouvre devant celui qui n'est pas encore l'homme en noir. Bien sûr, les classiques ici présents ne sont pas encore dans leurs atours définitifs mais la spontanéité et le roots ici dégagés sont de superbe facture. A redécouvrir !