Recherche avancée       Liste groupes



      
MUSIQUE ÉLECTRONIQUE  |  CLIP VIDEO

L' auteur
Acheter Cet Album
 


 

- Style : Forest Swords
 

 Bandcamp (154)
 Bandcamp (2) (182)
 Site Officiel (168)
 Youtube (chaine Officielle) (330)

LORN - Perfekt Dark (2022)
Par CHIPSTOUILLE le 7 Mai 2022          Consultée 627 fois

Difficile de voir dans le clip de Perfekt Dark autre chose que de la solitude, du confinement et une certaine forme d’abandon à la nature. Ces 2 dernières années nous ont en effet emmuré dans certains automatismes. LORN nous ferait-il là, avec sa fenêtre d’immeuble entrouverte en guise de conclusion, une apologie du suicide ? Ce que les paroles pourraient en effet confirmer. Trop simple, beaucoup trop simple. Ma première réaction a été, comme pour le clip de Silhouette, une certaine circonspection. Mais nous savons désormais qu’il y a bien plus à aller chercher dans ces images. Alors de nouveau, on a prêté attention aux détails. "Perfekt Dark", le titre, est issu de l’album Drown the Traitor Within, au même titre que Timesink. Un détail qui nous ramène à cette confrontation entre l’homme et la nature, bien plus qu’au suicide, au moins autant que bien des éléments de ce clip.

Feu et glace, soleil et lampadaire, rue enneigée et lac gelé, arbres et antennes, ville et nature, quelques oppositions contrastées sont ici évidentes. Perfekt Dark nous présente le même homme, seul, dans 3 contextes bien différents. Des artéfacts de montage, laissant la pellicule parfois visible devant l’image, nous démontrent qu’il n’y a là pas d’unité de temps. L'homme est ici face à lui-même dans sa chambre obscure, face à sa solitude dans les rues d’une ville de nuit, et face à la nature. La vraie nature donc, celle que l’on ne trouve plus que dans les montagnes et les forêts, et qui comme la campagne, se fait peu à peu avaler par les empreintes de l’activité humaine.

C’est alors qu’au-delà des contrastes évidents, ce sont des parallèles qui se dévoilent entre ces temps hachés du récit. Dans ces milieux dissociés, les rapprochements possibles ne se font que sur deux des trois lieux. Est-ce alors pour mieux mettre en exergue en quoi s’oppose le 3ème ? Le miroir de la salle de bain et du rétroviseur ne trouvent en effet pas de meilleure similitude que la glace d’un lac gelé. Si cet homme allume un feu dans l’obscurité de sa chambre ainsi que dans la pénombre de la nature, ce geste n’a pas d’équivalent dans la ville, car il ne fait plus sens face à un éclairage public. Eclairage qui semble bien vain puisqu’il n’y a personne d’autre à éclairer que lui. S’il peut se mettre à nu dans sa chambre ou en pleine nature, quelle que soit la température, il ne le peut plus en pleine ville. Ville où il se trouve pourtant tout aussi seul, mais où l’usage fait loi.

Il y a bien un parallèle que l’on trouve dans les trois lieux : une gerbe de fumée montante. Dans la chambre, c’est une fumée de cigarette. Dans la nature, c’est la colonne d’une cheminée d’usine perdue au milieu du décor. Dans la ville, c’est l’homme lui-même qui émet de la vapeur d’eau qui se condense sous nos yeux dans un soupir. Pollution, addiction, désespoir… Voilà pour les thèmes. Trois gestes qui n’évoquent qu’une mort à petit feu, et non soudaine.

Dark, comme je vous le précisais encore récemment dans la chronique de Fear of the Dark, ce n’est pas le noir, mais la pénombre. Pénombre parfaite, n’y a-t-il pas là un paradoxe ? La pénombre n’est-elle pas imparfaite par définition ? Cet homme, en position de Christ face à un soleil sur la ligne d’horizon s’abandonne à la nature. Cette fenêtre entrouverte en fin de clip, qui ne donne que sur un immeuble, n’appelle quant à elle en rien à la nature. Reste donc entre les deux fins qui se font écho, l’homme dans la ville. Où l’a-t-on laissé à la fin de ce clip ? Face à un lampadaire en pleine rue. Un homme immobile comme dans sa chambre, figé dans les particules de lumière, fasciné par le prodige de l’électricité, tel un papillon de nuit.

Musicalement, de même, "Perfect dark" joue sur un contraste fait de lumière synthétique et d’obscurité. Quelques notes, aussi perçantes qu’étrangement chaleureuses, nous guident tel un faisceau lumineux au milieu de la pénombre de son silence froid et étouffant. L’abstract hip-hop de LORN, constitué d’un rythme lourd et d’une basse qui solidifie le propos, fait alors son entrée. L’ensemble garde ce côté synthétique, urbain, et parfaitement tourmenté. Le rythme est aussi lent qu’une marche sentencieuse, et semble nous guider vers le néant.

Or, si l’on prête également attention aux lumières artificielles de ce clip, elles ne forment que des lignes droites de par leur répétition, dans des rues qui le sont tout autant, bordées de barrières en tout genre. Dans cette avenue où il marche, l’homme guidé par ses propres lumières, n’a qu’une seule direction à suivre. Ces guides faiblement lumineux semblent ici nous imposer une route que nous n’avons pas choisie. Des petits guides bien alignés, bien artificiels, ridicules face au chaos d’un feu et à la splendeur luminescente du soleil. Le contraste entre cette chambre-prison aussi immobile qu'un point, cette ville qui n'est que ligne droite dans laquelle les prétextes pour s'arrêter sont nombreux, et cette nature qui s'étend dans toutes les directions n'en est que plus saisissant.

Là, les paroles prennent tout leur sens. "Une écharde dans ton esprit avait appelé la pénombre, souhaitant que tout cela s’écroule". Aucune apologie du suicide ici, j’y vois pour ma part l’exact inverse. Nous avons ici un avertissement quant à notre attitude défaitiste, notre apathie collective, notre immobilisme, notre désir intime d’apocalypse face à des problèmes qui nous dépassent individuellement. Point, ligne et plan, nous sommes ici invités à changer de perspective. C'est d'ailleurs bien une notion de verticalité, dernière dimension, qui nous libère à la fin. Notez également que pour la première fois, l’artiste se passe d’effets spéciaux, d’animation, ou de quoique ce soit d'artificiel, si ce n'est le montage, pour soutenir son propos. La pénombre parfaite, celle que LORN dénonce ici, est celle de nos vies modernes dans lesquelles on se laisse confortablement aveugler, voire endormir, jusqu’à nous y laisser brûler tels des papillons. Alors que la lumière se trouve pourtant partout autour de nous.

A lire aussi en MUSIQUE ÉLECTRONIQUE par CHIPSTOUILLE :


TOTAL ECLIPSE
Violent Relaxation (1996)
Le 2nd meilleur album de trance, avec de l'ambient




BALDOCASTER
War Rig (2022)
Dune III: Fury Road


Marquez et partagez





 
   CHIPSTOUILLE

 
  N/A



- Marcos Ortega (musique)
- Mikhail Mon (réalisation)
- Sergey Blinov (modèle)


1. Perfekt Dark



             



1999 - 2024 © Nightfall.fr V5.0_Slider - Comment Soutenir Nightfall ? - Nous contacter - Webdesign : Inox Prod