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LORN - Acid Rain (2015)
Par CHIPSTOUILLE le 31 Décembre 2021          Consultée 926 fois

Vous devriez aller à l’accueil, je crois qu’il y a un problème avec votre camarade de classe.

C’est comme ça qu’on a compris pourquoi sa chaise était vide, ce lundi matin-là. La douche froide. Je ne retrouve même plus son prénom. Pensez… à peine 3 mois sur 5 ans d’études, ça fait court pour se rappeler quelqu’un 23 ans plus tard. Il est parti trop tôt. Merci à vous de tous être venus, nous avait dit sa mère. Merci pour quoi ? Ce n’est pas ça qui allait le faire revenir. Ça n’a même pas suffi à ce que je me souvienne de son prénom. La seule chose qu'il me reste de lui, c’est son visage et son sourire. Un mec plein de vie, jusqu’à ce qu’il ne la perde.

Puis, il y a eu Nicolas. 10 ans dans la même classe, vous pensez bien que je me souviens de son prénom. Mais entre la maternelle et la fin du collège, nous avions eu le temps de changer, nous ne nous parlions pratiquement plus. La dernière fois que nous avons réellement échangé, c’était à une boum. Nous étions encore trop jeunes pour boire ou conduire, nous n’avions pas encore ce choix-là. Je n’ai jamais trop aimé ce genre de fêtes. Je n’aime pas mon corps, je n’arrive pas à danser. Alors se retrouver enfermés dans une semi-obscurité avec de la musique douteuse qui recouvre la moindre parole, ça m’a toujours ennuyé. Eux, ils aiment danser, ils aiment montrer leurs corps, ils paradent pour s’aimer.

Si c’était pour faire la gueule, ce n’était pas la peine de venir, m’avait-il sommé. Ça m’avait secoué, une phrase qui marque pour l’éternité. Il avait raison. Ça ne sert à rien d’être triste, surtout un jour de fête. Alors je me suis ressaisi, grâce à lui. Quelques années plus tard, j’avais déménagé, très loin. Mes parents étaient repassés voir nos anciens voisins. Tu te souviens de Nicolas ?, m’avaient-ils d’abord demandé en guise d’airbag, histoire d’amortir le choc, celui qu’il n’avait pas pu éviter. Oui, je m’en souviens, je m’en souviens très bien.

Pour LORN, la douche froide est un euphémisme. Lui préfère parler de pluie acide. Une eau traitresse tombée du ciel, censée donner la vie, et qui n’entraîne que la mort. Cette fois-ci, le clip est officiel. Ce qui n’empêche pas certains de proposer une version alternative sur la toile, parfois avec talent (1). Il faut dire que Acid Rain a de quoi inspirer. Cette litanie sublime me hante, nous hante. Le son est abrasif, la mélodie se constitue d’un motif d’une simplicité redoutable, accompagnée d’un rythme lancinant comme la fatalité. Acid Rain est triste, comme une nouvelle tragique. La musique, elle, est poignante de sincérité.

Côté images, on assiste à un ballet de pom-pom girls dans la nuit et la brume. La première sort d’une voiture encastrée dans un poteau, sonnée. Puis les percussions arrivent, et elle se met à danser ; une danse désarticulée, discontinue. Une autre l’accompagne dans un 'diner', et puis une troisième nous invite à la suivre. Le plan séquence se déroule dans un léger ralenti. Elles sont blessées, elles ont du sang sur le front, sur les bras, sur les joues. Quelque chose ne va pas. Puis, réunion des cinq filles dans le parking. A la microseconde où le beat revient, elles reprennent leur danse en groupe, comme une fleur qui éclôt et se fane subitement. Une fleur victime de pluie acide.

Winkee Krick est à l’origine de cette chorégraphie. Réussir l’exploit de fasciner le dernier des réfractaires à l’art de la danse vaut largement une mention. On ne citera pas toutes les personnes responsables de ce coup de génie visuel. Mais entre le plan séquence et le ralenti, l’ensemble nous subjugue. Je répète pour que ça rentre, pour que vous compreniez bien : il s’agit d’une danse calée sur le rythme de la chanson, mais les images sont au ralenti, et c’est un plan-séquence ! Le clip a récolté quelques récompenses, il le mérite largement. Il est bien trop malsain pour être repris dans une publicité. Tant mieux.

Pour parer au problème, à Clermont-Ferrand, on vient encore de nous abaisser les limitations de vitesse sans discernement : 30 km à l’heure dans les rues désertes, 50 sur les 4 voies. En plein jour, en dehors des heures de pointe, on se fait un peu chier, on perd notre temps… Promesse de campagne, nous a-t-on dit. Comme si on avait voté pour ça. Comme si la vitesse était l’origine du problème. Ce n’est pas en peignant des 30 dans des ovales sur le goudron que des gamins de 18 ans vont arrêter de justifier l’expression place du mort le samedi soir à 4h du matin. Le problème, c’est que pour s’amuser, ils ont besoin de noir pour ne plus voir, de musique à fond pour ne plus entendre, et d’alcool et d’autres drogues pour ne plus sentir. Parce que pour 's’amuser', on a besoin d’oublier notre corps. Parce que pour vraiment ressentir quelque chose, on a besoin de se déconnecter de la réalité.

En Grèce, à chaque accident mortel, on érige une sorte de panneau sur le bord de la route, constitué d’une petite maison en bois surmontée d’une croix, abritant une icône. Quand vous arrivez sur un virage où ces cercueils miniatures vous accueillent, ça donne un peu plus envie de lever le pied. Il y en a partout, sur toutes les routes. Ce n’est pas une solution, il n’y a pas de solution définitive aux accidents. Mais se souvenir de chaque mort, à chaque virage, c’est mieux que de peindre le goudron avec des nombres à la con. Ça nous alerte sur les endroits vraiment dangereux. Ça nous évite d’oublier d’être prudent. Ça nous évite de nous déconnecter de la réalité. Parce que la peinture, on a vite fait de l’oublier.

Alors Nicolas, toi qui es dans l’au-delà, toi qui as oublié la peinture, toi qui t’es déconnecté au mauvais moment, au mauvais endroit, permets-moi de te répondre ceci, même si on ne se parlait déjà plus : Si c’était pour mourir dans un accident de voiture, ce n’était pas la peine de venir non plus.


(1) La claque initiale, inoubliable :
https://www.youtube.com/watch?v=nxg4C365LbQ
L’indispensable version Metal de Artificial Fear, une fois que vous aurez digéré le clip officiel :
https://www.youtube.com/watch?v=8Sfq38cZszQ
Une version qui reprend des éléments du clip officiel au travers de Donnie Darko (Yabloko Moloko) :
https://www.youtube.com/watch?v=mqFLiwML-D0
Un autre clip alternatif qui vaut le détour (Freditor) :
https://www.youtube.com/watch?v=qMRAAEgqKpU
Ralentie, version Ghost In the Shell, ça marche toujours à peu près (80poo) :
https://www.youtube.com/watch?v=8ulE_ra5kdE
Si vous aimez vraiment les chorégraphies, celle-là n’est pas mal non plus (SmileqqWaves) :
https://www.youtube.com/watch?v=YoMcx9HMyOg
Une version au piano, pas inintéressante (Melody Redacted) :
https://www.youtube.com/watch?v=a11_pTYEwbE
La version ralentie 8 fois, qui fonctionne toujours, vive l’ambiant (Smack Daddy) :
https://www.youtube.com/watch?v=b3i06yw4A4E
On n’oublie pas MetaCitizen, qui nous propose un montage du film Beyond the Black Rainbow :
https://www.youtube.com/watch?v=SH-o7edhqss

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- Marcos Ortega (musique)
- Kayla Frails (danse)
- Jacqueline Ann Lewarne (danse)
- Morgan Ceely (danse)
- Emily James (danse)
- Val Rockey (danse)
- Pavel Brenner (direction)
- Julian Flores (direction)
- Sherif Alabede (direction)
- Affonso Beato (conseil créatif)
- David Bouza (conseil créatif)
- Pavel Brenner (direction photographie)
- Winkee Krick (chorégraphie)


1. Acid Rain



             



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