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GRATEFUL DEAD - Terrapin Station (1977)
Par MARCO STIVELL le 18 Septembre 2022          Consultée 711 fois

Terrapin Station est tout à fait le disque qui pourrait plaire à celui que la musique du GRATEFUL DEAD peine à convaincre : il est aussi peu représentatif qu'il demeure personnel. En 1977, le groupe a laissé sa fausse pause derrière et repris un rythme presque habituel d'enregistrements et de tournées. Les albums s'étant succédé, un certain laps de temps est nécessaire suite à la fin, trois ans après ses débuts, du label indépendant qu'il avait créé. L'autonomie, vouée à l'échec (et aux titres rendus indisponibles pendant des années), se solde par une sacrée aubaine : un contrat chez une major, cinq années après être sortis de ce milieu !

Arista Records signe donc le GRATEFUL DEAD et le groupe y reste jusqu'à sa dissolution au début des années 90. Un producteur les épaule pour ce premier opus en catalogue, et il s'agit, ni plus ni moins, de Keith Olsen, grand manitou du pop-rock californien, dont le succès le plus éclatant jusqu'alors est l'album blanc de FLEETWOOD MAC en 1975. En déménageant à Los Angeles pour un temps et de nouveau, trois ans après Wake of the Flood, Jerry Garcia et les autres ne seront pas toujours si éloignés du combo mixte anglo-américain dans l'esprit, à plus forte raison en cette année 1977 pleine de 'rumeurs' west-coast.

Bob Weir, en particulier, domine la face A du vinyle en joignant souvent son chant à celui de Donna Jean Godchaux. Toujours amusant, ces duos femme-homme qui semblent symboliques pour les profanes alors que le mari véritable n'est pas loin, au piano pour le coup ! Le seul moment un rien regrettable de Terrapin Station se trouve d'ailleurs un peu après le début des hostilités : "Dancin' in the Streets", reprise du tube de MARTHA & the VANDELLAS et en partie composé par Marvin GAYE au début des années 60. L'occasion de rameuter Tom Scott aux saxophones (L.A. EXPRESS, les BLUES BROTHERS), faire fleurir le groove endimanché à la STEELY DAN.

À côté de cela, en revanche, rien à redire ! "Samson & Delilah" reprend l'idée de fête mais sur un mode blues plus dans les cordes du DEAD, de l'orgue soyeux, des guitares en son clair et un peu de gospel dans l'emploi des choeurs ; c'est un traditionnel arrangé par Weir. Avec la seule femme du groupe, il chante "Passenger", écrite par Phil Lesh, et qui évoque justement FLEETWOOD MAC mieux que tout autre morceau ici dans l'efficacité avec un rock sudiste incisif, inspiré, guitare slide comprise. Donna Jean Godchaux, seule cette fois, chante son propre "Sunrise", ballade brumeuse, délicate, envoûtante, en quête de spiritualité. Des cordes commencent à poindre en fond.

Jusque-là, mis à part ce dernier morceau un peu plus aventureux, seuls ont été cités les efforts qui font en grande partie que ce disque a été moins apprécié des fans et du groupe lui-même ! Trop propre, trop carré ; plusieurs membres se sont exprimés sur le sujet, et la mésentente avec Keith Olsen n'a rien fait pour arranger. J'admire le bonhomme, mais sa démarche pour 'popifier' le groupe davantage ne pouvait que difficilement être appréciée. Le son du GRATEFUL DEAD sent trop le studio, l'écriture classique : il suffit d'écouter les versions live pour constater leur bonheur retrouvé !

Pourtant, c'est aussi ce qui fait le charme de ce disque, à commencer par sa pochette, légère, simple, sans squelette (il est au verso) et que je ne me lasse pas de regarder. Et puis tout de même, on débute avec le génial "Estimated Prophet", nouveau reggae inventif et imparable après "Crazy Fingers" du précédent album. La Californie, terre étrange de personnalités religieuses, souvent de pacotille, y compris parmi les artistes, c'est tout le propos chanté par Bob Weir. Ce rythme décalé en 7/4, cette wha-wha, ce phaser sur les choeurs pendant le pont, cette variation en mineur et ce solo de lyricon (instrument à vent électronique alors à la pointe), ce soleil et ces voix féminines, miam !

Et comme le disque d'avant avait sa pièce-maîtresse en face B, ici c'est le morceau "Terrapin Station" qui vient faussement conceptualiser l'ensemble, avec ses 16 minutes révolues et destinées au fan de rock progressif. Robert Hunter, le parolier, s'inspire de chansons et poésies anglaises traditionnelles, cette fois-ci, en relatant l'histoire d'une jeune dame courtisée par deux frères et qui dépêche son élu dans l'antre d'un lion, afin de prouver sa valeur ("The Lady of Carlisle"). Keith Olsen, dans le dos du groupe, emporte les enregistrements avec lui à Londres et fait venir l'orchestre de Martyn Ford, sous la supervision du chef Paul Buckmaster, le même que celui d'Elton JOHN.

C'est fort de café, mais terriblement bien joué, n'en déplaise à Bill Kreutzmann & co qui boudent cette version studio par rapport aux futures ; seules les trois premières sections de "Terrapin Station" seront jouées live régulièrement. Cette pièce était prévue pour devenir un chef-d'oeuvre, depuis le premier instant où Jerry Garcia a pensé ce riff d'intro - que Bob Weir illustre en mélodie lydienne (un mode dissonant) et Keith Godchaux souligne au Fender Rhodes -, rentrant chez lui direct pour le noter, écoutant Robert Hunter plus tard soumettre son concept et lui dire  J'ai la musique !

Depuis le départ, ça resplendit de beauté naïve, et puis ces paroles ! Let my inspiration flow In token rhyme suggesting rhythm, parmi le plus beau de ce que le DEAD doit à Hunter, tout comme, plus loin, inspiration move me brightly, light the song with sense and color. Besoin d'acides pour planer avec force, vraiment ? Le GRATEFUL DEAD en 'laid-back', dans un décontracté musical riche qui n'a rien à envier à PINK FLOYD, le solo harmonisé de Jerry en plus de sa voix douce, les cordes qui grimpent à nouveau derrière le groupe. Bref, la poésie, la profondeur, l'excellence ; du petit lait !

Et c'est comme ça jusqu'à la fin, même durant le court interlude planant "Terrapin Transit" fourni par Mickey Hart et Bill Kreutzmann, fait de percussions cristallines. Le long fondu conclusif est trompeur, car en prêtant l'oreille, on entend bien le point d'orgue, l'arrêt général. Olsen et Buckmaster ont même imposé une chorale symphonique sur "Refrain", très osé pour les fans du DEAD, mais tellement classe ! Et varié, quand on sait que cela suit un moment jazz-fusion mêlé de violons et trompettes, avec quelques touches d'Orient encore pour rappeler l'album précédent.

Aussi bien chanté (les sous-parties "Lady With a Fan", "Refrain") qu'instrumental, "Terrapin Station" propose enfin ce que j'appelle le clou, où Jerry Garcia & co se font aventureux et épiques comme jamais, transcendant leur musique malgré et avec toutes les contraintes de ces sessions d'enregistrements. La montée de "Terrapin" (aux alentours de 6,30-8,30 minutes), sa marche grandiose d'une distinction plus british qu'américaine, pousse les hautbois et même les guitares grasses inattendu(e)s au point d'en donner des frissons. Une réussite inestimable, un des plus beaux du DEAD !

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   MARCO STIVELL

 
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- Jerry Garcia (guitares, chant)
- Bob Weir (guitares, chant)
- Phil Lesh (basse)
- Bill Kreutzmann (batterie)
- Mickey Hart (batterie, percussions)
- Donna Jean Godchaux (chant, choeurs)
- Keith Godchaux (claviers, pianos, synthétiseurs, choeurs)
- Tom Scott (saxophones, lyricon)
- Paul Buckmaster (arrangements orchestraux)
- The English Choral
- The Martyn Ford Orchestra


1. Estimated Prophet
2. Dancin' In The Streets
3. Passenger
4. Samson & Delilah
5. Sunrise
6. Terrapin Station



             



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