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Etta JAMES - All The Way (2006)
Par LE KINGBEE le 1er Octobre 2022          Consultée 752 fois

Désormais dans le giron de la RCA qui a racheté le catalogue Private Music, Etta JAMES enregistre son second opus, comme le stipulait son contrat. Elle retrouve pour l’occasion ses deux rejetons et une équipe de fidèles, les guitaristes Bobby Murray, Josh Sklair, et le trompettiste Ronnie Buttacavoli (ex-Boz SCAGGS, Dave BRUBECK, Wilson PICKETT, Michael McDonald). La famille James se charge de la production aussi bien artistique qu’exécutive. Elle ne le sait pas encore, mais dans deux ans la chanteuse fera l’objet d’un biopic (Cadillac Records) dans lequel son rôle sera tenu par BEYONCE. Signalons au passage que la réalisatrice Darnell Martin se permettra de nombreux faux pas avec l’histoire, un péché mignon dont Hollywood est coutumier.

La pochette nous révèle une Etta JAMES terriblement amaigrie. La chanteuse l’ignore peut-être, mais cet album sera son avant dernier : elle devra bientôt passer l’éponge, passant ses dernières années à subir une flopée de traitements liés à une vie d’excès. Les années passent à une vitesse folle et de nouvelles vedettes ont fait leur apparition depuis peu dans le monde de la Soul et de ses différentes branches (BEYONCE, RIHANNA, Kanye WEST, Chris BROWN ou Justin TIMBERLAKE). Au milieu des cette nouvelle génération, Etta démontre qu’elle est toujours bien présente à 68 balais.

Ne tournons pas autour du pot : à la lecture des 11 titres, on se dit que la vétérane s’attaque à un véritable American Songbook. Une première étude des pistes inciterait à penser que la chanteuse a voulu se faire plaisir en reprenant des chansons dont la plupart font partie du patrimoine culturel américain. On se dit aussi qu’il n’y a pas vraiment de trame entre ces différentes sections.
Une seconde écoute nous laisse l’impression d’avoir une production trop polie, presque trop proprette, comme si on s’était efforcé de rester dans la mouvance sonore de l’époque. A la troisième écoute, on se dit que la chanteuse a pris soin d’aborder certaines chansons en égrainant plusieurs registres (Soul, Jazz, Blues) comme elle le fait depuis une dizaine d’années dans ses albums. A la quatrième écoute, cette fois-ci, la trame nous saute aux yeux, ou plutôt aux oreilles : le lien reliant toutes ces pistes quelles que soient leurs racines, c’est la voix. Et quelle voix ! C’est à se demander si Etta JAMES a déjà aussi bien chanté.

En ouverture, la reprise de "All The Way", standard de Sammy Cahn popularisé par SINATRA, s’offre comme une délicate mise en bouche. Le piano de David Mathews renforce les subtiles interventions de trompette tandis que les arrangements évitent soigneusement l'habituelle surenchère pathos. Cette version, selon nous, parvient sans effort à faire oublier celles de Sam COOKE, Etta Jones ou Anita BRYANT). Chez nous autres, Georges Guétary et Gloria Lasso l’adaptèrent avec "A Jamais", et là on ne peut s’empêcher de penser que les malentendants sont parfois chanceux.

Deux titres moins connus chez nous viennent agrémenter l’album : la seconde piste peut créer un bref moment d’incertitude suite à la disparition de l’intro parlée de Bobby WOMACK dans "Stop On By", mais l’orchestration stylisée et le chant nous offrent la parfaite mixture entre l’original et la reprise de Rufus avec Chaka KHAN en tête de gondole. Cette interprétation relègue à des années-lumière celle de l’anglais Paul YOUNG. Autre grand moment avec "Strung Out" *, de Johnny "Guitar" WATSON avec un nappage de guitare et un léger enrobage de synthé rappelant Gino Vannelli.

Etta JAMES reprend des titres plus contemporains dont le choix peut surprendre. Il ne faut qu’une dizaine de secondes pour reconnaître "Holding By The Years", morceau des Frantic Elevators popularisé par SIMPLY RED, autre groupe de Mike Hucknall. La guitare place sur orbite la chanteuse qui semble dérouler tandis que la trompette bouchée apporte un certain cachet et que la rythmique se montre groovy à souhait. Une version qui dépasse, d’après nous, celles de Randy Crawford, Angie Stone ou Jimmy Scott. On préfèrerait même la présente reprise à l’original trop entendu.
Les cinéphiles reconnaîtront assurément "I Believe I Can Fly", titre de R. KELLY figurant au générique de "Space Jam". L’orchestration beaucoup plus épurée et la qualité du chant font toute la différence avec l’interprétation exagérée de la star déchue du R'n'B qui vient de voir sa peine d’emprisonnement alourdie pour pédopornographie et crime sexuel, un charmant personnage dont plusieurs plateformes de streaming viennent de rayer le nom de leurs catalogues. Il n’est pas sûr qu’Etta JAMES aurait repris cette chanson si les sordides manies du chanteur avaient été connues en 2006.

Grand succès de James BROWN, "It’s A Man’s Man’s Man’s World" a été repris plus d’une centaine de fois. Si chez nous, Nino FERRER en délivra une excellente adaptation avec "Si tu m’aimes encore", le titre a fait l’objet de reprises discutables (Tom JONES, CHER, Joss STONE, Patricia KAAS). Là, si l’intro avec une bordée de cordes via les synthés de David Mathews laissait craindre le pire, l’arrivée d’une guitare flamenca met fin au doute, d’autant que le tempo impulsé par la rythmique se révèle particulièrement au point. Cette reprise figure à notre avis dans le tiercé avec l’originale et celle de Leela James **.
Autre bon moment avec "Purple Rain", titre emblématique de PRINCE. Si on reste assez attaché à l’originale, la qualité du chant et un accompagnement évitant soigneusement toute surenchère constituent des atouts de première main. Si le titre a connu des covers peu gouteuses (LeAnn Rimes, Randy Crawford ou Helmut Lotti) Etta nous assène encore une interprétation sans faille peut -être l’une des meilleures versions avec celle de Preston Shannon.

Autre moment agréable avec "What’s Going On" ●, standard de Marvin GAYE délivré ici avec un naturel déconcertant. La discrétion de l’orchestration, les délicates touches d’ivoire des claviers de Mathews permettent de mettre la chanteuse au diapason. Une version dans laquelle le chant n’est jamais poussé. Rien à voir avec les essais peu recommandables de Joe COCKER, Roberta FLACK ou de la récente version du tandem Jeff BECK /Johnny Deep. L’album se termine en beauté avec "Calling You" ♯, chanté initialement par Jevetta Steele, (artiste honteusement sous-enregistrée) et popularisé par le biais du film Bagdad Café. La trompette bouchée fait oublier l’harmonica de William Galison dans la version d’origine. Une interprétation pleine de feeling qui enterre définitivement les massacres de George BENSON, Barbra STREISAND ou d’Al KOOPER˟.

Deux titres nous paraissent un ton au-dessous : "Somewhere", immortalisé par Natalie Wood et Richard Beymer *** dans le cultissime West Side Story, manque d’intensité mais a la sagesse de ne pas s’éterniser (130 secondes). "Imagine", plus gros succès de John LENNON, semble avoir le cul entre deux chaises avec la Soul d’un côté et la chanson utopique de l’autre. On note au passage qu’un dirigeant russe n’a strictement rien retenu des paroles.

Sans ces deux pistes plus faiblardes, le disque aurait pu flirter avec la note maximale. Nous déduirons également un demi-point du fait que le répertoire n’est constitué que de reprises. Mais on se souvient qu’en 2006, peu de chanteuses possédaient une telle qualité de chant, tant le timbre, l’émotion, la puissance que le vibrato.


*Titre homonyme à celui de Fred Briggs chanté par Carla Thomas.
** Aucun lien avec Etta James.
●Titre homonyme à ceux d’Art Neville, Taste, Hüsker Dü.
♯Titre homonyme à celui d’Hank Williams.
˟On peut penser qu’il doit y avoir encore bien pire que ces 3 exemples.
***Ils sont doublés par Marni Nixon et Jimmy Bryant.

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   LE KINGBEE

 
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- Etta James (chant)
- Josh Sklair (guitare, chœurs)
- Bobby Murray (guitare)
- Sametto James (basse, chœurs)
- Donto James (batterie, percussions)
- David K. Mathews (claviers, synthétiseur)
- Ronnie Buttacavoli (trompette, bugle)
- Tamara Oliver (chœurs)
- Randy Williams (chœurs)


1. All The Way
2. Stop On By
3. Strung Out
4. Somewhere
5. Holding Back The Years
6. Imagine
7. I Believe I Can Fly
8. It's A Man's Man's Man's World
9. Purple Rain
10. What's Going On
11. Calling You



             



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