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JAZZ PROGRESSIF  |  STUDIO

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- Style + Membre : Pat Metheny

PAT METHENY GROUP - The Way Up (2005)
Par ELK le 20 Mai 2023          Consultée 670 fois

Après plusieurs années consacrées à des projets personnels, PAT METHENY lance en 2003 le projet le plus ambitieux jamais engagé avec le PAT METHENY GROUP : concevoir, écrire et enregistrer un album constitué d’une seule grande pièce musicale représentant toutes les facettes d’un groupe unique au parcours engagé 25 années plus tôt. Cette 11ème réalisation studio finalement parue en 2005 sera, on ne le sait pas encore, la dernière et un tel groupe ne pouvait pas manquer sa sortie ! Pour parvenir au meilleur résultat possible, Pat s’isole six semaines avec Lyle Mays pour composer, non sans avoir au préalable confronté leurs opinions sur l’évolution du monde, et partagé leur vision d’une époque où tout s’accélère et où les activités qui méritent du temps et un long apprentissage, jouer de la musique à haut niveau par exemple, ont apparemment de moins en moins leur place. The Way Up est le résultat de ce paradoxe : une œuvre unique d’une richesse, d’une sophistication et d’une complexité extrêmes qui ne se révèle qu’au fil de nombreuses et attentives écoutes et qui peut se redécouvrir quasiment à l’infini tant elle fourmille de détails, de surprises et de moments magiques.
Pour donner vie à ce projet, Pat Metheny va bien entendu, au-delà de partager cette fois pleinement la composition avec Lyle Mays, s’adosser à la meilleure formation qu’il ait connue avec son groupe : Steve Rodby et sa contrebasse font bien entendu partie de l’aventure, de même que Antonio Sanchez à propos duquel Pat ne tarit pas d’éloges tant il offre de possibilités nouvelles par son jeu de batterie intense et incroyablement connecté à chaque instrument. Pour compléter le casting, Cuong Vu vient de nouveau apporter son incroyable jeu de trompette et sa voix, alors que l’Américano-Suisse Grégoire Maret complète le sextet en jouant de l’harmonica. La partition est conçue pour tirer le meilleur de cet équipage : articulée autour de la guitare sous toutes ses formes, elle s’appuie sur la dimension organique apportée cette fois par l’harmonica et la trompette, de préférence aux voix humaines généralement utilisées par le P.M.G. De même, la capacité de Vu à générer toute sorte de sons et de textures grâce à une approche totalement originale de son instrument va limiter le recours aux habituelles percussions et autres éléments atmosphériques généralement utilisés.
S’affranchissant cette fois de la nécessité d’enregistrer une musique reproductible sur scène (même si on verra que les gaillards ont fini par y parvenir), le P.M.G. propose donc son œuvre la plus progressive, une véritable Symphonie Jazz en quatre mouvements traversés par toutes sortes d’atmosphères et de couleurs, mais reliés entre eux par de subtils et intenses fils thématiques et mis en cohérence par une batterie qui joue un rôle de liant pour l’ensemble. On y entend des parties de claviers orchestrales, des solos sur tous types de guitare, des changements de rythme soudains, des mélodies qui se partagent et s’entrecroisent, des passages planants suivis de grooves stimulants et nombre de textures sonores belles et totalement uniques.
La partie inaugurale de 5’17 "Opening" est déjà un tour-de-force, une sorte de fugue sur fond d’ambiances urbaines où, sur un beat de batterie inflexible, les guitares et les claviers se poursuivent et se rejoignent avant que la trompette et l’harmonica apportent une touche plus viscérale à l'ensemble.
Mais, le plat de résistance du disque se trouve sur la "Partie 1", la plus copieuse avec ses 26’27, qui débute par une magnifique mélodie apparemment simple mais infiniment subtile, indéniablement la plus marquante et accessible de l’album, reprise à l’unisson par la guitare électrique, l’harmonica et la trompette. Des séquences improvisées à la guitare font leur entrée avant une belle accalmie. Après une lente reprise, le rythme s’emballe et Pat se lance dans un magnifique solo gorgé d’esprit Post-Bop, bientôt relayé par le piano de Lyle et la trompette de Cuong, avant la reprise du thème principal et la fin de la pièce. Un très grand moment de Jazz, assurément.
La "Partie 2" s’engage sur de lents arpèges de guitare et de profondes notes de basse électriques, hommage de Pat à Eberhard Weber qui jouait des parties similaires sur Watercolors. Grégoire Maret vient poser un thème lent et profond à l’harmonica avant l’entrée du piano et de l’orchestre au complet. Le tout est drivé par le jeu intense d’Antonio Sanchez qui sait se faire discret mais finalement totalement présent pour orchestrer la montée en forte tension du titre. Gorgé des sons étranges que tire Cuong Vu de sa trompette, la pièce se résout par une courte pause. La suite du morceau s'inscrit dans une atmosphère belle et sereine, avant la montée de vagues plus libres et improvisées mettant en valeur le talent de chaque musicien du groupe.
Le dernier mouvement, "Partie 3", est un peu plus court et s'installe dans une veine plus classique, avec une superbe ambiance nocturne permettant de jolis rappels des thèmes antérieurs. Pat se lance dans un magnifique solo largement jouée 'out', sur une rythmique mouvante, avant que Cuong Vu ne l’imite à la trompette. Des voix font pour la première fois leur apparition, rappelant les belles envolées passées, de jolies parties de contrebasse jouées à l’archet apportent du lyrisme à l’ensemble, et le thème de la partie 1 réapparaît furtivement. Les dernières minutes sont très réussies, bien planantes, avec un rappel du temps qui passe et des harmonies magnifiques dans une atmosphère de quasi recueillement jusqu’à l’extinction du titre.
PAT METHENY a lui-même indiqué avoir tenté de mettre dans cette œuvre la somme des influences et rencontres qui ont jalonné son parcours d’homme et de musicien. Il fait notamment référence à la musique classique contemporaine et à l’œuvre de Steve REICH qui ont jouée un rôle non négligeable dans l’élaboration de The Way Up.
Pour ma part je pense qu’une telle œuvre est d’une grande importance pour la musique Jazz en particulier, à laquelle elle donne un sens et un avenir, la rapprochant viscéralement de son époque et lui traçant clairement une voie pour le futur. Et quel meilleur clap de fin pour un groupe qui a su porter le genre bien au-delà des frontières étanches dans lesquelles veulent encore l’enfermer nombre de puristes, et a offert un nouveau souffle et une approche radicalement novatrice à sa musique de cœur ?
Malgré quelques résurgences en 2009 et 2010, la tournée qui suivit cet enregistrement marqua la disparition de cet immense ensemble, la mort de Lyle Mays en 2020 mettant un terme définitif à toute spéculation à ce propos. Merci donc au PAT METHENY GROUPE pour toutes les merveilles distillées au fil des ans et pour cette sortie triomphale, une véritable apothéose.

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- Pat Metheny (guitare acoustique, guitare électrique, guitare sy)
- Lyle Mays (piano, claviers, xylophone)
- Steve Rodby (basse électrique, contrebasse, violoncelle, flûte)
- Cuong Vu (trompette, chant, sifflet)
- Grégoire Maret (harmonica)
- Antonio Sánchez (batterie)


1. Opening
2. Part One
3. Part Two
4. Part Three



             



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