AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Cette kro-express était à l'origine la chronique principale avant d'être réécrite par CHIPSTOUILLE

Parmi les nombreuses médailles que l'on pourrait attribuer à Stanley Kubrick, l'une des premières serait celle du réalisateur ayant tout compris à la musique de films. On pourra trouver tous les défauts du monde à 2001 (trop chiant), Orange Mécanique (trop désuet... ahem) et autres Full Metal Jacket (aucune originalité), mais impossible d'attaquer Kubrick sur les musiques de films, du moins depuis 1968. A chaque fois, le cinéaste étasunien a non seulement su trouver les musiques adéquates, mais a également su bien les intégrer à ses grandes et fantastiques oeuvres. Parmi ces films, Barry Lyndon ne fait en aucun cas exception à la règle.

Si cette chronique n'était pas musicale, je crois que je serais capable d'écrire des pages entières sur Barry Lyndon. Le dixième film de Kubrick, sorti en 1975, doit sans aucun doute faire partie des plus grands longs-métrages jamais faits sur le siècle des Lumières. Adapté du roman de William Makepeace Thackeray, Barry Lyndon narre l'épopée d'un jeune Irlandais, depuis ses mésaventures au pays jusqu'à la traversée plus ou moins glorieuse du continent européen, au fil d'événements comme la Guerre de Sept Ans, entre autres. Hélas, le film fut un échec dans la majeure partie des pays européens, y compris l'Angleterre. Certains étaient déçus de ne pas voir un Orange Mécanique bis, d'autres fustigeaient la longueur excessive du film (pourtant, du haut de ses 3 heures, il n'est pas gigantesque), alors que certains n'arrivaient pas à s'identifier à un homme aussi exécrable que Redmond Barry. Seule la France (cocorico !) a réservé un bon accueil au film. Avec le temps, Barry Lyndon a tout de même réussi à passer à la postérité et à être reconnu comme le chef-d'oeuvre qu'il est.

Parmi les éléments qui font de Barry Lyndon un incontournable du septième art, il est important de citer la musique. Pour être plus précis, il faut même aller plus loin : parler de Barry Lyndon sans évoquer sa bande-son est un crime odieux, un non-sens absurde, du même ordre que dire que les BEATLES ont tout perdu après le départ de Pete Best. L'association de noms aussi prestigieux et surtout emblématiques pour illustrer le XVIIIe siècle était la meilleure idée possible sur le papier, et s'est concrétisée de bien belle manière. En revanche, choisir le trio pour piano, violon et violoncelle de Schubert était certes un bon choix, mais franchement anachronique. La raison de ce choix, selon Kubrick, serait qu'il n'aurait pas trouvé plus fort dans le genre. Mais d'un autre côté, quand on voit la rencontre entre Barry et Lady Lyndon, il est impossible de lui en vouloir, au fond.

Chaque musique, chaque morceau sélectionné correspond quasi-parfaitement à chaque scène.On peut toujours protester et dire qu'il y avait mieux, mais au vu du résultat, il est raisonnable d'estimer que le cinéaste avait de la marge. Parmi les thèmes les plus marquants, la sarabande de Händel se place au premier rang. A la base, il s'agit déjà d'un grand morceau, mais ses adaptations présentes ici renforcent d'autant plus la charge émotionnelle. Enfin, la musique traditionnelle irlandaise n'est pas mise de côté, preuve en est avec les adaptations fort réussies par les CHIEFTAINS, en particulier Women of Ireland, un classique ici transfiguré, tout comme dans le film.

Oeuvre subtile et sublime, la BO de Barry Lyndon sait également être versatile. Même détachée de son support visuel, elle reste une excellente compilation pour aborder le XVIIIe siècle musical (Schubert mis à part), ce qui n'empêche pas bien sûr de la savourer avec le film. A remettre entre toutes les mains.