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VARIÉTÉ FRANÇAISE  |  STUDIO

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- Style : Glenmor, Hubert Felix Thiefaine , Bernard Lavilliers

Léo FERRE - La Langue Française (1962)
Par LE BARON le 6 Juillet 2017          Consultée 1906 fois

D’abord, il y a la photo ornant la pochette : Léo FERRE, avec un air qu’il voudrait attendri mais qui donne surtout l’impression qu’il s’emmerde, caline Pépée, sa guenon. Jusqu’ici, Barclay s’était contenté d’illustrer les albums de son nouveau poulain avec des photographies assez fades (hormis celle du verso de Paname, montrant un FERRE... en maillot de bain!). On sent que les services Marketing – comment disait-on à l’époque ? - se sont un peu emballés, mais qu’importe ! FERRE, en signant chez Barclay, a rejoint une maison de disques « à l’américaine », pour reprendre l’expression d’un célèbre facteur, c’est-à-dire soucieuse de sortir de beaux produits, mais également d’en faire commerce. Le décalage est pourtant frappant entre cette mise en scène quasi grotesque et l’exigence artistique de FERRE. Il est évident que le chanteur en a conscience et que s’il joue le jeu, cela nourrira son ressentiment à l’égard des producteurs et sa méfiance mêlée d’admiration pour Barclay.

La Langue Française n'a pas totalement bien vieilli. FERRE fait partie de ces artistes qui produisent beaucoup et ne savent pas forcément trier le bon grain de l’ivraie. A cela, s’ajoute le fait que la notion même d’album n’existe pas vraiment à l’époque où les 33 cm ne sont considérés que comme un support permettant de compiler davantage de chansons qu’un 45 tours. Disons-le ainsi : en dehors de ses disques tirés de poèmes (Baudelaire, Aragon), et dont l’auteur a pu servir de fil rouge, FERRE n’a pas encore réellement compris ce que peut apporter le 33 tours. Ses disques semblent donc un peu éparpillés. Certaines chansons sont bonnes, d’autres moins et l’on peine à trouver une véritable unité à l’ensemble.

La Langue Française est donc une collection de chansons. Aucune n’est mauvaise, en ce sens que même celles qui sont oubliées rapidement sont bien écrites, et honnêtement interprétées. Et s’il y a quelques fautes de goûts (l’égrillarde « Les Bonnes Manières » : « Quand je te monte en haut d’chez moi / On n’voit même plus Mme Eiffel. » Vraiment ?), il y a aussi 3 pépites. D’abord l’amusante « Mister Giorgina », dédiée à Jean Cardon, l'accordéoniste de longue date de FERRE. Ce pseudo-tango sur un vieux copain musicien qui se préoccupe de faire danser son public est un beau gage d’amitié.

Il y a aussi « Ca t’va ». FERRE trousse un de ces thèmes dont il a le secret, enfiévré, dont l’intensité croît au fil du morceau. Le texte est bâti sur un rythme de syncope, apportant un puissant souffle à l’ensemble. Plus le discours semble haché, plus la fièvre monte. La chanson monte ainsi en puissance, peu à peu, jusqu’à atteindre au lyrisme. C’est une vraie réussite. Et pourtant, il ne s’agit que d’une énième déclaration d’amour ! Qu’elle s’appuie sur les sentiments de son auteur pour Madeleine, sa femme, n’explique rien  ! Il est d’ailleurs intéressant de comparer « Ca t’va » avec « T’es chouette ». Même sujet, même inspiratrice, et pourtant... « T’es chouette » est une chanson juste honnête, sans souffle, qui pourrait parfaitement être chantée par un autre. Risquons une hypothèse : c’est la musique, la vraie réussite de « Ca T’va », et la syncope du texte. Cela nous permet de (re)dire une évidence, parfois oubliée : FERRE peut s’avérer un grand versificateur, mais également un musicien puissant. Parler de « chanteur à texte » ne doit pas l’occulter.

Deux chansons qui valent la peine, c’est tout de même peu. C’est la troisième qui balaie les faiblesses du disque sur son passage : « T’es Rock, Coco !». En dehors du côté suranné du titre, FERRE innove, imposant ce qui deviendra sa marque de fabrique bien plus tard : la déclamation. Ici, il ne s’agit plus de chanter mais de dire, et avec quelle intensité ! « Avec nos morales bâtardes / Filles d’un Christ millésimé / Et d’un almanach où s’attarde / Notre millénaire attardé » ironise FERRE dans ce texte, à l’évidence annonciateur du « Chien » puisqu’il se termine par un
« Je lâche mon humanité / Et je m’en vais à quatre Pattes ». Comme un chien, donc, et comme un adepte de Diogène. On en reparlera.

Ce 9ème album souffre – une fois de plus - de son côté dépareillé. Contentons-nous des réussites qu’il comporte, et notamment de la déflagration que constitue « T’es Rock, Coco !». Lorsque la langue de FERRE se libère des contraintes formelles, elle devient d’une puissance de toute beauté.

*Il s’agit encore une fois du nom usuel d’un album qui n’en porte pas.

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- la Langue Française
1. Les Bonnes Manières
2. La Vieille Pèlerine
3. Ça T'va
4. Ep Love
5. Mister Giorgina
6. T'es Chouette
7. Ça S'lève à L'est
8. Plus Jamais
9. La Vie Est Louche
10. Les Tziganes
11. T'es Rock, Coco !



             



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