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CHANSON FRANçAISE  |  STUDIO

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- Style : Glenmor, Hubert Felix Thiefaine , Bernard Lavilliers

Léo FERRE - Cette Chanson (1967)
Par LE BARON le 25 Mai 2018          Consultée 2096 fois

Commençons par l’histoire de la chanson manquante. L’album que nous connaissons comporte 12 titres au lieu des 13 prévus*. Il est amputé d’« A Une Chanteuse Morte » retirée car elle déplaisait fortement à Barclay, et pour cause ! C’est un texte dans lequel FERRE ne dit toute son admiration d’Edith PIAF que pour mieux démolir Mireille MATHIEU, que les « marketeurs » de l’époque voulaient justement faire passer pour l’héritière de la Môme. Et qui s’occupe de Mireille MATHIEU, en dehors de l’abominable Johnny Starck ? Barclay bien sûr ! Cela finira par un procès entre les deux hommes, procès que Barclay gagnera, au grand dam de FERRE. Le chanteur en ressortira conforté dans son idée que les producteurs ne sont que des sangsues, incapables de se hisser à la hauteur des poètes, qui n’ont de comptes à rendre à personne, eux ! Ben oui, mais faut bien bouffer. On se contentera des 12 titres.

Alors Cette Chanson**, c’est d’abord une photo montrant un FERRE sardonique, une vraie tronche de gargouille à orner Notre-Dame. On est loin de l’habituel portrait qui orne d’habitude ses albums de sa gueule de poète : crinière blanche, air inspiré.

Bon, FERRE ne fait pas que ricaner, et il y a l’habituel lot de chansons « légères » : « Cette Chanson », « La Banlieue » ou « Le Lit », qui semblent n’avoir été écrites que pour montrer combien FERRE peut versifier en toutes circonstances, et pour le pur plaisir de jouer avec les mots. Aucune n’atteint au chef-d’œuvre, mais toutes sont bonnes, ce qui ne fait que confirmer le chemin parcouru. Car même lorsqu’il s’attarde sur une scène conjugale inspirée de sa vie à Perdigal (« C’est un Air »), FERRE survole la relative platitude du contexte pour s’avérer assez savoureux. Pour la mélancolie, autre ingrédient insécable de l’œuvre de FERRE, on retiendra « Quartier Latin », avec son arpège – qui ressemble étrangement à celui d’« Avec Le Temps » - à vous tirer des larmes. Nulle prémonition des événements de mai 1968 dans cette mention du « Boul’Mich’ », toutefois, comme d’aucuns voudraient nous le faire croire, mais l’évocation du temps qui passe et d’une jeunesse largement révolue.

C’est cependant par ses chansons plus politiques que l’album atteint un sommet. FERRE lâche la bride à sa hargne et règle ses comptes avec la Morale, la Médiocrité ou la République. Ce n’est pas une première, mais il le fait cette fois au cours de plusieurs textes, tous excellents. Il faut citer « La Marseillaise », évidemment. « La Marseillaise », qui peut passer pour une prostituée au début de la chanson, est bien notre hymne national (ce n’est pas contradictoire), porteur de mort, comme tous les hymnes : « C’est dans les champs qu’elle traîn’son cul /Où y’a des croix comm’ des oiseaux / Des croix blanches plantées pour la peau / La peau des autr’s bien entendu. » Le souffle est épique, l’attaque réglée, et la colère semble intacte aujourd’hui, même si la chanson a plus de 50 ans !

Cela se poursuit avec « Ils ont Voté » ou « Salut Beatnik », attaques drôles et mordantes du comportement moutonnier des électeurs, ou « On n’est Pas des Saints », hymne anticlérical. Et puis, de façon plus sombre, avec « Pacific Blues » qui raconte à la première personne le trajet d’un soldat « des colonies » ayant « un rencard avec [sa] mie ». Le genre de rencontre dont les copains ne sont jamais revenus, ou les pieds devant. Ce texte, excellent, était tout de même très provocateur dans les années 60, période de décolonisation récente, et sanglante. Mais FERRE aime ça, la provocation, les prises de positions fermes et définitives. Il a le verbe haut et n’est pas l’homme du consensus.

Cet album confirme le virage pris par FERRE dans 1916-19… : un virage vers davantage de liberté, d’audace stylistique et de prises de positions. On pourra lui reprocher les ajouts de chœurs ces "ooooouuuuuuu" si datés, mais il n'empêche : FERRE est - enfin ? - devenu un auteur / compositeur / interprète hors du commun.


*Il y a bien eu un premier pressage de l’album avec les treize titres, mais les disques ont été détruits.
**J’utilise le nom usuel du disque qui correspond à la première chanson. L’album est une fois de plus dépourvu de titre.

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   LE BARON

 
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- cette Chanson
1. Cette Chanson
2. La Marseillaise
3. Ils Ont Voté
4. Quartier Latin
5. Pacific Blues
6. La Banlieue
7. On N'est Pas Des Saints
8. Salut Beatnik
9. Le Bonheur
10. C'est Un Air
11. Les Gares Et Les Ports
12. Le Lit



             



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