Pour leur huitième album, on ne peut pas dire que les SLADE soient « faciles ». Car tout va mal ! Les ventes sont au plus bas, les singles ne chartent plus, le groupe ne survit que grâce aux droits des chansons de Noddy et Jim. Cette situation dramatique n'attaque pas encore leur bonne humeur, mais les rois du glam ont tout de même du se séparer de la majorité de leurs salariés... C'est ce qui s'appelle une entreprise en faillite ! Mais ça tombe bien, car quand on est issu du black country, on sait que la vie « can be a real piece of shit ». Alors on s'accroche, on tiendra jusqu'au bout ! ! Du coup, voyez plutôt cette couv d'album plus rouge et simple que jamais, et tant pis pour les stades, on joue désormais dans des petits clubs et on porte soi même son équipement ! Pas grave !

Le premier single est « Giny Giny », un titre poppy de belle allure, avec des harmonies bien sympas. Aucun doute sur le fait que Lea et Holder demeurent de grands songwriters. S'ensuit « Sign of the times », un slow qui tente de proposer autre chose, mais la réaction du public sera indifférente, pour dire, les invendus seront même cramés, provoquant jusqu'à nos jours une véritable inflation sur le prix de ce single, totalement délirant ! Le vibrant « Wheels ain't comin down » sortira en 81, une fois reparti le momentum du groupe... Ah vous ne saviez pas ? Et oui, la carrière du groupe va rebondir ! On y reviendra !

Pour le moment, on reste toutefois dans la dèche ! Les mecs tournent comme des brutes, souvent sur leurs deniers, et font la preuve en cette occasion de toute leur grinta! L'album est d'ailleurs produit par leurs soins, Chas Chandler étant relégué au job de manager. Mais ne passez pas trop vite  je signale la présence en ces lieux d'une version absolument rageuse de « I'm a rocker » de Chuck BERRY sui sera aussi immortalisé par les kangourous de AC/DC. Mais écoutez plutôt le chant de Noddy ! Un pur joyau de rock'n'roll, jouissif ! Dans un tout autre genre le très space « Lemme love into ya » leur permet de faire la démonstration de leurs capacités instrumentales, et de surprendre leurs auditoires, à découvrir, vraiment !

Pas mal de tentatives plus commerciales apparaissent aussi, on pense à l'inconsistante « Chakeeta », ou aux mélodiques « Don't waste your time » et « I'm mad », qui ne sont pas désagréables et trimbalent un petit esprit pop sixties. Mais essayez donc l'écoute de cette merveille qu'est « Nuts bolts and screws » qui ne pourra que vous plonger dans un abîme de sourire en headbanguant tel un possédé ! A la fois pop et rock, voilà un titre anthologique ! Plus loin, « My baby's got it » est carrément rockabilly, rapide et sans concessions !

Il n'était pas facile de convaincre avec cette livraison. En 1979, la révolution punk est passée et le statut du rock s'apprête, lui aussi, à évoluer avec la montée de la new wave et des divers sons dance et électronique. Inutile de dire que nos SLADE ne vont pas se transformer en groupe à minettes des eighties d'un coup d'un seul ! Pourtant, le destin est capricieux, et du fond de leur calvaire, les anglais vont avoir le petit coup de pouce qui leur fallait pour rebondir, comme vous allez voir ! En attendant, cet album est très très recommandable. Il a d'ailleurs été tellement peu aimé de son vivant que boum, je lui colle un 4 ! C'est comme ça !