Les pires années de SNOOP DOGG sont maintenant derrière lui. Partie prenante du label de MASTER P nommé No Limits Records, il a perdu toute sa crédibilité en sortant un album totalement dénué de sens et un second plus solide mais toujours sur les mêmes bases de productions commerciales et automatisées. Après ces deux erreurs chez No Limits Records, le rappeur remplit son contrat et envoie ce qui sera son dernier album avec la clique de vautours qui ont des dollars à la place des yeux. Judicieusement appelé Tha Last Meal, cet album est la dernière pièce de bidoche que le rappeur nous envoie avant d'effectuer un revirement de carrière. Ceci étant, la pochette est certainement un clin d'œil assumé à l'album Doggystyle, derrière les barreaux.

Il n'est plus nécessaire de préciser que l'association DR. DRE / SNOOP DOGG fait des miracles. Cette formule éprouvée est à l'origine de nos plus gros classiques de rap américain. Quand les deux se mettent ensemble sur un morceau, le rendu est systématiquement de qualité. Et "Hennesey N Buddah" ne me fait pas mentir : la production proposée par le doc' est tout simplement grandiose, sublimée avec une efficacité déconcertante par l'interprétation de SNOOP DOGG et KOKANE. L'introduction révèle les bonnes surprises que peut nous proposer DR. DRE alors que "Lay Low" nous envoie une instrumentale d'une efficacité monstrueuse, se baladant sur quelques notes qu'une batterie rythme de manière énergique. L'apparition de Nate DOGG, le rappeur le plus calibré du monde pour lâcher des refrains épiques, est forcément un avantage, tandis que la pléthore de rappeurs présents sur le reste du morceau donne l'impression de s'amuser sur une production de grande qualité. L'ambiance devient presque jazzy avec "True Lies", un titre qui force la réécoute, nous emmenant dans le style classieux du rappeur.

Même si l'on accueillerait volontiers un album où la totalité des productions serait gérée par DR. DRE, il n'en est rien. TIMBALAND donne aussi son coup de patte et cela créé un "Snoop Dogg (What's My Name 2)" rythmé, qui n'hésite pas à jouer la carte de la nostalgie en nous faisant renifler la suite du mythique morceau de Snoop DOGG. Sur "Set It Off", la totalité du casting est badass, passant d'un Nate DOGG qui gère toujours les refrains à un ICE CUBE au sommet de sa forme, sans oublier un MC REN qui nous sort un couplet furieux et KURUPT qui clôt le débat.

Les deux producteurs de renom ont livré leur travail, mais le reste de l'album ne manque pas non plus de bonnes idées. Si un "Back Up Off Me" en featuring avec MASTER P fait office de morceau contractuel et totalement calibré, n'oublions pas l'intensité d'un "Issues" où un rappeur rarement mis en avant pour cela sort sa plus belle plume pour prouver que sur ce terrain-là il n'est pas en reste. Les autres bonnes idées sont l'apparition de EVE dans "Ready 2 Ryde", un featuring pimenté avec SOOPAFLY sur "Losin' Control", la production maîtrisée de Jelly ROLL sur "Wrong Idea", ou encore le morceau le plus g-funk de l'album "Y'all Gone Miss Me", dans lequel SNOOP DOGG et KOKANE rappellent judicieusement qu'ils n'oublient pas les copains partis trop tôt.

Etant donné que le label No Limits Records a les droits sur cet album, on aurait logiquement pu s'attendre à un autre échec du rappeur totalement contrôlé par cette maison de disques. Il n'en est rien. SNOOP DOGG veut partir la tête haute, qu'on se souvienne qu'il est fort. Tha Last Meal est une pièce essentielle à la carrière du rappeur, nous prouvant ses qualités d'écriture et de production. Considéré par certains puristes comme un classique, son impact dans les médias fut immédiat. Aujourd'hui encore, il n'est pas rare de retourner vers cet album truffé de bonnes idées, au même titre qu'un Doggystyle, moins impactant mais tout aussi intéressant.