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- Style : Helen Merrill

Peggy LEE - The Beauty And The Beat (1959)
Par LE KINGBEE le 11 Mai 2020          Consultée 787 fois

Si 1959 reste musicalement marqué par le crash aérien dont furent victimes Buddy HOLLY, Ritchie VALENS et le Big BOPPER en février, c’est une belle année pour Peggy LEE. La chanteuse est presque sur le toit du monde. Sa reprise de « Fever » lui vaut le statut de star et Peggy peut surfer là-dessus, de toute façon elle n’a plus rien à prouver. Son divorce avec l’acteur Dewey Martin (son troisième mari) s’est passé sans encombre et elle peut chanter sans contrainte auprès de sa nouvelle maison de disques.

Les 29 et 30 mai Peggy participe à Miami à une Convention de disc-jockey. Capitol a prévu d’enregistrer sa chanteuse en Live, l’occasion peut se prêter à faire un bon disque d’autant plus que le public sera en grosse partie issu de gens du métier. Contrairement aux notes de la pochette dorsale, Peggy a bien chanté le 29 mai et a semble-t-il remporter l’adhésion d’un public de connaisseurs, à tel point qu’elle remettra le couvert le lendemain. De ces deux soirées, il y avait assurément de quoi publier un bon disque de Jazz en public, sauf qu’à leur retour, Peggy et le pianiste George SHEARING découvrent que les bandes-son des deux soirées ne sont pas exploitables à leur grand désappointement, à cause d’un problème technique.

Capitol qui a déjà planché sur une pochette ne démord pas une seconde que l’idée était pourtant bonne, de plus le label s’est engagé à envoyer un exemplaire à chaque disc-jockey et responsable radio présents lors de ces deux soirées. Producteur chevronné, Dave Cavanaugh décide d’envoyer en studio à Los Angeles le même groupe pour réenregistrer dans des conditions quasi similaires, persuadé que tout le monde n’y verra que du feu. « Big Dave » Cavanaugh a déjà bossé avec Kay STARR, Frank SINATRA, Nat King COLE et n’a pas pour habitude qu’on remette en question ses suggestions. C’est donc un sextet particulièrement bien rôdé qui se rend à Los Angeles pour enregistrer les même titres en studio comme si de rien n’était. Les 12 titres sont enregistrés en une journée, presque tous en une prise. Lors d’une interview en 1992, George SHEARING évoquait le disque et affirmait que tout le gratin de l’industrie du disque était dans la salle lors de ces deux soirées et que Capitol ne pouvait pas ne rien publier, le label aurait été la risée de l’industrie sonore.

Outre le pianiste anglais non voyant George SHREARING, on retrouve le guitariste Toots THIELEMANS ⃰ (ex Zoot Sims, Stan Getz), le vibraphoniste Ray ALEXANDER (ex Dorsey Brothers, Stan Getz, Anita O’Day), le batteur Roy HAYNES (ex Sonny Rollins, Kenny Burrell, Thelonious Monk), le contrebassiste Jimmy BOND ▪ (ex Chet Baker, Jimmy Witherspoon, Nina Simone) et Armando PERAZA aux congas (ex Cal Tjader et futur Santana). Du beau linge !

Ce faux Live s’ouvre tranquillement avec « Do I Love You »°, une compo de Cole Porter que Peggy chantait dans l’orchestre de Benny GOODMAN, un titre calme destiné à prendre la température d’une salle remplie à craquer et à chauffer sa voix. Le groupe écossais AZTEC CAMERA donnera une seconde jeunesse au titre durant les nineties dans un album tribute à Cole Porter. Elle poursuit sur un tempo identique avec « I Lost My Sugar In Salt Lake City », titre du chanteur Johnny MERCER, l’un des fondateurs de la maison d’édition Capitol. Le sextet reste cantonné à une ligne be-bop mené de main de maitre par SHEARING. Une version bien plus chatoyante que celles de MERCER ou Julie LONDON. Le rythme s’accélère avec « If Dreams Come True », une vieille chanson de GOODMAN dans laquelle la guitare et le piano se démarquent enfin d’un axe be-bop trop prononcé, le Swing rentrant ici de plein fouet dans la cadence.
Ballade sentimentale du tandem Carl Sigman/Duke ELLINGTON, « All Too Soon » se révèle un peu trop sage à notre goût, on lui préfère la version de Sarah VAUGHAN plus moelleuse. Il ne fait guère de doute que la track-list de ce concert a été établie de manière à convaincre un public trié sur le volet mais constitué de nombreux amateurs de Jazz. Curieusement, cette ballade assez mollassonne fera l’objet de récentes reprises par Barbara DANE et Stacey KENT. Nous conseillerons pour notre part les instrumentaux de Buddy TATE ou de Ben WEBSTER plus revigorants. Changement de cap avec « Mambo In Miami », un mambo totalement instrumental d’Armando PERAZA qui apporte gaieté et une touche latine bienvenue, Peggy Lee se contentant de quelques sobres pas de danse. Second interlude instrumental avec « Isn’t It Romantic », une pièce de Richard Rodgers popularisée par le duo Jeanette MacDONALD/Maurice CHEVALIER dans les années trente et plus tard par Ella FITZGERALD. On se demande pourquoi Peggy ne vient pas poser sa voix sur cette ballade toujours en vogue, Diana KRALL la reprenant dans une interprétation épurée il y a peu.
Peggy nous délivre une excellente reprise du standard de Joe Bishop « Blue Prelude » ; le vibraphone et les ivoires mettent la chanteuse au diapason, le chant légèrement déluré surpasse les nombreuses versions des futures concurrentes. Peut-être la meilleure interprétation de ce classique avec celle de Linda RONSTADT. « You Came A Long Way From St Louis » a été mis à toutes les sauces (de Donna BROOKS à Chuck BERRY en passant par des duos très discutables : JAN & DEAN, Marvin GAYE/Mary WELLS ou Chubby CHECKER/Dee Dee SHARP. Là le sextet place encore la chanteuse sur de bons rails, Peggy LEE nous offrant un timbre un brin aguicheur qui fait mouche.
Second emprunt à Cole Porter, « Always True To You In My Fashion » a fait les beaux jours de Broadway et fut même au générique du film « Kiss Me Kate » (Embrasse-moi chérie). Le titre repris maintes fois sous des orchestrations surchargées bénéficie ici de la cohésion d’une petite formation ; le vibraphone, la batterie et les congas contribuent à apporter un vent de fraîcheur avec des fragrances latines proches d’un calypso. Retour à une ballade typique au Jazz vocal avec « There’ll Be Another Spring », seule compo de Peggy. Sur un rythme lent et lascif, la chanteuse pose sa voix sur le piano de SHEARING, tandis que contrebasse et batterie se contentent d’un accompagnement minimaliste qui se suffit à lui-même. Le titre servira à la bande-son du film de George Clooney « Good Night And Good Luck » mais avec la version de Dianne REEVES. Le piano permet à « Get Out Of Town », troisième pioche dans le répertoire de Cole Porter, de prendre de l’ampleur, les touches d’ivoires apportant en outre une intensité dramatique remarquablement bien diluée. Le disque s’achève sur le standard de Duke ELLINGTON « Satin Doll » délivré en instrumental, une conclusion qui vaut essentiellement pour le solo de contrebasse alors qu’on aurait apprécié entendre la voix de Peggy Lee. On conseillera aux amateurs de Jazz la version de McCoy TYNER, récemment décédé.

Beauty And The Beat, une variante d’un conte dont les fondations reposent sur la Rédemption, se profile en 1959 comme l’album le plus jazzy de Peggy LEE. George SHEARING et son quintet parviennent à instaurer une ambiance intimiste allant du Be-bop au Swing tandis que Peggy n’a plus qu’à poser sa voix sur des morceaux qui pourront, pour la plupart, se flatter de devenir des standards.

⃰ Il s’agit là du même Baron Jean-Baptiste Fréderic Isidore Thielemans qui allait mettre l’harmonica sur le devant de la scène. Toots est décédé en 2016.
▪ Excellent représentant du Jazz West Coast, Jimmy Bond se prénomme en réalité James.
° Titre homonyme à ceux de Paul Anka et de Phil Spector.

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   LE KINGBEE

 
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- Peggy Lee (chant)
- George Shearing (piano)
- Toots Thielemans (guitare)
- Jimmy Bond (contrebasse)
- Roy Haynes (batterie)
- Ray Alexander (vibraphone)
- Armando Peraza (conga)


1. Do I Love You?
2. I Lost My Sugar In Salt Lake City
3. If Dreams Come True
4. All Too Soon
5. Mambo In Miami
6. Isn't It Romantic?
7. Blue Prelude
8. You Came A Long Way From St. Louis
9. Always True To You In My Fashion
10. There'll Be Another Spring
11. Get Out Of Town
12. Satin Doll



             



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