Recherche avancée       Liste groupes



      
VARIÉTÉ INTERNATIONALE  |  STUDIO

L' auteur
Acheter Cet Album
 


 

- Style : Helen Merrill

Peggy LEE - I'm A Woman (1963)
Par LE KINGBEE le 3 Mai 2023          Consultée 358 fois

Nous sommes en 1963 et la firme Decca décide de publier un nouvel album de Peggy LEE, sa plus grosse vedette, une vraie poule aux œufs d’or. Le procédé a de quoi étonner mais va encore s’avérer payant pour Capitol. Alors que la firme vient d’éditer l’album Mink Jazz, Capitol s’aperçoit que la chanteuse n’a pas sorti cette année la moindre chanson de Noël, événement qui rapporte souvent gros aux States.
Qu’à cela ne tienne, le producteur 'Big' Dave Cavanaugh qui dispose d’une pléthore d’enregistrements peut rattraper le coup sans coup férir alors que Mink Jazz est tout juste dans les bacs. Pour Decca, il s’agit de revenir sur ses investissements, décembre étant une période propice à la vente.

Cet album provient de quatre sessions enregistrées les 2-3-4 et 5 janvier 1963 dans les studios Capitol d’Hollywood, sur North Vine Street. Parmi les douze pistes gravées, seules "Try A Little Tenderness" et "Jealous", un duo avec Bobby Darin, ne sont pas retenues. Afin de compléter l’album et de rester dans le format traditionnel des 12 pistes, Cavanaugh incorpore "I’ll Get By" enregistré le 29 mars 62. Mais dans l’esprit du producteur, faute de chanson de Noël, l’album doit reposer sur "I’m A Woman", une compo des prolifiques Jerry Leiber/Mike Stoller. Le single sorti en décembre fait un carton dans les magasins de disques et sur les radios, pour Cavanaugh il faut capitaliser l’album grâce au succès du single.
Si Peggy LEE reprenait le morceau lors de certains concerts, on apprend plus tard que ce sont les auteurs qui proposèrent leur chanson à Cavanaugh. Le titre avait déjà fait l’objet d’un premier single par l’intermédiaire de Christine KITTRELL pour le label de Chicago Vee-Jay Records, un 45-tours qui ne bénéficia que d’une minuscule promotion. Leiber et Stoller qui n’avaient pas reçu la moindre royalty jugèrent préférable de se déplacer lors d’un show de la chanteuse ; surpris par le tempo, les arrangements et la tonalité du morceau interprété sur scène, les deux auteurs proposèrent leur collaboration à Peggy LEE qui leur donna une fin de non-recevoir. Quant aux versements, Peggy leur aurait répondu de se mettre en contact avec Cavanaugh et Capitol, les deux faisant la sourde oreille pendant de longs mois, prenant ainsi comme souvent les auteurs pour un couple de faisans. Quoiqu’il en soit, l’album porté par sa chanson phare permit à Peggy LEE de décrocher un Grammy en mai, alors qu’elle était nominée pour la cinquième fois consécutive à l’image de sa consœur Ella FITZGERALD.
Peggy LEE délivre ici une interprétation attrayante et groovy, peut-être l’une des meilleures avec celles de Kittrell et Reba McEntire dans une version Americana lorgnant sur Tony Joe WHITE. Chez nous, l’actrice chanteuse Maria Vincent, ex-petite amie de Francis le Belge, personnage bien connu du milieu, reprit le morceau avec "Je suis une femme".
Comme souvent chez Peggy LEE, le répertoire propose un vaste panel auquel s’annexent hits du moment et inusités passe-partout généralement nappés d’une sauce Jazzy. "The Alley Cat Song", une compo du danois Bent Fabric enregistrée initialement en Scandinavie sous l’intitulé "Omkring et Frygel" ouvre les débats. Le titre connaît moult versions instrumentales, formule très tendance de l’époque, par l’entremise de Grady MARTIN, Chet Atkins ou Bill Justis. Le titre avait préalablement été adapté en français par l’actrice Corinne Marchand avec "Un homme".

Dave Cavanaugh et les différents arrangeurs prennent soin de diversifier les tempos. Parmi les pistes lentes, on retiend "Mama’s Gone, Goodbye", un vieux Blues des années 20 popularisé par Sippie Wallace. La contrebasse de Max Bennett imprime un groove moelleux tandis que la guitare de John Pisano (futur membre des Tijuana Brass) se livre à un subtil duel avec le piano de Mike Melvoin. Autre petite douceur avec "Come Rain Or Come Shine", titre d’après-guerre de Johnny Mercer repris depuis par toute une faune de crooneuses et crooners. Si le titre usé jusqu’à la corde (on compte plus de 710 reprises) a fait son temps, il connaît une seconde jeunesse via le duo BB KING/CLAPTON et son apparition au générique du film Judy. Autre câlinerie issue de la même époque, "You’re Nobody Till Somebody Loves You" popularisée par Russ Morgan et Nat King Cole fait l’objet de nombreuses covers. Mais si Peggy LEE propose une version lente et jazzy pleine de délicatesse, elle n’a comme tant d’autres pas l’allant de celle de Dean MARTIN qui transforma complètement la chanson via l’orchestration de Nelson Riddle. On remonte dans la machine à explorer le temps avec "I’ll Get By (As Long As I Have You", titre des années 20 repris depuis par Billie HOLIDAY, The Platters et Shirley Bassey. Si le titre s’incorpore parfaitement à l’ensemble, la section cuivre se démarque des autres pistes.

Afin que l’auditeur ne tombe pas dans un demi-sommeil, Peggy LEE monte en cadence avec "I’m Walkin’", hit de Fats DOMINO repris à toutes les sauces. Là, le jeu de guitare d’Al Hendrickson (ancien sideman d’Anita O’DAY et Benny Goodman) prend de l’ampleur. Peggy LEE reprend également plusieurs standards : "Mack The Knife", compo de Bertolt Brecht et Kurt Weill figurant au générique de la comédie musicale Die Dreigroschenoper (L’Opéra de quat’sous) devenu au fil du temps un standard du Jazz américain. Repris par une kyrielle d’interprètes, le titre demeure toujours actif, les PUPPINI SISTERS (qui ne le sont pas) l’ayant récemment mis dans leur besace. Autre ballade ayant trusté les charts du début sixties, "I Left My Heart In San Francisco" reste comme la marque de fabrique du crooner Tony Bennett, chanteur que j’ai toujours trouvé peu captivant et pour tout dire super barbant. Peggy LEE nous délivre une version correcte avec incorporation d’une flûte et d’une guitare au phrasé légèrement exotique. Autre petit moment bien moelleux avec "Taste Of Honey". La chanson interprétée par Billy Dee Williams à la fois en version chantée et instrumentale figurait au générique du film anglais A Taste Of Honey de Tony Richardson avec Rita Tushingham. La chanson, à l’instar du film qui abordait les thématiques d’une relation amoureuse interraciale et l’homosexualité, deux sujets peu en vogue au pays de la Reine Elizabeth, ne connaît dans un premier temps aucun succès avant que les BEATLES ne l’incorporent dans leur premier opus ; curieusement la chanson génère un fort engouement suite à la version instrumentale du trompettiste Herb Alpert et de ses Tijuana Brass. Chez nous autres, le morceau se voit adapté par Nana MOUSKOURI avec "Un homme est venu", tandis que DALIDA, toujours opportuniste en délivre une seconde adaptation avec "Je crois mon cœur". Les paroles ne sont pas restées dans les annales avec cette histoire de butinage, et on ne peut s’empêcher de penser que les malentendants ont parfois de la chance.

Afin d’apporter une touche de gaité et de couleurs, deux titres tendance Bossa Samba viennent agrémenter le recueil : "There Ain't No Sweet Man That's Worth The Salt Of My Tears", un titre atrocement long pour une chanson ne dépassant pas les 98 secondes. Pour parachever son disque, LEE reprend "One Note Samba", la version américaine du standard de Jobim "Samba De Uma Nota Só". Avouons qu’on a entendu bien pire, à commencer par les essais de Nancy Wilson ou Cliff Richard, même Sacha Distel et Jean-Claude Pascal faisaient mieux.

Si quelques-unes des pistes s’avèrent aujourd’hui dispensables, cette galette portée par le succès du single "I’m A Woman" pourrait résumer à elle seule le parcours de Peggy LEE chez Capitol. Si l’album a atteint des ventes inespérées lors de sa sortie et s’il paraît évident que Capitol misait sur sa meilleure vendeuse, l’orchestration soulève quelques interrogations. C’est la première fois, hormis certains disques en Live de forme Jazz Quartet, que la chanteuse se retrouve avec un parterre d’accompagnateurs si peu fourni.
Autre bémol, si plusieurs arrangeurs interviennent au gré des pistes (Dick Hazard, Neal Hefti, Benny Carter) aucun d’eux ne se démarque véritablement et les douze reprises convergent toutes vers une combinaison de Jazz Vocal et de Variété Internationale comme l’industrie du disque américaine se plaisait à en sortir par wagon. Un disque n'a jamais été réédité au format CD.

A lire aussi en VARIÉTÉ INTERNATIONALE :


I MUVRINI
Au Zénith (1994)
Rare et précieux




Don JOHNSON
Let It Roll (1989)
Miami voice


Marquez et partagez





 
   LE KINGBEE

 
  N/A



- Peggy Lee (chant)
- Al Hendrickson (guitare)
- John Pisano (guitare 1-2-3-4-5-6-7-8-10-11-12)
- Herb Ellis (guitare 9)
- Max Bennett (basse, contrebasse)
- Stan Levey (batterie, percussions 1-2-3-4-5-6-7-8-10-11-12)
- Mel Lewis (batterie 9)
- Francisco Aguabello (percussions 4-7)
- Mike Melvoin (piano 1-2-3-4-5-6-7-8-10-11-12)
- Lou Levy (piano 9)
- Justin Gordon (saxophone 1-2-3-5-8-10-11-12)
- Harry Klee (saxophone, flute 6)
- Gene Quill (saxophone 6)
- Manny Klein (trompette 1-2-3-4-5-7-8-10-11-12)
- Jack Sheldon (trompette 9)
- Dave Wells (trombone )


1. The Alley Cat Song
2. Mama's Gone, Goodbye
3. I'm Walkin'
4. Come Rain Or Come Shine
5. There Ain't No Sweet Man That's Worth The Salt Of
6. I'm A Woman
7. Mack The Knife (from Threepenny Opera)
8. You're Nobody Till Somebody Loves You
9. I'll Get By
10. I Left My Heart In San Francisco
11. A Taste Of Honey
12. One Note Samba



             



1999 - 2024 © Nightfall.fr V5.0_Slider - Comment Soutenir Nightfall ? - Nous contacter - Webdesign : Inox Prod