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- Style : Helen Merrill

Peggy LEE - Latin Ala Lee (1960)
Par LE KINGBEE le 10 Juin 2020          Consultée 811 fois

Après avoir sorti dans la douleur un faux Live, Capitol Records réexpédie sa vedette en studio. Peggy LEE a participé à quelques concerts et a donné deux galas de charité sous l’œil bienveillant de Capitol, mais ce n’est pas ça qui fait rentrer de l’argent. Peggy retourne à Hollywood pour enregistrer un nouvel album. Les sessions se déroulent dans les studios du Capitol Tower les 12, 13 et 14 août 59.

Cette fois on confie la chanteuse à une nouvelle équipe dirigée par Jack Marshall, l’arrangeur connait parfaitement la chanteuse, ils ont collaboré ensemble lors de l’album "Things Are Swingin’". Marshall est un arrangeur chef d’orchestre attentionné, il récupère une nouvelle troupe dans laquelle figurent d’anciens sidemen de la chanteuse : les saxophonistes Wilbur SCHWARTZ (ex Anita O DAY, Eartha KITT) et Harry KLEE (ex Mel TORME, Eartha KITT) les guitaristes Bobby GIBBONS, Howard ROBERTS et Bill PITTMAN.

Nous sommes en août 1959, depuis trois ans, de nombreuses formations de Jazz mettent en place des rythmiques latines dans leur orchestration. C’est la mode ! De multiples influences latines vont donc se dessiner avec deux cercles de différentes colorations : d’un côté le Jazz Afro-cubain s’inspirant du mambo et du cha-cha-cha cubains, de la salsa et du merengue dominicain. De l’autre côté, le Latin jazz regroupe diverses fragrances issues du Brésil comme la samba et son dérivé la bossa nova. Les émergences d’instrumentistes brésiliens tels João GILBERTO ou Carlos JOBIM ne seront pas étrangères à cet engouement. Ces influences exotiques n’étaient certes pas nouvelles, dès la fin des forties, Charlie PARKER et Dizzy GILLESPIE associaient ces différents courants à leur Bebop, le registre prenant alors le nom de Cubop, précurseur en quelque sorte du Latin Jazz.

Nous sommes donc en plein été 1959, les américains viennent d’envoyer le satellite Explorer VI dans l’espace ; la Russie lui répond aussitôt en expédiant Luna 2, une sonde qui se scratche sur la lune. Musicalement, les ricains viennent de créer les Grammy Awards, Ella FITZGERALD et Count BASIE remportent deux trophées dans les catégories Jazz. L’année a vu l’apparition de plusieurs albums qui feront date, alors que les labels spécialisés Blue Note, Riverside, Prestige, Verve et les majors Columbia ou Mercury se taillent les plus grosse parts du gâteau. Pour Capitol, si Dean Martin, Tennessee Ernie FORD ou Elmer BERNSTEIN sont toujours de bonnes valeurs marchandes, la firme compte beaucoup sur Peggy.

Dans l’esprit du producteur Dave Cavanaugh, futur président de la firme, il est temps d’apporter un peu de soleil et un brin d’exotisme au répertoire de Peggy LEE. Big Dave qui vient de remporter un Award en produisant "Come Dance With Me" de Frank SINATRA, n’entend pas en rester là. Le GEORGE SHEARING QUINTET qui accompagnait la chanteuse dans l’album précédent vient d’ouvrir la voie avec "Latin Affair", album gorgé d’ingrédients latino. Il n’y a aucune raison pour que Peggy ne puisse adapter à ce nouveau concept.

Enregistré donc en trois jours avec quelques remaniements de personnels, Latin Ala Lee propose un premier regard très hispanique. Capitol n’ayant jamais été très doué pour la qualité de ses pochettes a cru bien faire en entourant Peggy au milieu de deux matadors d’opérette. On pourra aujourd'hui sourire sur la présence de ces deux olibrius, peut être s’agissait-il dans l’esprit de Capitol de booster ses ventes européennes avec la présence de symboles dédiés à la corrida.

En ouverture, Peggy reprend "Heart", titre ayant servi au générique de Damn Yankee, une comédie musicale de Broadway reprenant le thème de la damnation de Faust dans le milieu du baseball. Le titre repris par le crooner Tony BENNETT et Jane MORGAN a connu un petit succès, mais l’orchestration agrémentée d’une solide troupe de percussionnistes parmi lesquels le colombien Carlos MEJIA qu’on retrouvera bientôt avec le saxophoniste Buddy COLETTE offre de bonnes étincelles. Ajoutez- y le sax de Justin GORDON et quatre trompettes emmenées par Rudolf Loera (on le retrouvera sur deux albums d’Elvis) et vous avez une idée de l’ambiance festive. Le rythme s’adoucit sous la forme d’un moderato tiré de la comédie My Fair Lady avec "On The Street Where You Live". Si le titre connaîtra quatre ans plus tard une seconde jeunesse par le biais du film de George Cukor, l’apport de percussions et la parfaite diction de Peggy LEE permettent au titre de se démarquer de nombreuses versions. Peut être l’une des meilleures interprétations avec Doris DAY et l’inamovible Dean MARTIN. Chez nous, certains se risqueront à l’exercice ardu de l’adaptation, mais Annie CORDY, Gloria LASSO, George GUETARY ou Tino ROSSI ne provoqueront pas de sentiment similaire par rapport à Peggy.

Troisième chanson et troisième emprunt à Broadway avec "Till There Was You", titre issu de la comédie The Music Man" de Meredith Wilson. Si le morceau a été mise à toutes les sauces, c’est probablement la version des BEATLES dont on se rappelle le plus aujourd'hui. La voix douce de Peggy parvient à se faufiler entre les cordes, les saxophones tandis que les bongos imposent un rythme de sénateur aussi agréable que délicat. Un titre toujours tendance, Al DI MEOLA reprenait la chanson dans son dernier opus dédié aux Fab Four. Nous arrivons au tiers du disque et c’est encore une chanson issue d’une comédie musicale que reprend la chanteuse avec "I Am In Love" une compo du prolifique Cole Porter. Pièce moins connue en Europe, « Can Can » contait les péripéties d’une troupe de danseuses dans le Montmartre des années folles. Si Ella FITZGERALD reprenait la chanson avec moult violonades, les percussions apportent ici un air de samba tandis qu’une flûte s’immisce parmi une section cuivre pleine de maitrise. Le disque poursuit sa roue avec une cinquième visite à Broadway avec "Hey There", titre issu de The Pajama Game, comédie qui nous racontait les tractations de salariés d’une fabrique de pyjama pour une modique augmentation. Sous couvert de sordides négociations, la naissance d’une idylle entre Babe une représentante syndicale et le nouveau directeur se faisait jour. Si Doris DAY en a laissé une interprétation intimiste dans l’adaptation hollywoodienne, Peggy LEE apporte rythme et fantaisie, les percussions et un doux nappage cuivré sont encore bien utilisé. Chez nous, PATACHOU en délivrera l’excellent "Eh Ben !", massacré quelques mois plus tard par DALIDA. Dernière piste de la face A avec un sixième titre tiré encore une fois de My Fair Lady. Titre phare de la célèbre comédie "I Could Have Danced All Night" restait jusqu'alors marqué par l’interprétation de Julie ANDREWS. Les trompettes, les saxophones et les bongos contribuent ici à apporter un vent de fraîcheur. Peut être l’une des reprises les plus vivifiantes avec celle de Damita JO. Si le titre a fait l’objet de nombreuses versions instrumentales, on déconseillera la tentative vocale de Jamie CULLUM.

Si vous avez parié que la face B allait s’ouvrir avec une chanson sortant du contexte Broadway vous avez perdu. Titre principal de Oklahoma ! une pièce d’Oscar Hammerstein créée pendant la Seconde Guerre, "The Surrey With The Fringe On Top" a connu un bain de jouvence en figurant dans l’adaptation hollywoodienne réalisée par Fred Zinnemann. Encore une fois Peggy apporte souplesse et fraîcheur bien secondé par l’orchestre. Le tempo se ralentit fortement avec "The Party’s Over", une ballade mélancolique tirée de la comédie "Bells Are Ringing" popularisée par Judy HOLLIDAY. Les versions de Dakota STATON ou Esther PHILLIPS nous paraissent moins tristes et plus consistantes. Créateurs du titre précédent, Betty Comden et Adolph Green sont aussi les concepteurs de Say Darling autre pièce de Broadway délivré ici sous forme d’un cha-cha-cha extra lent. Le rythme s’alanguit encore avec "Wish You Were Here", tiré de la comédie du même nom. Si Eddie FISHER était miraculeusement parvenu à faire grimper la chanson sur la 1ère marche des charts, avouons que Peggy LEE et son orchestre apportent un coup de fraîcheur bienvenu. Second emprunt à la comédie Can-Can, "C’est Magnifique" connaîtra de multiples reprises. Si Dean MARTIN et Frank SINATRA en laisseront un bon souvenir en Amérique, chez nous autres, Lucienne DELYLE, Luis MARIANO, Dario MORENO et Vicki BENET passeront le titre à la postérité. Peggy délivre ici un intemporel plein d’allant et de naturel. Une version qui fait oublier les atroces covers d’Arielle DOMBASLE, d’Amanda LEAR ou de Benjamin BIOLAY. Dernière intrusion dans le monde de Broadway avec "I Enjoy Being A Girl" issu de Flower Drum Song qui donnera lieu au film du même nom avec Nancy Kwan. Là Peggy LEE et les musiciens transpose le quartier de Chinatown de San Francisco en une visite au cœur du Carnaval de Rio où les sambas font rage.

Si la pochette peut s’avérer trompeuse avec ses deux picadors de pacotille, le répertoire prend sa source au cœur de grandes comédies musicale made in Broadway et bénéficie d’une orchestration exotique qui apporte fraîcheur et gaieté. Comme bien souvent, Peggy LEE demeure égale à elle-même excellente du début à la fin et prouve que son chant peut se poser sur des rythmes latins plus festifs que son registre habituel. Note réelle 3,5.

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- Peggy Lee (chant)
- Bill Pitman (guitare)
- Bobby Gibbons (guitare)
- Tony Rizzi (guitare)
- Howard Roberts (guitare)
- Tommy Tedesco (guitare 3-5-9-11)
- Arthur C. Smith (basse)
- Tony Reyes (batterie)
- Eddie Cano (piano)
- Justin Gordon (saxophone 1-2-4-6-7-8-10-12)
- Jules Kinsler (saxophone 2-3-5-6-8-9-11-12)
- Harry Klee (saxophone 2-3-5-6-8-9-11-12)
- Wilbur Schwartz (saxophone 3-5-9-11)
- Alfonso Rojo (trompette 1-2-4-6-7-8-10-12)
- Rudolf Loera (trompette 1-2-4-6-7-8-10-12)
- Henry Miranda (trompette 1-2-4-6-7-8-10-12)
- Eduardo Aparicia (percussions)
- Carlos Mejia (percussions)
- Manny Lopez (percussions)
- Ramon Rivera (percussions)
- Luis Kant (congas 1-4-7-10)
- Ray Vasquez (trompette 1-4-7-10)


1. Heart
2. On The Street Where You Live
3. Till There Was You
4. I Am In Love
5. Hey There
6. I Could Have Danced All Night
7. The Surrey With The Fringe On Top
8. The Party's Over
9. Dance Only With Me
10. Wish You Were Here
11. C'est Magnifique
12. I Enjoy Being A Girl



             



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