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Aretha FRANKLIN - Sings The Great Diva Classics (2014)
Par LE KINGBEE le 5 Janvier 2023          Consultée 778 fois

Cet album constitué uniquement de reprises, comme l’annonce son titre, reste le dernier disque enregistré par Lady Soul de son vivant. Il nous semble évident qu’Aretha FRANKLIN n’avait plus grand-chose à prouver en 2014, la Diva ayant plus ou moins traversé les deux dernières décennies comme un fantôme.
Dès les premières écoutes, on se dit qu’elle a voulu se faire un petit plaisir à 72 printemps en réajustant son répertoire à travers dix covers de chanteuses issues de plusieurs mouvances. Elle retrouve pour l’occasion Clive Davis, cofondateur du label Arista et grand manitou de BMG, celui qui l’avait sorti du marasme dans lequel la chanteuse s’était engluée à la fin des années 70.

En dehors d’une pochette à l’esthétisme douteux, c’est la qualité de l’orchestration et des arrangements qui frappe d’entrée les esprits. L’idée de départ (reprendre des titres de certaines collègues) ne frisait déjà pas l’originalité, mais on pouvait croire qu’Aretha pouvait s’en sortir sans encombre par un tour de passe-passe dont elle a le secret. La réalité s’annonce beaucoup plus abrupte et cruelle pour la Queen of Soul, celle-ci délivre ici un album si indigeste qu’on se demande ce qu’elle est venue faire dans une telle galère.

En guise de mise en bouche, la reprise de "At Last", une compo de Glenn Miller figurant au générique du film Orchestra Wives ('Ce que femme veut'), un nanar musical d’Archie Mayo, pouvait lancer le disque sur de bons rails. Hélas, si les premières secondes maintiennent l’illusion, la production de Kenny 'Babyface' Edmonds n’est pas du tout à la hauteur. Alors qu’il suffisait de faire appel à un orchestre basique du genre octet, éventuellement renforcé d’une section de cordes et cuivres, on privilégie ici le gain financier et le mauvais goût en privilégiant l’auto-tune, système censé corrigé les imperfections vocales et de fréquences et les boîtes à rythmes. Si la version d’Etta JAMES nous paraît toujours aussi inabordable par son excellence, l’interprétation d’Aretha se situe même un ton au-dessous des nombreuses reprises (Brenda LEE, Baby WASHINGTON, Joan OSBORNE ou Leela James). Et, comble de la sévérité, on vient d’entendre l’une des meilleures plages du disque.

Suite à cette entrée en matière casse-gueule, le répertoire oscille dangereusement entre deux reprises de tubes issus de la nouvelle génération et hits d’antan. Aretha parvient à tirer les marrons du feu sur "Rolling In The Deep", tube interplanétaire de l’anglaise ADELE. Si on peut lui reprocher de pousser inutilement sur sa voix, l’orchestration trop synthétique et des chœurs intempestifs nuisent à l’interprétation. Aretha a probablement été inspirée par la noirceur des paroles de ce Dark Gospel. "No One", tube d’Alicia KEYS, s’éloigne nettement de sa coloration d’origine ; la production d’Harvey Mason et Damon Thomas, deux nullités officiant dans le monde du R&B contemporain sous le nom des Underdogs, nous expédie au cœur des Caraïbes, à une portée de fusil de la Jamaïque. On a le sentiment d’entendre du sous Jimmy Cliff ou du Gilbert Montagné, sans méchanceté aucune, du Reggae de pacotille.

Au chapitre des chansons du siècle dernier, on retrouve "People", de Barbra STREISAND. Si l’original figurait dans la bande-son de la comédie musicale Funny Girl puis dans le film du même nom, la mélodie demeure désespérément larmoyante et hyper barbante, même le jeu de piano embourbé dans les différents logiciels de programmation (batterie, synthés) finit par nous endormir. Une interprétation du niveau de celle de Mireille Mathieu, preuve d’une orchestration balbutiante.
Excellente ballade de Jimmy Weatherly prenant sa source dans le domaine du Country Folk, "Midnight Train To Georgia"* fut popularisée par Gladys Knight & The Pips grâce à une énorme campagne de promotion de la Motown. Aretha ne s’en sort pas trop mal, on regrette simplement la surenchère des chœurs et des arrangements de seconde zone, mais il en est de même tout le long de l’album.
Ancien succès de Gloria Gaynor en pleine ère Disco, "I Will Survive" connaît une seconde jeunesse via les Hollandais du Hermes House Band. Là, l’orchestration numérique et le synthétisme agressent nos oreilles tandis qu’Aretha se lance dans d’improbables logorrhées pleines de poudre aux yeux. Au milieu du morceau, Aretha et son orchestre de plastoc s’offrent une coupure influencée par le "Survivor" des Destiny’s Child. On lui préfèrerait presque l’adaptation française 'Je survivrai' chantée par feu Régine.
Enregistré la même année que le tube de Gloria Gaynor, "I’m Every Woman" reste l’un des titres porte-drapeaux de Chaka KHAN. Les similitudes ne s’arrêtent pas là, en 1992 Whitney HOUSTON lui redonna une seconde vie via le film Bodygard dans une interprétation, selon nous, grandiloquente. La faiblesse des arrangements et l’orchestration d’Eric Kupper (un organiste producteur qu’on retrouve derrière CHER, SHAKIRA ou Brandy) plonge le morceau dans un magma de Disco et de Nu Soul, impression renforcée par la présence de "Respect" en guise de medley.
Changement de cap avec "Teach Me Tonight", une ballade Jazzy enregistrée par Janet Brace mais popularisée par Dinah Washington au milieu des fifties. Si on entend par moment le bruit de discrètes balayettes en guise de percussions et si une contrebasse semble faire la nique aux boîtes à rythmes, avouons que l’interprétation reste aussi sage que classique. On reconnaît dès les premières notes le "You Keep Me Hangin’ On", hit sixties des SUPREMES de Diana ROSS, mais on se demande pourquoi la fine équipe des Underdogs a immergé le morceau dans une parodie digne des plus mauvais House Bands. On est en droit de se demander si le meilleur titre n’est pas le titre de clôture "Nothing Compares 2 U", chanson posthume de PRINCE popularisée par Sinead O’CONNOR. Sous la houlette du producteur André 3000, Aretha FRANKLIN s’immerge dans une interprétation Jazzy moins synthétique et plus aventureuse dans laquelle elle est plus à l’aise, s’éloignant ainsi de la tristesse de la chanson de rupture chantée par l’Irlandaise.

Au moment de faire les comptes, l’addition se révèle brutale. Miné par une orchestration synthétique et balourde, une production passe-partout caractéristique des tendances du moment (Maria CAREY, ANASTACIA, Ariana GRANDE ou Mary J. Blige)**, d’arrangements bourrés d’esbroufe sonnant faux du début à la fin, de vocalises tournant parfois à la caricature et par un manque total d’originalité, ce dernier disque de Lady Soul demeure hélas fortement déconseillé.

*Le titre de Jim Weatherly était "Midnight Train To Houston".
**Ce ne sont que des exemples, nul doute qu’on puisse trouver pire.

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   LE KINGBEE

 
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- Aretha Franklin (chant)
- Kenny 'babyface' Edmonds (programmation batterie et synthé)
- Antonio Dixon (programmation batterie et synthé)
- Tawatha Agee (chœurs)
- Latrelle Simmons (chœurs)
- Cissy Houston (chœurs)
- Brenda White-king (chœurs)
- Fonzi Thornton (chœurs)


1. At Last
2. Rolling In The Deep (the Aretha Version)
3. Midnight Train To Georgia
4. I Will Survive (the Aretha Version)
5. People
6. No One
7. I'm Every Woman/respect
8. Teach Me Tonight
9. You Keep Me Hangin' On
10. Nothing Compares 2 U



             



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