J’ai laissé passer quelque temps salutaire. Afin d’infuser cette dangereuse toxine.

Le jour J, sur le chemin du retour, sous un ciel plombé qui semblait lui seoir parfaitement, je songeais. D.M fait-il bien de poursuivre, envers et contre tout ? La même interrogation ne quittait pas mon esprit, alors que mes mains tremblaient quelque peu au moment de placer la plaque dans son écrin transitoire.

La mort d’Andrew Fletcher, évidemment, que je nomme peut-être lapidairement le DRH de DEPECHE MODE, Bradfloyd a toutefois parfaitement décrit son rôle précis au cœur du groupe. Une faucheuse omniprésente dans le champ lexical ou les photos proposées, dont une est même prise près d’un corbillard. Autant de clichés en couleur comme en noir et blanc, et pourtant.

Memento Mori dépeint un monde minimal, austère, froid et inhospitalier, presque l’espace intersidéral en fait, une évidence dès l’étouffante ouverture "The Cosmos Is Mine" convoquant l’hologramme de PLASTIKMAN derrière les platines.

Le manque d’oxygène devient franchement criant sur les nappes oppressantes striant "Speak to Me", diagonale géométriquement opposée au titre éponyme créé par PINK FLOYD il y a cinquante ans. Source de désespoir mais aussi déclaration de disponibilité et fidélité, notre cœur s’y arrête progressivement avec confiance, une fois l’ultime rixe passée.

Memento Mori n’est sans doute pas un chef-d’œuvre mais c’est un bon disque, nécessaire comme doit l’être le deuil. À ranger non loin d’autres travaux en noir, odes aux aimés disparus : Skeleton Tree signé Nick CAVE & THE BAD SEEDS ou Soundtracks for The Blind composé par les SWANS.