Tout vient à point. Roch VOISINE sortant tout juste d'un album-compil fort bien fait, on aurait pu croire qu'il retournerait vers son train-train à base de ballades très mièvres et de titres plus électro ou pop-folk mais sans génie. Malgré une formule qui semble intacte et une pochette n'incitant pas à l'optimisme, sans parler du titre, "Sauf si l'amour..." se montre une excellente surprise, et son meilleur album depuis Kissing Rain (auquel il emprunte d'ailleurs une reprise en français de "With These Eyes" !).

Pourtant tout y est : la voix suave, les paroles gentilles mais un poil faciles, les guitares lancinantes, les mid-tempo à foison et les synthétiseurs modernes mais un peu effacés qui font l'apanage de ses albums anglais, les francophones étant plus basés sur les guitares acoustiques. Certes, cet album ne révolutionne pas son monde. Roch ne se met pas au thrash, ni au rap, ni à l'opéra-bouffe, ni au prog (quoique). C'est dans l'équilibre des ingrédients que ce disque trouve toute sa saveur. Les chansons pop-rock sont idéalement dynamiques, les ballades correctement dispersées, et surtout, Roch et son équipe savent exactement à quel moment appuyer sur le frein ou l'accélérateur. Mieux, ils mettent savamment leurs clignotants sur des pré-refrains ou des ponts pleins d'audace et de peps. Bref, ils ont appris à conduire. C'est là qu'on se rappelle que Roch VOISINE n'est pas français.

Ca débute par "Une femme" tout à fait lambda mais au refrain juteux qui reste dans la tête des JOURS durant (vécu). Ca se termine par un "Redonne-moi ta confiance" qui pourrait décevoir sauf qu'il se montre joli, puis duo avec chant féminin, puis bilingue, pour finir l'album de façon impeccable. Entre les deux, il y a quelques baisses de régime, des titres un chouïa mielleux qui méritaient mieux, mais toujours très correctement faits, pas une seule chanson ratée, le côté calibré sauvant souvent les meubles.

Mais vous avez aussi, et c'est la majorité, des refrains épiques voire audacieux, un groupe concerné, un chanteur qui n'a pas perdu un atome de sa superbe (quelques soupçons d'auto-tune mais rien de gênant), et surtout une vraie identité pop-rock plutôt que variétoche de base. "Sauve-moi" : ces petits éléments indus, ces harmonies intrigantes, ce côté drivant, implacable, avec sur le final cette espèce de déraillement ferroviaire de l'harmonie que je trouve carrément génial... Le refrain dreamy, presqu'irréel, d' "Ici ou ailleurs", qui emmène l'auditeur par la main sans qu'on s'en rende compte (du kidnapping de mineur, ni plus ni moins)... Le côté plus purement rock et très bien fait de "Quelque part", qui va juste un petit pas de puce plus loin que sur les albums précédents, pas grand-chose, mais c'est ce dont on avait besoin.

Il ne s'agit "que" de bonne variété aux entournures pop, mais avec un soupçon d'implication en plus qui manquait parfois et qui ici rend l'intégralité de l'album non seulement agréable, mais presque addictif. Les vieux fans n'ont aucune raison de se sentir trahis ("Ne plus aimer" en est une belle preuve), et les curieux qui ont toujours regretté le déséquilibre de "Higher" ou "I'll Always Be There" en auront une version supérieure, améliorée. Jusqu'à "T'aimer vraiment", un véritable petit bijou ! Les harmonies sont superbes, il y a un côté edgy dans le son, c'est pêchu, mélodique, entraînant : que dire ? Sinon que planqué en plein milieu de sa discographie, ce petit disque est peut-être le meilleur album de Roch VOISINE. En tout cas, couplé avec son simili-best-of de grand frère, cela donne un double album idéal pour la bagnole ou la plage, à écouter sans honte aucune. J'savais bien qu'y fallait pervé.. servé... per... continuer !