[Note : bien que publié en 2001 sous la forme d'une compilation d'archives, 12 Hits From Hell doit être considéré rétrospectivement comme le deuxième album des MISFITS, qui aurait du sortir sous cette forme en 1980. La date indiquée ici sert donc d'abord et avant tout de repère chronologique, afin de mieux resituer ces enregistrements dans l'histoire du groupe.]

C'est durant l'été 1980 que les MISFITS s'attellent à un nouveau projet de LP studio. Le line-up des MISFITS continue alors de connaître quelques changements de personnel qui ne seront toutefois pas sans conséquences pour l'avenir. Joey Image (batterie) est alors remplacé par Arthur Googy, et Jerry Only suggère à Glenn Danzig d'auditionner son frère Paul "Doyle" Caiafa, alors roadie du groupe, pour remplacer Bobby Steele à la guitare. Glenn Danzig n'est pas convaincu mais accorde sa chance à Doyle, et lui demande alors d'enregistrer les titres du futur album parallèlement à Bobby Steele. Seules les meilleures des deux prises seront conservées pour chaque titre. Une douzaine de morceaux seront enregistrés lors de ces sessions, dont certains sont de nouvelles versions de titres figurant déjà sur des singles antérieurs.

Toutefois rapidement Glenn Danzig change d'avis et décide d'annuler la sortie du disque, dont le mixage était presque achevé. En lieu et place d'un LP complet, Glenn Danzig éditera alors en avril 1981 un simple EP 3 titres, "3 Hits From Hell", qui sera suivi par le single "Halloween" au mois d'octobre.
Evidemment, d'un point de vue historique, la tripotée de titres ici présents peuvent être davantage considérés comme une démo vaguement mixée que comme un véritable album : un certain nombre de titres issus de ces sessions seront en effet réenregistrés durant l'année 1981 et se retrouveront sur le premier LP officiel des MISFITS, Walk Among Us (1982). Toutefois, il convient bien de considérer ces enregistrements comme formant un tout uniforme, et donc comme un véritable album cohérent. À l'instar de Static Age, l'album avorté de 1978, les sessions de 1980 auraient probablement pu anticiper le succès commercial des MISFITS de quelques mois si elles avaient vu le jour en temps et en heure.

La publication des bandes inédites de Static Age en 1997 relancera l'intérêt du public pour les débuts de la carrière des MISFITS, et c'est donc logiquement qu'un projet de publication des sessions avortées de 1980 voit le jour en 2001 sous la forme d'un disque d'archives, sous le nom "12 Hits From Hell".
Toutefois, ni Glenn Danzig ni Jerry Only - alors en froid depuis le début des années 1990 - ne sembleront approuver la sortie de la chose, et les deux anciens comparses exigeront que toutes les copies de l'album soient détruites. Heureusement, quelques versions promo envoyées à la presse échapperont à la destruction, et il est désormais assez facile d'écouter ces enregistrements sur Internet. Eh oui, vous l'avez compris, cet album n'existe officiellement pas à l'heure où nous parlons ! Néanmoins nous savons très bien que vous êtes des petits malins, vous saurez donc où chercher pour l'écouter, eh eh...

On retrouve donc évidemment ici l'intégralité de l'EP 3 Hits From Hell et les deux versions de la chanson "Halloween". Pour des détails supplémentaires sur ces chansons, vous pouvez vous diriger vers les chroniques concernées. Pour ce qui est du reste, c'est véritablement du tout bon : "Vampira" file des pains supersoniques dans la tronche, "I Turned Into A Martian" tabasse des petits hommes verts avec toute la fougue punk propre aux MISFITS première époque, "Skulls" et ses refrains hypnotiques sont un régal, pendant que les "Astro Zombies" décapitent efficacement du cosmonaute punk. Les deux nouvelles versions de "Night Of The Living Dead" et "Where Eagle Dare" sonnent de façon un peu moins convaincante que la version single de 1979, le son y est plus speed et moins cracra, néanmoins ça fait du bien par où ça passe.
Logiquement, le son plus lisse et amélioré de Walk Among Us déclasse assez largement ces enregistrements de l'été 1980. Mais il n'empêche, l'ensemble était déjà fort convaincant, et peut totalement s'apprécier comme une oeuvre à part entière. Pas parfaite, inaboutie, mais qui aurait mérité un meilleur sort. Rien que pour pouvoir apprécier la glauquissime "London Dungeon" (et sa version alternative ajoutée en fin de tracklist) au sein d'un vaste ensemble cohérent, cet album fantôme vaut assurément le coup qu'on reconsidère sa place dans la discographie des MISFITS.

12 Hits From Hell, c'est donc un nouveau brûlot horror punk, bien noir et bien crasseux comme il se doit. Il est quand même assez fascinant de constater que les deux premiers albums des MISFITS sont tous les deux des cadavres morts-nés qui n'ont été ressuscités que bien après leur décès prématuré. Comme si les aspects gothiques et macabres de l'imagerie du groupe américain se révélaient si puissants qu'ils aient conduit les MISFITS à produire deux albums mort-vivants.

Un savoureux fantôme.

PS : suite à l'annulation de la sortie de 12 Hits From Hell en 2001, Bobby Steele réenregistrera la totalité des chansons de cet album avec son propre groupe, The UNDEAD, et les publiera en 2007 sous le nom "12 Hits From Hell Uncovered".