Bonnie répète souvent tout le plaisir qu’elle a eu à faire cet album au début des eighties. La pochette reflète bien cet état d’esprit, pas de prise de tête, une envie de profiter avec de nouveaux musiciens – son BUMP Band ! - et s’associer aux divers mouvements de revival qui fleurissent ça et là comme celui du rockabilly, on pense à Dave EDMUNDS, aux STRAY CATS, à ROCKPILE. Et l'image de cette bagnole rutilante aux couleurs vives ne trompe pas. Attendez-vous à voir la disparition de toute trace de roots dans la zique de notre Bonnie ! Elle a clairement besoin d’une récréation après des albums trop sérieux dans le giron du producteur Peter ASHER.

Et "Keep This Heart In Mind" met d’emblée les points sur les « i » en ce qui concerne l’orientation musicale de ce nouvel album. Nous avons du rock direct et sans aucune prise de tête, très proche de la pop. La rythmique de guitare est très agréable et la voix de Bonnie toujours aussi aimable. Un solo de sax, c’est quasiment du Huey LEWIS AND THE NEWS avant l’heure du succès ! L’unique single de l’album, malgré son évidente efficacité va stagner aux alentours de la 100eme place du billboard. "Talk To Me" reste dans cette mouvance cuivrée, puis "I Can’t Help Myself" nous renvoie ver un pop rock plus convenu.

La reprise de NRBQ "Me And The Boys", est un rock’n’roll de belle allure, c’est marrant à l’écoute de ce titre, je prend soudainement conscience des ressemblances entre les voix de Bonnie RAITT et de Joan JETT, je ne m’y attendais pas le moins du monde ! Toujours du même groupe, l'éponyme "Green Lights" est sympa mais ne casse pas la moindre brique, rock’n’roll certes, mais à l’image du ROCKPILE de Mr EDMUNDS, c’est mou. La trépidante "Willya Wontcha" est en revanche un tonk’n’roll bien fendard composé par le co-gratteux de Bonnie, Johnny SCHELL, qu’on entend aussi aux backings. La slide est plaisante mais pas sur que le style pratiqué favorise la voix de Bonnie.

La courte "Can’t Get Enough" est une compo de Bonnie ! Ca fait plaisir ! Alors là… un mélange de pop et de rocksteady, une ambiance qui rappelle certaines compositions des SURVIVOR, sonne un peu BO d’ailleurs. La reprise des EQUALS de mon cher Eddy GRANT "Baby Come Back" manque à la fois du coté rocksteady propre à l’origine du morceau ainsi qu’au fun qui lui est associé. La reprise se contente d’une version light un brin rock’n’roll, comme un petit clin d’oeil. On retrouve l’habituel blend de folk et de country sur la composition d’Eric KAZ "River Of Tears", qui pèche un brin par manque de relief. Enfin, Bob DYLAN est comme souvent au centre des propos, et cette fois, c’est "Let’s Keep It Between Us" qui retentit avec son ambiance folk-rock et ses jolies harmonies. Bonnie en fait un hommage remarquable et personnel, le moment de bravoure de cet album.

On a bien saisi l’état d’esprit de Bonnie RAITT pour cet album. Lassée de chasser les tops des charts en édulcorant sa musique, le choix de rockiser l’ensemble s’est fait de manière toute naturelle et il faut admettre que si la qualité n’est pas franchement différente de précédemment, en revanche, Bonnie semble prendre plaisir à jouer tous ses morceaux. Cette démarche est aussi probablement positive pour sa vision de la musique, celle qui lui permettra bientôt de tout déchirer ! En attendant cette heure magique, ce feu vert gagne un trois étoiles très correct.