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MUSIQUE CLASSIQUE  |  B.O FILM/SERIE

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- Membre : Bande Originale De Film

John WILLIAMS - Indiana Jones Et La Derniere Croisade (1989)
Par MARCO STIVELL le 6 Novembre 2022          Consultée 906 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Mon grand-père était un homme sévère, mais de bien. Il arborait une moustache ; dernière fierté de son grand âge que mon père avait tenté de copier quelques années, avant de se dire qu'un bon coup de rasoir général dans la zone bouche-menton tous les jours n'avait rien de folichon, ne serait-ce que par égard pour les efforts féminins comparables (voie dans laquelle je l'ai suivi). Italien d'origine, il avait totalement réussi son intégration et fait vivre humblement sa famille nombreuse, sans même passer par les 'petites affaires communautaires' (mot en cinq lettres qui commence par un 'm' et finit par un 'a'). La langue transalpine n'était parlée que de temps en temps à la maison, pendant les disputes surtout ; il avait adopté la culture française et en vantait les mérites, à l'exception de la musique (rien ne pouvait égaler VERDI ni PAVAROTTI). Livres et films, en revanche...

Autant ma grand-mère, malgré son éternel accent roulant, était du genre à le houspiller et 'aller de l'avant', autant je me sentais plus proche de lui et de sa tendance régulière à raconter son histoire de jeunesse qui était aussi celle du monde alors. La Seconde Guerre Mondiale, Hitler, les Nazis et les camps de concentration, j'en ai eu un récit plus ou moins détaillé bien avant l'école, mais il parlait aussi de sa mobilisation, des manoeuvres et des rencontres entre armées alliées. J'écoutais religieusement, avec tristesse et effroi plus qu'autre chose. Mon père m'avait dit que grand-père s'était fait 'virer' par l'équipe de son tank, le même jour où, un plus loin dans les environs du Monte Cassino, ils se sont tous fait tuer. Il aurait porté un sac de blé pendant plusieurs jours dans le désert, et une fois arrivé dans son village natal des Abruzzes, aurait fait du pain pour tout le monde.

Le mardi soir après l'école, pour offrir à mes parents un peu de liberté, c'était repas et nuit chez les grands-parents, avec film avant le coucher. Un compromis entre leurs goûts et le programme télé : j'ai découvert ainsi Ben-Hur, le Comte de Monte-Cristo, les comédies fortes de Fernandel comme De Funès et autres grands éléments du 7ème art. Mais celui qui me reste le mieux en tête et pour moi illustre le mieux l'homme qu'a été mon grand-père, c'est Indiana Jones et la Dernière Croisade, premier de la saga que j'ai pu voir du coup. La génération de mes 'nonni' était peu en phase avec ce cinéma d'aventure, mais les éléments se raccordaient bizarrement : les Nazis, Hitler aperçu dans une scène, un tank et un décor désertique, un parcours initiatique dans la foi catholique qui était la leur. Et puis, de façon plus personnelle, à 6 ou 7 ans, la séquence du Souffle de Dieu et ses têtes coupées ébranlent la naïveté plus que de raison, présagent des cauchemars par milliers.

Spielberg rempile en 1989 et la troisième aventure d'Indy apparaît pour lui comme l'oasis au cours d'une période de semi-échecs critiques voire commerciaux (L'Empire du Soleil et Always). Son âge d'or paraît passé et il l'est sans doute, mais de nouvelles fulgurances sont à prévoir, étalées sur chaque décennie suivante ! Déjà, du point de vue général, La Dernière Croisade est souvent cité comme le meilleur volet, parfois en concurrence avec les Aventuriers de l'Arche Perdue mais pas tant que cela. Il en est d'ailleurs très proche du point de vue des développement et narration d'abord avec une séquence d'introduction 'classique' pour la saga avec le fondu Paramount sur un pic rocheux, et qui serait coupée du reste sans l'introduction d'un personnage plus important par la suite.

C'est l'occasion pour l'idole des ados d'alors, River Phoenix, grand frère de Joaquin et à la carrière bien plus courte (décédé en 1993), de tenir en premier le rôle du jeune Indiana Jones, avant que George Lucas, charmé par l'ensemble, ne s'en serve pour faire perdurer son héros durant les années 90 à travers une série TV de qualité. Et si, pour le deuxième volet de la saga films, certains avaient critiqué l'orchestre omniprésent, John WILLIAMS s'en donne ici à coeur joie avec une symphonie de près d'un quart d'heure !

"Indy's Very First Adventure" commence dans la brume musicale avec de riches dissonances sous le soleil plombant de l'Utah désertique en 1912. Le tout s'éclaire ensuite à la manière de DISNEY, et les envolées pleine d'innocence enfantine se déploient progressivement, non pas sans s'adapter au mystère et aux décors de caverne pour la recherche du trésor (la croix à pierreries du conquistador Coronado, intonations latino-andalouses et présence de guitare 'sèche' donc). S'ensuit la course-poursuite sur un train de cirque, illustrée comme il se doit, et qui se termine avec la présence de Henry Jones senior, avec la première citation du thème majestueux correspondant, puis celui d'Indy.

Inclure Sean Connery (qui avait d'abord refusé ce bien peu prestigieux 'second rôle de troisième film de saga') était aussi inattendu que naturel pour Spielberg, un peu comme le choix d'Harrison Ford une dizaine d'années plus tôt. Nonobstant la différence d'âge relative entre les deux acteurs (douze ans), réunir James Bond et Indiana Jones dans une relation père-fils au-delà de l'inspiration devait figurer dans les tablettes divines. L'acteur écossais qui est devenu coutumier des rôles de sage patriarche depuis Le Nom de la Rose, mieux que personne, pouvait se comporter en érudit historien, strict et flegmatique, mais aussi aventurier voire plus gamin que son fils selon la dose d'action et de découverte archéologique.

Julian Glover en Walter Donovan forme un nouveau Belloq solide, antagoniste de Jones allié aux Nazis, et on retrouve avec plaisir Denholm Elliott en Marcus Brody ainsi que John Rhys-Davies en Sallah. Mais le second rôle originel du père devenant premier lui aussi, il est seul à avoir son thème. Couplé à celui du Graal par analogie dans l'enchaînement de mélodies en mode mineur (trompettes royales solennelles) et mode majeur (cor anglais ou hautbois sur fond de cordes illuminées), il renforce à merveille de manière épique le parcours de cette croisade moderne à travers l'Europe et le Proche-Orient de 1938. Henry Jones a bien cherché le Graal toute sa vie, mais 'Junior'/Indy, lui, veut juste renouer avec son père, de quoi donner une impression de double quête. Et le grandiose du thème de l'Arche d'Alliance se voit ramené à plus de sobriété pour la coupe sacrée de charpentier, artéfact chrétien le plus précieux par simple paradoxe.

Le thème plus léger du père et du fils en action, avec ses petites flûtes (on l'entend notamment pendant la scène des oiseaux sur la plage) apporte son complément de magie. Et avec ce bon vieux Indy musical en prime, le générique final, plus de dix minutes à son tour, jouant sur les alternances, est le plus beau de la saga. Avec le recul, le film a pour défaut ses successions de moments d'action (dont un clairement ajouté après coup : celui de la poursuite en moto dans les forêts d'Autriche), y compris du côté de la partition.

On le constate notamment durant la partie menant d'Alexandrette/Iskenderun jusqu'au fameux canyon du croissant de lune où repose le Graal. Ce n'est pas faute de nous faire apprécier les décors splendides du désert de Tabernas, sud-est de l'Espagne (les mêmes que pour les westerns de Sergio Leone), en lieu et place de la zone frontalière Turquie-Syrie décrite dans l'histoire. Le temple du Graal est carrément filmé en Jordanie, celui de Pétra ! De même, le personnage d'Elsa Schneider, jouée par la toute jeune et très belle Alison Doody (21 ans, entrevue dans un James Bond en 85), subit un peu le même revers de scénario que Ronald Lacey/major Toht en 81, car trop vite 'effacé'.

Toutefois, même là, John WILLIAMS fait preuve d'habileté : "The Austrian Way", rare moment romantique, est d'une puissance éclatante (heureusement pas trop rompue par la 'german way' implicite, grand moment d'humour made in Spielberg !), à l'image de ce rôle féminin qui, en termes de blondeur, rattrape bien celui du volet précédent, jusque dans sa fin. Les thèmes palpitants de l'action, ponctués de notes orientales et d'une marche noire impériale pour les Nazis - qui n'est pas sans rappeler une autre dans le futur et les étoiles ! -, trouvent leurs meilleures idées dans la poursuite en moto justement, ou encore la courte scène sur le bateau au début du film.

Une B.O riche en évidences et en beautés secrètes. Les mélodies principales sont disséminées avec brio au sein de tensions et développements forts, comme la spéléologie sous la bibliothèque de Venise avec les rats puis l'incendie, la progression tâtonnante d'Indy et Elsa au château de Brunwald. Caisses claires militaires, tambourins etc (y compris pour l'hymne nazi à Berlin, non repris dans la B.O en disque) forment un ensemble palpitant et sont confrontés à la beauté d'airs traditionnels voire médiévaux. On note un peu de théorbe ou luth à Venise en sus des mandolines, et une flûte aiguë dans le canyon du croissant de lune conduit les héros vers le moment le plus mystique du film.

L'épreuve du Souffle de Dieu demeure un sommet de tension et de dissonances, tout comme celle du 'saut' dans le gouffre où une chorale rejoint la partition au final, de façon brève et très tardivement, par contraste aussi avec les aventures hindoue et égyptienne. La blessure du père, la mort de Donovan, la rencontre avec le chevalier et le 'prix de l'immortalité' sont marqués chacun à leur tour durant cette suite passionnante d'un final haletant.

L'archéologie a repris ses galons et le public n'en vibre que davantage durant ces deux heures plus que bien remplies où même le trop n'est au final pas si dérangeant. Action, humour, sentiments, fantastique/SF et aventure sont dignement représentés dans une réussite visuelle et sonore. Le début western marque la première aventure d'Indy, tandis que le sauvetage par son père dans le temple du Graal et la réconciliation pourraient bien former sa dernière ; c'est du moins ce que l'on a cru pendant longtemps et accepté d'un point de vue grandeur, musique comprise. Cependant, Lucas, Spielberg, Ford et consorts en décideront autrement, sans parler de série TV cette fois !

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   MARCO STIVELL

 
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- John Williams (compositions, orchestrations)


1. Indy's Very First Adventure
2. The Boat Scene
3. X Marks The Spot
4. Ah, Rats!!!
5. Escape From Venice
6. Journey To Austria
7. Father And Son Reunited
8. The Austrian Way
9. Scherzo From Motorcycle And Orchestra
10. Alarm!
11. No Ticket
12. Keeping Up With The Joneses
13. Brother Of The Cruciform Sword
14. On The Tank
15. Belly Of The Steel Beast
16. The Canyon Of The Crescent Moon
17. The Penitent Man Will Pass
18. The Keeper Of The Grail
19. Finale & End Credits



             



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