AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Quelles expressions peuvent-elles qualifier le cinéma de Steven Spielberg ? Beaucoup, et pas vraiment élogieuses. Le dossier à charges est assez épais : cinéma à visée commerciale, médiocrité érigée en génie par les masses, crédibilité zéro pour présider un jury d'un célèbre festival. Cela fait beaucoup pour un seul homme. Et surtout, tout ceci est vrai. Le chiffre d'affaires des productions Spielberg ne parle pas en sa faveur et, du point du vue cinématographique, il a presque tout dit dès son premier film, le terrifiant Duel. Mais si j'ai dit presque, c'est pour trois bonnes raisons. Elles s'appellent AI, Rencontres du troisième type et Jurassic Park.

Jurassic Park, voilà d'ailleurs un chef-d'oeuvre comme on en rêve souvent. Pour commencer, il s'agit du premier film à avoir dépassé les 900 millions de dollars de recettes. Grâce à un marketing intelligent et redoutable, il a su marquer l'histoire du cinéma, et rendre 'in' les dinosaures auprès des jeunes. Mais le succès commercial ne peut être un critère de qualité, sinon Titanic ou encore ET seraient des chefs-d'oeuvre du 7e art. Je le dis haut et fort, rien ne manque à ce film. Le jeu d'acteurs, le scénario simple mais efficace, les effets spéciaux extraordinaires, rarement un film aura été aussi bien ficelé. Et bien sûr, la musique est au diapason de ces qualités.

Pour la musique de Jurassic Park, Spielberg fait comme d'habitude appel à John WILLIAMS. Si l'on se limite à l'univers du réalisateur, alors il ne fait aucun doute que le compositeur signe là un chef-d'oeuvre ultime. Au-delà même de la musique de film, il faut vraiment chercher pour trouver mieux dans le domaine de la musique contemporaine et classique du XXe siècle. Aucun point faible ne vient ébranler la musique, et j'insiste là-dessus.
En ce qui concerne la forme de la B.O, certains peuvent regretter qu'elle ne suive pas le film. Est-ce si problématique ? La réponse est clairement non. Contrairement à d'autres B.O pourtant excellentes, celle de Jurassic Park peut se savourer indépendamment du film, et sa finesse d'écriture ne tolère en aucun cas une telle limite. Parmi les preuves de la haute qualité du travail de John WILLIAMS, il convient de citer en premier lieu le thème principal. Il s'agit clairement d'une définition de l'émerveillement mis en musique. L'imagination se fait galopante, on veut être aux côtés du professeur Grant (ou le professeur Malcolm pour ma part) et admirer les brachiosaures et les gallimimus. Splendide. Sa redondance au sein du disque peut néanmoins légitimement rebuter, mais au fond, ce n'est ici pas bien grave. De plus, les autres thèmes et morceaux sont tout aussi géniaux. Le plus incroyable d'entre eux reste de loin l'ouverture "Opening Titles". L'excitation est à son comble, le mystère se fait fort, l'appel d'une aventure mémorable résonne au plus profond de l'être, et tout ça en 30 secondes. Qui dit mieux ?
Chaque musique, chaque mouvement colle de manière exemplaire à la situation assignée. La trahison sur "Dennis Steals the Embryo", la relative tranquillité de "My Friend, the Brachiosaurus" ou encore le mémorable final sur "T-Rex Rescue & Finale", pas un couac. Pas une fausse note. Rien de tout cela n'opère par ici.

Je me répète (pas assez, peut-être), mais la musique de Jurassic Park est quasiment parfaite. Il s'agit même de la meilleure bande originale de film des années 90, même si la concurrence est à un niveau semblable. De facto, Jurassic Park était déjà un film formidable, mais avec sa musique, son statut de film culte est définitif.