Amis lecteurs, je dois vous avouer quelque chose. Lorsque j'ai prospecté la discographie de CHRISTOPHE et que j'ai découvert Clichés d'amour, je m'étais dit sur le coup houlà, voilà un navet en approche. Sorti en 1983, il s'agit d'un disque de reprises, et pas n'importe lesquelles puisque le chanteur français pioche dans le répertoire des standards américains des années 50. Autant dire qu'il n'y avait pas de quoi être excité comme une puce. Et pourtant, la première écoute fut surprenante car Clichés d'amour se révéla être un disque sympathique en plus d'être solidement crédible. Voilà donc une bonne leçon musicale, ne pas juger le disque à sa pochette. Non, il faut faire le premier pas pour comprendre en quoi Clichés d'amour est un album charmant mais médiocre.

Ce n'est un secret pour personne, CHRISTOPHE est une bonne image du dandy classique : beau gosse, amateur de belles filles et de grosses autos (ou l'inverse), etc. Cela se traduisait bien dans ses chansons, il n'est donc pas incohérent de voir le chanteur se consacrer à l'amour bourgeois et classe tout le long d'un album. Ce qui étonne davantage, c'est de remplir ce dernier de reprises de vieilleries désuètes mais charmantes. En le comparant aux autres albums de CHRISTOPHE, on peut comprendre ceux qui considèrent Clichés d'amour comme une sorte de hors-série. Mais il s'agit bel et bien d'un album régulier, ayant même eu l'honneur d'une réédition en 2004 avec une pochette classe – contrairement aux autres albums parus entre 1973 et 1980.

Clichés d'amour, c'est de la variété interprétée en Français. Exit donc tout le barnum pop-rock, c'est l'orchestre dirigé par Karl Heinz Shäfer, déjà à l'oeuvre de manière plus ponctuelle sur Les mots bleus (1974), qui mène la danse. CHRISTOPHE se cantonne au seul rôle d'interprète, chose qui n'avait plus eu lieu depuis les années 60. Cependant, c'est déjà bien suffisant pour faire de belles choses, ce qui est le cas ici.

Concrètement, rien que pour cet élément, c'est déjà une bonne chose d'écouter Clichés d'amour. Du reste, il n'y a pas grand-chose de follement exceptionnel. Le travail d'adaptation des paroles offre un rendu fidèle aux compositions originales, l'ambiance haut-de-gamme et cabaret est toujours bien prégnante. Ensuite, quelques morceaux se détachent du lot, comme "Mon amie jalousie" au refrain vénéneux, "Souvenir de Laura" et son twist scénaristique, ou encore "Danse Perfidia", sensuelle à souhait (oui, ça se voyait à deux kilomètres). Toutefois, si ce n'est pas désagréable, on ne peut pas décemment qualifier Clichés d'amour d'album indispensable. Rien que le genre abordé n'est pas de ceux qui peuvent plaire de manière universelle, il faut déjà avoir des atomes crochus avec la variété d'époque pour commencer à l'apprécier pleinement. Les compositions sortent bel et bien d'une époque où le rapport à la chanson était radicalement différent de ce à quoi s'attend un amateur de pop et rock lambda, d'où scission en termes d'appréciation.

Malgré tout, Clichés d'amour se pose en album pivot dans la carrière de CHRISTOPHE. En effet, il tranche complètement (ou presque) avec les précédents forfaits du chanteur, et surtout marque la fin d'une époque. En effet, CHRISTOPHE entre dans un hiver musical, ne sortant plus que quelques singles quand l'envie lui prend. Après tout, chacun est libre de sa vie, mais ses fans auront longtemps à attendre pour voir leur idole reprendre réellement sa carrière. Très longtemps, même.

Note réelle : 2,5/5