Nous voici rendu au dyptique de Hubert-Félix THIEFAINE sur le bonheur et la tentation. J'ai presque envie de dire : "Déjà !". Pas si simple cette période ! Le mieux aurait été de traiter les deux albums comme un seul évidemment ! Mais nous voici confrontés au format d'un opus classique pour ce premier, le blanc, sensé être positif, et ou le bonheur est la clé finale des atermoiements sidéraux du Jurassien. Il esquisse un "presque" sourire sur la pochette. Si l'idée est de faire naître l'espoir, alors ce dernier semble permis.

Et immédiatement, "La nostalgie de Dieu" nous remet en mémoire les premières ambitions de notre ex séminariste. Cela nous donne ce "Dieu est amour, mais aussi un australopithéque" tout de psychédélisme vêtu ! C'est assez savoureux dans les paroles et bien agressif dans la musique. Et comme si ça ne suffisait pas, voilà que notre Hub se permet de nous faire un "Hosananas" sur la reprise du titre en mode chorale liturgique. La chanson "Tita dong dong song" est dédiée à son second fils Lucas. La mélodie est superbe, le résultat saisissant car, pour une fois, on sent bien les considérations du père prendre le pas sur celles du poète maudit. C'est sans-doute là qu'on retrouve le mieux la tentation du Bonheur, que THIEFAINE touchote ici de l'extrême bout du doigt. Et un superbe solo de guitare pour le sommet de cet album !

Mais l'artiste reste bien pêchu ! Nous avons du rock'n'roll avec "24 heures dans la nuit d'un faune". Toujours cette manie d'analyser sa vie par le biais des chiffres, symptôme psychiatrique finalement banal, mais que l'on retrouve à chaque fois dans les titres du Jurassien. En tous cas, le morceau dépote bien, on sent d'ailleurs qu'Hubert prend un réel plaisir à chanter doo wop woknwoll. Rock seventies avec le hammond sur la chouette «Sentiments numériques revisités». A nouveau rock'n'roll sur "Mojo dépanneur tv" et son petit lick d'orgue super addictif qui remplit remarquablement son office. Ah le vilain prisonnier de l'étrange lucarne, tout ça pour voir la fin des feux de l'amour ! Pas de prise de tête, du rock burné bien direct !

Sur "Critique du chapitre 3", l'ambiance noirâtre lui permet de déclamer avec force talent ses textes sur des arrangements très réussis. Plus loin, nous avons une belle orchestration sur "Des adieux", mais HF y "parle" un peu trop son texte à mon sens. Pas de temps morts, on remarque les petites orchestrations made in Liverpool sur "La philosophie du chaos", le blues smooth de "Copyright apéro mundi ". Enfin, la fusion complexe sur "Psychopompes metempsychose & sportswear" est étonnante, des grattes tantôt new wave tantôt carrément méchantes et Metal, des choeurs mainstream, et des paroles bien cyniques ! D'ailleurs, le refrain sur "Santa Barbara" laisse pantois ! Décidemment les séries US !

J'aime cet album positif. Sans-doute Hubert-Félix THIEFAINE a-t-il voulu tirer la substantifique moëlle de ce qu'il avait de mieux à donner à la postérité. Je penche pour une note de 3.5 mais un petit ange vient lâcher un 4 de circonstance sur cette dixième oeuvre du Lautréamont chanteur.