La situation est claire pour le KINGSTON TRIO. Les derniers albums chez Capitol l'ont vu rétrograder à la 22eme place des charts, ce qui n'est pas un signe encourageant. Decca vient, contre toutes attentes, de lui proposer un contrat juteux, mais il va falloir assumer son statut de groupe majeur ou se perdre dans les profondeurs de l'indifférence. Ce premier opus de la nouvelle ère, leur vingtième, porte bien tous leurs espoirs, mais il faut bien admettre que compte tenu de l'évolution récente de la musique, le rebond paraît improbable. Pourtant, on sent que Nick Bob et John s'arment de courage et d'entrain à l'entame de cette nouvelle étape de leur carrière.

Le premier single "Ramblin Boy" ne va pas charter. Voilà qui n'est guère engageant n'est-il pas ? Pourtant, cette chanson a tous les atours des hits qui firent la gloire du TRIO. Comment expliquer que cette superbe composition n'ait pas attiré les oreilles des auditeurs ? Je pense que la mode passée, en voyant le nom de l'artiste, les djeuns n'ont même pas voulu lui donner une chance. C'est dommage, et voilà une petite occasion de rétablir la vérité, cette chanson est un must d'insouciance et de bonne humeur ! Le second "I'm Going Home" est une chanson de pionnier bien sûr, dans la droite lignée de leurs standards, et comme un appel du pied à leurs fans qui, hélas, ne vont pas suivre !

Mais plusieurs titres sont de bonne facture: ainsi, je recommande vivement La douceur de "Love Comes A Trickling Down" chanté par John qui, comme souvent, est aussi d'un très bon tonneau et ne tombe pas dans la kitscherie la plus abjecte, d'autant que certains éléments sonnent dorénavant modernes. Nous avons un hommage à l'ancien Pete SEEGER sur "Gotta Travel On", et la jolie complainte chantée par Nick passe remarquablement. Elle rappelle "There's A Brand New Day On The Hirizon" d'ELVIS. Les voix du TRIO à l'unisson y sont vraiment belles, comme si le stress de bien faire était inexistant. "Poverty Hill" sonne plus comme les nouveaux tenants de la folk music, belle adaptation des WEAVERS de Pete SEEGER qui donne au groupe une dimension plus moderne. Je rajoute le "Midnight Special" de l'immense LEAD BELLY, qui se rapproche du vieux "MTA" par sa dynamique et sa vélocité.

Le reste est moins remarquable. C'est un brin dommage, un petit effort de plus et la suite aurait pu être différente. Ca reste sympa : "Little play Soldiers" est une petite berceuse calme pour s'endormir et "Love's been Good To Me" une ode à la douceur, compo du récurrent Rod McKuen. "More Poems" est la suite du premier essai des poèmes repris en musique par le TRIO. C'est très folk et traditionnel mais pas meilleur qu'auparavant. Nouvelle reprise de Bob DYLAN avec "Farewell".Bien entendu, le rendu prête à sourire quand on compare les deux versions. Celle-ci a au moins le mérite de présenter une compo de Bob hors de son écrin frustre. Cette fois, seule "Hope You Understand" sort de la six cordes de Stewart, une petite chevauchée sympa.

Nous sommes sur un quasi 3.5 pour cet opus, et vraiment un ou deux bons titres supplémentaires auraient suffi à accéder à la note supérieure. Ce qui est certain, c'est que cet album qui tient la route est meilleur que nombre de leurs précédents. On retrouve bien les ingrédients classiques du KINGSTON : la douceur, la complémentarité des voix, les reprises de vieux folk traditionnels, les images de grands espaces et ce fort symbole américain. Mais bon, on passe de la 22eme place à la 53eme... Pas de miracle ! Je reste donc sur un 3, et vous allez voir hélas que la situation ne va pas s'améliorer pour nos stars du revival folk.