A la fin des années 70, Stéphane SIRKIS était compagnon de route de la Ligue Communiste Révolutionnaire. En 2024, son frère jumeau Nicola SIRKIS, donne son accord pour que le nouveau morceau de son projet serve d'accompagnement musical à l'Euro de football sur TFI. Et entre ces deux anecdotes ? L'existence tout d'abord d'un véritable groupe qui marque de son empreinte musicale et visuelle les années 80. Ensuite, la création ou la continuation, pour demeurer diplomate, d'un projet solitaire par un homme avisé qui réussit à faire fructifier son entreprise en délaissant progressivement la recherche artistique pour un confort de rentier de la Pop. La sincérité, les combats, la naïveté attachante des premières années ont laissé la place depuis plus de deux décennies à un cynisme évident qui se drape de luttes sans risque et de morceaux le plus souvent sans âme.

Si on excepte le très faible single "Nos Célébrations" sorti il y a déjà 4 ans, cela faisait un septennat que nous étions sans nouvelle sonore d'INDOCHINE. Faut-il le déplorer ou s'en réjouir ? Comme je l'ai souvent souligné à travers d'autres chroniques, la plupart des fans actuels ne sont guère sourcilleux. En effet, tant que l'Empereur Nicola distribue de temps à autre quelques morceaux pour les satisfaire, voire pour les moins exigeants les combler, ceci suffit amplement. Je vous vois déjà venir car vous vous dites sans doute mais quel mépris, et les goûts, les couleurs, et la tolérance Richard... Non, non et non ! C'est justement parce que ce groupe (1981-1999) compte tant pour moi que j'espère toujours un changement aussi minime soit-il. La simple présence d'un léger souffle de nouveauté qui me ferait enfin y croire.

Je carbure sans doute au diesel car depuis Paradize, plus rien n'est comme avant et je ne veux définitivement pas le comprendre. Les émotions, les souvenirs que Sirkis et ses acolytes d'antan ont créé avant 2002 sont suffisamment beaux et forts pour moi pour qu'à chaque fois je me fasse quand même avoir. En attendant sans doute la prochaine sortie de l'album, ce n'est malheureusement pas "Le Chant Des Cygnes" qui changera cette donne. Si vous connaissez les anciens morceaux "Little Dolls" et "Nos Célébrations" justement, vous avez devant vous son alliage plombant. Vous avez donc compris que ces 4 minutes n'apportent rien. Sirkis en fin limier qu'il est a humé une nouvelle fois l'air du temps. Il sera le défenseur de la cause féminine. Rien de déshonorant naturellement. Bien au contraire. Mais ceci demeure tellement évident pour lui. Après la cause écologique exposée dans son horrible duo avec MOBY, Sirkis coche encore la case des causes attendues.

Pourtant, lors de ses jeunes années, Sirkis savait défendre une idée avec plus de talent et moins de paresse. En 2024, il faut aller "A l'Assaut Des Taureaux". La combative petite guerrière de "Kao Bang", les émouvantes et fortes "Leïla" et "Salômbo" doivent bien se marrer dans le meilleur des cas ou être bien amères plus certainement. On ne peut qu'avoir le cœur serré en pensant à elles. Tout ceci pour constater que "La Ville Des Filles Aura Raison". J'ai toujours préféré le rythme, la cadence des mots de Sirkis que leur sens premier souvent flou pour ne pas dire abscons. Avec "Le Chant Des Cygnes", force est de constater que le leader n'a vraiment plus aucune idée à proposer. Qu'un auteur ait ses petites marottes, quoi de plus normal, mais qu'elles soient recyclées jusqu'à l'indigestion, c'est désespérant. Il sera donc question sans surprise de "Corps Déchirés", de "Fleurs Fanées" et du désir de devenir (encore) "Ton Amoureuse Comme Une Fille". Rien à signaler, rien à retenir.

Et la musique dans tout ce marasme? Le fidèle tâcheron Olivier Gérard connaît la recette pour que le public dans les stades GROUPAMA et les Zénith soit aux anges lors de la très probable prochaine tournée. C'est calibré RTL2, pop rock, et on enlève le rock pour être objectif. C'est pour ne rien changer un titre direct, enlevé, à reprendre à l'unisson qui aux premières écoutes semble efficace mais le soufflet retombe hélas toujours trop vite. La faute à qui, à quoi ? A la redondance tout simplement. "Le Chant Des Cygnes", c'est de l'INDOCHINE 2002, 2009, 2017. Gérard y injecte une guitare acoustique pour la crédibilité d'auteur-poète, des claviers new wave pour rappeler une hypothétique filiation avec l'INDO d'avant. Là où le duo se montre encore filou, voire cynique, c'est qu'il crée ici et là des clins d’œil destinés aux vieux schnocks de mon acabit pour se remémorer pourquoi nous avons tant aimé ce groupe. La batterie bien mise en avant est calquée sur celle de "Drugstar" (1996) et ces chœurs d'enfants et d'adolescents ne pourront évoquer que les fantômes de "Hors-La-Loi" (1985) hymne qui était synonyme sincère de liberté totale. Rien à signaler, rien à retenir.

Humphrey BOGART à chaque cigarette qu'il fumait disait que c'était un clou de plus pour son cercueil. Sirkis plus attentif à sa santé a remplacé le tabac par des singles et des albums insipides, faciles, sans l'once d'une seule émotion. Le résultat est pourtant le même. Il referme consciencieusement le cercueil INDOCHINE.
Paix à son âme.