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INDOCHINE - Singles Collection -1981-2001 (2020)
Par RICHARD le 13 Décembre 2020          Consultée 2154 fois

Le 10 mai 1981, François Mitterrand est élu président de la République. Ce même jour, trois musiciens franciliens débutants entament leur première répétition dans un local parisien. En l'honneur de Marguerite DURAS, ils ont pris pour nom INDOCHINE. Quatre décennies plus tard, son leader et cofondateur Nicolas Sirkis est toujours là, à l'image de ses mots et des mélodies qui les accompagnent. Dans la sphère musicale hexagonale, il y a peu, voire aucun artiste, qui suscite autant de passion. C'est une évidence et cette dernière malgré le nombre conséquent d'années écoulées n'a guère changé. Petite pépite et bande-son d'une vie pour certains ou aberration et horreur sans nom pour d'autres, INDOCHINE ne laisse et ne laissera jamais indifférent. C'est tant mieux ! Cette généreuse compilation* qui s'étend sans aucun doute possible sur les moments de création les plus intéressants à défaut d'apaiser les avis tranchés sera toujours une belle occasion de (re)découvrir cet âge d'or.

La majeure partie des titres présentés ici nous rappelle au moins deux choses essentielles de la carrière indochinoise. La première est que, si ligne directrice il y a eu, elle a été impulsée par les frères ennemis Nicolas Sirkis et Dominik Nicolas. Sous cette linéarité de surface à l'aspect extérieur plutôt solide, il n'en demeure pas moins que l'existence du quatuor originel fut tout sauf un long fleuve tranquille. Elle n'a été faite que par des avants et des après. Succès, traversée du désert, acharnement et mépris de la presse spécialisée, départs des membres fondateurs, la liste est longue. C'est bien elle qui rétrospectivement forgera aussi l'INDO estampillé nouveau millénaire. En attendant ce retour de gloire pas toujours si glorieux, il est bon de s'attarder également sur le deuxième point, celui qui fait incontestablement la saveur de ces années. Ce sont à l'évidence les compositions de Nicolas. Sans ce musicien trop discret et très talentueux, les titres du groupe n'auraient pas connu cette exposition qui continue d'ailleurs à perdurer. Toutes ces ambiances riches, subtiles et diversifiées, c'est à lui et à lui seul qu'on les doit. Si le Circus Sirkis Band des années 2000 se caractérise par un fâcheux sentiment de redite et une volonté évidente de rayer Dominik de l'histoire du groupe, les premiers temps, eux, ne sont aucunement marqués par cette désagréable sensation.

La diversité est bien le maître mot. Quel rapport existe t-il en effet entre le riff direct et maintenant intemporel façon SHADOWS de "L'Aventurier" et la richesse des arrangements de l'érotique "La Machine à Rattraper le Temps" ? Aucun, si ce n'est cette capacité à développer une étrange addiction. A l'image de la liberté qu'elles offrent, ces années 80 sont pour Dominik un véritable petit laboratoire, un espace confortable dédié à la recherche d'une musique populaire, oui, mais pas simpliste ni putassière. La monotonie semble comme étrangère à son univers. Les petites perles pop qui profitent au passage d'un excellent nouveau mixage des éléments sonores originaux se ramassent à la pelle. Le compositeur passe allégrement de "Kao Bang", un véritable hymne new-wave dansant, au "Baiser" qui surprend par son minimalisme fragile. En Géo Trouvetou musical, il semble faire de la mélancolie diversifiée le socle principal de ses ambiances. Il suffit ainsi de se pencher sur les superbes "More" et "Punishment Park" (avec Juliette Binoche aux chœurs) pour constater que le pop "Je t'aime mélancolie" est du plus bel effet. Ces moments s'avèrent en définitive uniques car ils sont nés de l'alchimie paradoxalement contrariée de leur compositeur et de leur auteur.

Cette symbiose fragile a donc permis aux morceaux de passer la fatale épreuve du temps et d'être même dans un petit coin de la mémoire collective, quitte à en irriter passablement certains. INDOCHINE, c'est aussi bien l'émouvant slow "Tes Yeux Noirs" clippé par GAINSBOURG que "Troisième Sexe", l'iconique hymne à la tolérance malheureusement toujours d'actualité. Les mots de Sirkis ont ici une résonance particulière. Encore crédible dans son exposition des premiers émois de l'adolescence et du droit à l'indifférence, le leader fait mouche. Grâce ou à cause de son style si particulier qui le rend d'emblée identifiable, Sirkis avec un art elliptique exposera ad vitam æternam les sujets qui lui tiennent à cœur. La sexualité tiendra une place importante, qu'elle soit frontale, à l'image de l'irritant synth-pop "Canary Bay", ou nettement plus feutrée comme le souligne l'excellent "Savoure le Rouge", l'un des plus beaux titres d'INDOCHINE en l'honneur de SCHIELE. Ces titres carbone 14 souvenirs profitent ici et là des gimmicks entêtants de qui vous savez. Ces notes sans être redondantes impriment l'A.D.N du groupe. Il y avait bien à l'époque un son INDOCHINE. Comment ne pas se remémorer dès lors les premières secondes où vous avez découvert le vindicatif et en roue libre "Les Tzars" ou les douces pulsations du proto electro des "Fleurs Pour SALINGER"?

Les dernières années abordées par cette compilation (1996/1999) vont définitivement battre en brèche cette idée de cohésion artistique somme toute bancale car édifiée sur du sable (é)mouvant. Au départ de Dominik, succéderont aussi le doute quant à la pertinence de continuer l'aventure pour les frangins Sirkis, la mise au ban générale faite par les médias et la fidélité contre vents et marées des peu de fans encore présents (dont l'auteur de ces lignes). Il ne faudra pas alors rechercher de cohérence dans les univers proposés. INDOCHINE n'est presque plus et encore un peu moins après la douloureuse disparition de Stéphane. Le leader a perdu le Nord et part un peu dans tous les sens. Voilà pourquoi le groupe tâtonne, se cherche désespérément. Sirkis essaye de garder le cap, même si on le sent en pilotage automatique total. INDO, c'est son Précieux. Comment expliquer sinon ce grand écart entre "Kissing My Song", une pop song brit pop de très bonne tenue, et la désespérante et plate "Drugstar" au texte plus que gênant ? Le combo, si on peut encore le nommer comme tel, navigue néanmoins efficacement en cette fin de siècle entre désirs gothiques (le superbe "Juste Toi et Moi") et évidence pop asexuée ("Stef II"). Il y a quand même pire pour refermer le premier grand chapitre de ce groupe définitivement pas comme les autres.

Singles 1981-2001 est donc une galette essentielle. En plus de proposer des hits en abondance, elle (re)met indirectement en lumière l'apport primordial de Dominik Nicolas à cette période si riche en émotions. INDOCHINE était un grand groupe de pop. Les morceaux regroupés ici le soulignent avec une bien cruelle beauté.

* A noter que, pour une compilation dite complète, il manque toutefois les singles "La Guerre est finie", "Sur les Toits du Monde", "Je n'embrasse pas" et "Dancetaria".

Note réelle: 4,5/5

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1. Dizzidence Politik
2. L'aventurier
3. Miss Paramount
4. Kao Bang
5. Canary Bay
6. 3ème Sexe
7. Trois Nuits Par Semaine
8. Tes Yeux Noirs
9. A L'assaut
10. Les Tzars
11. La Machine à Rattraper Le Temps
12. La Chevauchée Des Champs De Blé

1. Le Baiser
2. Des Fleurs Pour Salinger
3. Punishment Park
4. Savoure Le Rouge
5. Un Jour Dans Notre Vie
6. Kissing My Song
7. Drugstar
8. Satellite
9. Justine
10. Juste Toi Et Moi
11. Atomic Sky
12. Stef Ii



             



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