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- Style + Membre : Dominik Nicolas

INDOCHINE - Babel Babel (2024)
Par RICHARD le 11 Septembre 2024          Consultée 4411 fois

Évoquer le quatorzième album d'INDOCHINE n'est pas chose si facile. Il serait naturellement aisé de railler ce projet, et d'autant plus maintenant. Mené d'une main de fer et en solitaire par Nicola Sirkis suite au départ de l'essentiel et talentueux Dominik Nicolas (1995) et du décès de son frère jumeau Stéphane (1999), son succès économique est inversement proportionnel à son intérêt artistique. En effet, depuis le passage au nouveau millénaire, les sorties discographiques sont très loin d'être excitantes. Ceci n'a pourtant pas empêché la création, et peut-être en est-ce une raison, avec le temps d'un consensus mou. INDOCHINE fait indéniablement partie du patrimoine hexagonal. Comme en son temps notre Jojo national, le combo ne satisfait plus que les groupies au recul inexistant et ne désirant en définitive qu'une seule chose : surtout, que rien ne bouge. Les autres, et c'est un comble tant INDOCHINE déclenchait les passions, ne sont même plus curieux ou énervés. L'indifférence est de mise. La seule question qui s'impose est bien celle de se demander si sur le plan artistique INDOCHINE a encore des choses à exposer.

Alors pour me rassurer quelque peu, je me prépare psychologiquement et fais mon Nico version Wish. Babel Babel, Rebel Rebel, David LaChapelle, la Vie est belle. C'est grave docteur ? Non, plus sérieusement, ces rimes pauvres esquissent les contours de cette nouvelle galette. Sirkis voit les choses en grand et ce n'est jamais bon signe. Babel Babel comme en son temps Alice et June et La République des Météors se veut un album concept. D'accord, mais sur quoi ? La difficulté avec Sirkis est que le concept est plus souvent visible dans le service après-vente de l'album que compréhensible dans les chansons qui le composent. Alors, pour être certain de bien comprendre, l'Américain LaChapelle nous a proposé pour la pochette une Tour. C'est Jérôme BOSCH (du travail de pro donc) qui rencontre un décor de MOEBIUS (je suis quand même sympa). La pochette ne laisse pas indifférent. Est-ce néanmoins suffisant pour capter l'attention ? On a toutefois compris que tout tourne autour des cultures, des rencontres, des conflits qui en découlent. Un album très contemporain en somme.

INDOCHINE sera donc au mieux observateur pertinent, au pire moralisateur désespérant. Rebel, Rebel, sans doute aussi selon les critères balisés de Sirkis. En ces temps de zapping à tout va et de concentration minimale, ces presque 90 minutes proposées ont de quoi surprendre et inquiéter. Un INDOCHINE gourmand est toujours angoissant. La sanction implacable tombe après plusieurs écoutes : Babel Babel est sans doute l'album de trop. Ce qui se détache très rapidement de ce nouvel opus, ce sont le manque criant d'inspiration et la pauvreté des textes. Vous pourriez me rétorquer goguenard que ceci a toujours été le cas. Objectivement, non. La plume de Sirkis pouvait, il y a longtemps, émouvoir. Des titres comme "More...", "Savoure le Rouge", "Les Tzars" et tant d'autres le prouvent sans difficulté. Mais là, à 65 ans, est-ce encore être digne de radoter à ce point et d'être parfois en roue libre même avec des textes de Chloé DELAUME ou Chloé MONS. Vivement l'Intelligence Artificielle pour faciliter le travail de Nico.

S'attarder un peu plus sur ce point chez INDOCHINE n'est pas cependant qu'un vain exercice de style. Les textes ont contribué à la musicalité de l'ensemble, façonné son identité pour ainsi dire unique. Mais pour qui connaît la geste indochinoise, Babel Babel en est malheureusement la caricature. Il y a donc profusion de verbes au futur, de toi, moi, garçon, fille, nuit, vie, de rimes en a. C'est la cata, tout comme la propension de Sirkis depuis quelque temps à être aussi plus direct dans ses prises de position. Il s'en dégage dès lors une lourdeur certaine, que ce soit avec le panégyrique surréaliste en l'honneur de Sanna MARIN, l'ancienne Première ministre de Finlande ("Sanna Sur La Croix"), du soutien obligé à ZELENSKY("Victoria") ou de la condamnation de POUTINE à travers "Tokyo Boy" ("Ça va mal se passer comme de croire et d'écouter POUTINE"). INDOCHINE, et c'est son droit le plus strict, coche toutes les bonnes cases mais cette paradoxale absence de prise de risque pour un groupe qui se veut définitivement rock depuis Paradize a de quoi désespérer. En se complaisant dans cette facilité d'écriture, Sirkis ne permet donc pas aux émotions de respirer, voire d'exister.

Sur le plan musical, le constat est identique. Il est objectivement très difficile d'en extraire des titres marquants. Tout est encore plus homogène, plus ennuyeux que d'habitude et c'est peu de le dire. Le compositeur Olivier Gérard ne veut ou ne peut se départir de ces ambiances électro-pop qui pourraient durer des heures et des heures. Non, ce n'est pas parce que "Babel Babel" ou "Tokyo Boy" dépassent les six minutes qu'ils sont pour autant créateurs de tableaux sonores pertinents. Cette probante panne qualitative crée même des morceaux interchangeables. "L'Amour Fou" à l'intro façon "Long Train Runnin" des DOOBIE BROTHERS et "La Vie Est A Nous" sous leurs atours pop directs en sont de beaux exemples. Les guitares quant à elles se font en tout point discrètes. Le plus souvent acoustiques, elles sont difficilement audibles à l'exception du réussi et INDO dans l'âme "Les Nouveaux Soleils". A croire qu'elles font la tête. Le quasi tout synthé, c'est intéressant, mais risqué, encore plus si on ne possède plus la capacité de renouvellement d'un DEPECHE MODE (au hasard). Alors que reste t-il dans tout ce naufrage ? Deux-trois choses seulement. Ceci prouve encore une fois qu'INDOCHINE n'a pas les épaules suffisamment solides pour proposer un album de cet acabit. Pourtant, l'idée du simili reggae sur "La Belle Et La Bête" est originale et plutôt bien faite, tout comme le symphonique et évanescent "Le Garçon Qui Rêve". A l'image du très beau et sans doute meilleur morceau qu'est "Girlfriend" avec Marion BRUNETTO de REQUIN CHAGRIN, INDO devrait franchement recentrer son propos. Faire de la Pop, rien que de la Pop, simple mais pas simpliste, un peu comme celle qui déclenche d'emblée imaginaire et émotions.

INDOCHINE a donc encore la capacité heureuse de surprendre. Je pensais légitimement que Sirkis et ses compères avaient touché le fond avec 13, leur précédent album. Il faut croire que non. Avec Babel Babel, le groupe propose un concept intéressant et facilement compréhensible : le néant quasi-total. Échec et mat. Fin de partie assurément.

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   RICHARD

 
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- Nicola Sirkis (chant)
- Olivier Gérard (guitare,basse, claviers)
- Boris Jardel (guitare)
- Marc Eliard (basse)
- Ludwig Dahlberg (batterie)


1. Showtime (avec Anna Garcia Perrote)
2. L'amour Fou
3. Ma Vie Est A Toi
4. Victoria
5. Sanna Sur La Croix
6. La Belle Et La Bête
7. Le Chant Des Cygnes
8. La Vie Est A Nous
9. Le Garçon Qui Rêve

1. Babel Babel
2. En Route Vers Le Futur
3. Girlfriend (avec Marion Brunetto)
4. Les Nouveaux Soleils
5. Tokyo Boy
6. No Name
7. Annabelle Lee
8. Seul Au Paradis



             



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