Je me suis lancé dans un petit revival Yngwie MALMSTEEN en m’étant notamment procuré la version vinyle du premier ALCATRAZZ que je compte bien chroniquer un de ces jours, et une superbe réédition de ce Trilogy que je redécouvre avec un plaisir non dissimulé. Quelle tuerie, ce disque !

A l’époque de sa sortie, je l’avais adoré, tout en tiquant un peu sur la qualité des musiciens qui composaient le groupe (le chanteur au timbre un peu traînant sur certains titres, et surtout la section rythmique trop stéréotypée). A la réécoute, ces légers défauts semblent bien véniels au regard des immenses qualités de l’opus (d’autant plus quand on connaît la suite de la carrière bien inégale du Suédois).
Il est vrai qu’à l’époque tout était beau et nouveau chez Yngwie : le premier album nous avait cloués au mur, le second avait joliment montré une autre facette de son art, et ce troisième opus était sensé parachever le tout, d’où une certaine pression sur les larges épaules de notre héros. Et tel Saint-Georges terrassant le dragon (quelle pochette sublime à force de kitsch !), notre blond guerrier fait plus que relever le défi en étalant toute sa classe au long d’un album proche de la perfection.
Bien entendu, "Trilogy Suite : Opus 5" emporte tout sur son passage, une première partie jouée à 100 à l’heure où la guitare vient allégrement titiller le mur du son, un passage de guitare classique ponctuée d’un sublime arpège et un troisième mouvement totalement épique avec superbes riffs, chœurs, cymbales, descentes de manche supersoniques et claviers dantesques. Du grand art et une des meilleures pièces d’Yngwie !

Il ne faut cependant pas limiter l'album à cette réussite. "You Don’t Remember, I’ll Never Forget" est un superbe titre qui lorgne allègrement vers le FM, et doté d’un solo vertigineux (qui fit l’admiration de bien des revus spécialisées guitare à l’époque). Dans un registre proche, "Fire" "Magic Mirror" et surtout le superbe "Queen Is In Love" ont tout pour ratisser large et attaquer les charts. "Liar", spéciale dédicace bien hargneuse envers un de ses anciens musiciens, ainsi que "Fury" et "Dark Ages" enfoncent le clou dans un registre plus franchement heavy au sein duquel Yngwie est tout aussi à l’aise, éclaboussant chaque titre de saillies néo-classiques pas tout galvaudées à l’époque. "Crying" enfin est un second instrumental plus calme, un peu dans le style de "Black Star" et dont (coïncidence ou pas) le solo en seconde partie est furieusement blackmorien.

Evidemment, presque 40 ans plus tard, ce disque a fait tellement d’émules qu’il a forcément perdu son effet de surprise pour qui le découvrirait. Fallait-il que le style inventé par le Suédois devienne une branche à part entière de la musique Metal ? Aujourd’hui, alors que Yngwie apparaît souvent comme sa propre caricature, il est bon de se rappeler quel génial créateur il fut, et cet album est de mon point de vue (avec l’inégalable premier) son sommet artistique. C’est la raison pour laquelle mon 4,5 se transforme en 5.