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MUSIQUE CONTEMPORAINE  |  B.O FILM/SERIE

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Vladimir COSMA - L'as Des As (1982)
Par AIGLE BLANC le 27 Avril 2021          Consultée 829 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Quand sort le 27 octobre 1982 L'as des as sur les écrans français, Gérard Oury compte déjà à son actif 10 films, autant de comédies, dont 3 immenses succès à son palmarès, Le Corniaud, La Grande Vadrouille et Les aventures de Rabbi Jacob auxquels on peut associer, dans une moindre mesure, l'inénarrable La folie des Grandeurs, tous bâtis sur les épaules de Louis de Funès et d'un deuxième larron, Bourvil ou Yves Montand, selon la tradition des duos "mal assortis" chers à la Commedia Dell'arte.

L'as des as, dont il cosigne le scénario avec sa fille Danièle Thompson, lui donne l'occasion de renouer avec son acteur du Cerveau, Jean-Paul Belmondo, à qui il offre un rôle digne de sa carrière alors au sommet de sa popularité. L'acteur de L'homme de Rio et de Peur sur la ville est si enthousiasmé par l'histoire qu'il accepte le rôle bénévolement, en se privant de tout cachet, fait rarissime de la part d'une star de son envergure.

Bien que ses succès semblent a priori derrière lui, Gérard Oury voit sa côte de popularité regrimper en flèche dès la première semaine d'exploitation parisienne de son film, au point qu'en définitive L'as des as, après avoir dominé pendant 26 semaines d'affilée les écrans français, atteint le deuxième rang du plus grand succès de l'année 1982, totalisant près de 5 500 000 entrées, juste après l'indétrônable E. T l'extraterrestre duquel le séparent à peine 500 000 entrées.
Ceux qui ont vécu cette époque en direct n'ont pas oublié non plus que L'as des as demeure le premier film à avoir été diffusé sur la nouvelle chaîne privée Canal +, ce qui, au vu de son succès public, constituait un véritable plan de marketing.

En faisant appel pour la musique aux services de Vladimir COSMA, Gérard Oury renoue avec le compositeur chanceux des Aventures de Rabbi Jacob. Quant au compositeur lui-même, sa collaboration avec le cinéaste se double de retrouvailles avec Jean-Paul Belmondo depuis le film L'animal de Claude Zidi en 1977, comédie similaire mêlant aventures, action et humour. C'est donc à juste titre que le label Pomme Music dans sa collection Cosma Cinéma couple les deux B.O pour constituer le programme fort intéressant de ce volume 13 aussi varié qu'alléchant.

En effet, comme Belmondo à cette époque, en 1982, Vladimir COSMA connaît peut-être le pic de sa carrière, aussi bien en terme artistique que commercial, Diva, le film césarisé de Jean-Jacques Beinex, lui ayant rapporté l'année précédente un disque d'or et La Boum cette année-là un disque de platine, tandis que La Boum 2 a raflé les deux. L'année suivante lui offre de remporter le César de la meilleure musique pour Le bal, le superbe film d'Ettore Scola.

Les deux films présentent l'acteur dans ses atours les plus flamboyants, c'est-à-dire le cascadeur tête brûlée que l'on connaît depuis L'homme de Rio et, surtout, Peur sur la ville (voir la chronique dans nos colonnes), mais aussi l'homme de cœur que met en évidence L'as des as, venant en aide à Simon, un enfant juif dont la famille est poursuivie par la gestapo. Vladimir COSMA, comme il l'a maintes fois démontré en musicalisant les films de et avec Pierre Richard, saisit avec entrain, malice et tendresse, la fougue inénarrable de l'acteur qu'il transpose judicieusement dans une forme concertante mettant à l'honneur deux pianos généreux.

Le film se déroulant en 1936, lors des jeux olympiques de Berlin, et Jo Cavalier (Belmondo) étant entraîneur de l'équipe olympique de boxe, le thème principal se charge des caractéristiques de tout hymne digne de ce nom : un air aisément mémorisable qui exalte les prouesses sportives comme les élans patriotiques, de sorte qu'un parallèle avec l'hymne oscarisé de VANGELIS pour les Chariots de feu (1981) ne serait pas incongru, même si Vladimir COSMA ne copie en aucune façon le synthétiste grec. Ce sont les deux pianos de cet hymne initial, "L'as des as", qui rendent possible ladite comparaison. Quant à l'orchestre, dirigé comme il se doit par le compositeur en personne, il ne manque ni d'emphase ni de sensibilité, évoquant aussi au passage celui d'un certain John WILLIAMS rompu, comme chacun le sait, à ce type d'exercice depuis Star Wars et Superman.

De telles références ne doivent pas ternir le talent de COSMA dont les cordes de l'arc ne manquent ni de variété ni d'atouts. C'est ainsi qu'il compose avec bonheur un air dansant dans le style des danses juives, "Oy ! Oy ! Oy !" en faisant intervenir lors des refrains le violon sinueux et exalté du maître Ivry Gitlis* tandis que sont réservés les couplets à une fanfare des plus françaises, avant que couplets et refrain ne fusionnent en définitive, le violon yiddish se mêlant avec une fluidité étonnante aux cuivres de la fanfare dans un final joyeux et entraînant. On se souvient que COSMA avait déjà trempé ses notes, à l'époque de Rabbi Jacob, dans l'allégresse d'une fête juive à l'occasion d'une séquence mémorable que retrace fort bien notre ami Kingbee dans sa chronique correspondante.

Le compositeur n'oublie pas non plus sa prédilection pour le jazz, style dans lequel il excelle, en témoigne le très réussi "A Berlin, toi et moi" où les cuivres à l'honneur exaltent une époque riche en créativité.
Sans surprise, le thème principal se voit décliné à la mode olympique, avec prédominance des cuivres emphatiques, dans "La flamme olympique", à la mode romantique par un ralentissement de son rythme ("L'échappée belle"), à la mode suspens, ostinati de cordes à l'appui, comme dans l'haletant "La nique à Hitler". "Ouverture de l'as des as" le charge même de sentimentalisme par la présence appuyée des deux pianos, avant de le conduire sur les traces d'un film d'action que devraient adorer les fans de John WILLIAMS, tout l'orchestre mobilisé à hue et à dia dans un festival de suspens et d'émotions familiales.

Quant à L'animal, la musique du film de Claude Zidi en complément de programme, il démontre l'éclectisme de Vladimir COSMA capable d'inscrire sa partition dans le moule alors si à la mode du Disco. Par sa pulsion animale, le Disco reflète une autre facette de Jean-Paul Belmondo, plus jeune (en effet, le film date de 1977), plus bagarreuse, plus bondissante.
Et, contre toute attente, le Disco sied plutôt bien au compositeur qui trouve la juste distance entre les rythmes syncopés d'un beat caractéristique et l'humour inhérent au personnage de Belmondo qui, rappelons-le, dans ce film interprète un cascadeur de cinéma. Le thème éponyme, "L'animal", est à ce titre une jolie réussite, certes kitschissime à souhait, mais sauvée par l'humour de l'orchestre de COSMA. Le disque nous propose une autre version savoureuse de ce thème, "L'animal (version disco)", où la basse, la guitare slappée et le beat amplifient la couleur disco, et qu'humorisent des grognements de gorille. Et par-dessus ces éléments clichesques, se greffent des gémissements orgasmiques (serait-ce Raquel Welsh, partenaire de Belmondo dans le film? Le livret ne le mentionne nulle part), dans la pure tradition initiée par Giorgio MORODER et sa muse Donna SUMMER dont tout le monde avait encore en mémoire depuis l'année précédente le monumental "Love to Love You Baby". Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'en terme d'efficacité orgasmique, les gémissements de la voix féminine n'ont rien à envier à ceux de la SUMMER.

Bien entendu, le jazz n'est jamais bien loin, ce que vient nous rappeler la clarinette sautillante de "Kangourou", autre titre encore une fois fort bien troussé.
Toutefois, le plus étonnant de cette B.O réside dans le titre "Suite française" composé de trois mouvements (menuet, gigue et passe-pied**) qui raniment de façon surprenante la forme classique des sonates (on pense souvent à MOZART). Loin de se lancer dans un pastiche, Vladimir COSMA compose une "suite française" à s'y méprendre. Les violonistes, flûtistes et claveciniste y démontrent une osmose indéniable, de sorte que lorsqu'ils entament enfin le thème "L'animal" lors du passe-pied, on jurerait qu'il n'est en réalité qu'une réinterprétation d'un air classique de MOZART ou TELEMANN.

Il s'agit donc d'une B.O des plus agréables qui complète très bien celle de L'as des as en offrant le contrepoint idéal, clé d'un programme divertissant réservant suffisamment de surprises pour donner l'envie d'y revenir.

*Ivry Gitlis : célèbre violoniste israélien mort à 98 ans, à Paris, le 24 décembre 2020.
** menuet, gigue et passe-pied sont des danses traditionnelles au rythme ternaire.

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   AIGLE BLANC

 
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- Vladimir Cosma (compositions et direction orchestrale)
- Ivry Gitlis (violon, titre 2)


- L'as Des As
1. L'as Des As
2. Oy ! Oy ! Oy !
3. A Berlin, Toi Et Moi
4. La Flamme Olympique
5. L'échappée Belle
6. La Nique à Hitler !!!
7. Ouverture De L'as Des As
8. Dans Le Repère Du Loup
9. Gaby, My Darling
10. L'as Des As (finale)
- L'animal
11. L'animal (thème)
12. Kangourou
13. Tendre Animal
14. Suite Française
15. -menuet
16. -gigue
17. -passe-pied
18. L'animal (version Disco)
19. Multipattes
20. De Liane En Liane
21. Jungle Et Cie
22. Happy End



             



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