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Vladimir COSMA - Le Renard Jaune (mocky) (2013)
Par MARCO STIVELL le 10 Mai 2024          Consultée 274 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Après Le Mentor (2012), il y a eu À Votre Bon Coeur, Mesdames (2012 aussi) dans lequel un Jean-Pierre Mocky marié de longue date à Dominique Lavanant se sent blasé d'un coup et va convoler ailleurs, rencontrant des dizaines de femmes différentes avec plus ou moins de réussite. Parmi celles-ci, une artiste délurée (Arielle Dombasle), une croqueuse qui veut rendre son mari jaloux (Virginie Ledoyen) et une nonne repentie qui veut mener des 'parties' collectives (Elsa Zylberstein). Film agréable pour sa dynamique, tout comme la partition de Vladimir COSMA, allant du sax ténor smooth à la valse de chambre pleine d'élégance. Ensuite, on peut apprécier sans mal un des deux films de 2013 et uniquement polars, Dors Mon Lapin (2013) où Frédéric Diefenthal campe un rôle bien meilleur que dans n'importe quel volet de Taxi, en jouant un jeune marié vivant dans la précarité, dont la femme va accoucher d'un enfant et qui, pour subsister, va avoir l'idée de voler un bébé à une famille d'aristocrates, moyennant rançon. Non méchant au fond, désespéré et mal préparé, il va se heurter vite à un commissaire zélé, joué par Richard Bohringer (enfin de retour auprès de Mocky après Ville à Vendre, 1991). Pour cette tragi-comédie, COSMA joue la carte enfantine, orgue de Barbarie à l'appui et presque routinier, auquel il oppose un grand thème noir orchestral.

Bohringer et Diefenthal se retrouvent dans la distribution du second de 2013, adaptation d'Agatha Christie (Au Rendez-Vous des Tordus, série noire, 1958) appelée Le Renard Jaune, film toujours simple mais brillant par son côté huis clos dans un bar appelé de la sorte pour faire une référence à une équipe du Tour de France en cyclisme. À leurs côtés, Jean-François Stévenin joue le flic (comme en 1982 et 1995, toujours pour Mocky !) tandis que Bohringer incarne l'écrivain à la langue trop pendue face à ses connaissances du bar, et qui se fait assassiner. Quel coupable, parmi ces piliers de comptoir : Diefenthal le peintre blasé, Michael Lonsdale l'anarchiste romantique, serveur et pianiste (lui aussi enfin de retour mais pour la dernière fois), Philippe Chevallier (sans Laspalès) l'autre serveur, Claude Brasseur l'ancien militaire et sa femme bavarde Dominique Lavanant, Antoine Duléry le patron du bar, ainsi que Béatrice Dalle l'ancienne allumeuse aujourd'hui défigurée ? Un film qui aurait dû être fait cinquante ans plus tôt avec Bourvil et Maurice Chevalier ; un des Mocky à (re)voir franchement, pour cette période mais pas que, avec des grands noms mais pas que.

Heureusement, une nouvelle fois mais mieux que jamais dans cet intervalle lui aussi, Vladimir COSMA ne rate pas son coup non plus. Et tout comme pour Dors Mon Lapin, c'est, pour générique de début, un drame lent aux cordes en marche qui convient, fort beau, même si on a à peine le temps de l'apprécier. Toujours dans le court mais à ne pas manquer, les interludes romantiques au piano 'joués' par le nounours tristoune Michael Lonsdale quand il n'est pas de service (spoiler : en fait, il ne l'est jamais vraiment mais reste très actif, dans sa tête !) et alors que son coeur se tourne sans grand espoir vers Béatrice Dalle. Il est dommage que la valse de leur romance frustrée qui arrache un beau sourire doux à la dame (par opposition au reste de son caractère), lors d'une des rares scènes d'extérieur au parc, ne soit pas répétée tant elle a de quoi plaire elle aussi dans son genre mais bon, cela reste en marge de l'intrigue et une autre liaison plus 'jeune' se forme. Une valse de chambre ramène encore Lonsdale et Stévenin depuis la morgue.

Pendant toute la première partie du film, c'est Bohringer qui mène la danse, lui aussi avec son piment habituel mais théâtralisé, métamorphosant l'esprit PMU franchouillard en quelque chose de noir et de violent, même si on y garde la forme de classe britannique héritée de Christie. COSMA, décidément très porté sur le piano ici et pour mettre sa propre note de classicisme, l'accompagne 'post-mortem' durant une séquence où l'on entend la voix de l'acteur en voix-off, tandis que les autres, les vivants, sont muets. Un petit exercice sympa, tout comme la marche sensible, pas forcément la plus 'dure', qui accompagne le geste du meurtrier (ou de la meurtrière) s'avançant vers sa proie.

Malheureusement, tout cela est un peu trop éparpillé, séparé par de longues séquences vides de musique et le seul équilibre sauvant le film de ce point de vue est le piano du bar, changeant de thème au gré des heures, sachant que la majeure partie de l'action se passe au cours d'une journée complète, avant le 'feu d'artifice' de minuit. C'est d'ailleurs de nouveau un trois temps léger qui fait contrecoup à cet instant burlesque, et qui déborde en toute logique sur le générique final. Le Renard Jaune a eu, au contraire de bien d'autres Mocky et malgré les efforts de la critique pour le flinguer, une distribution en salles et une belle appréciation au festival d'Angers.

3,25 parce que les notes jouées sont tout de même les bonnes.

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