Le troisième album de Nicolas PEYRAC ne contient pas de tube, mais on retrouve un soupçon d'homogénéité qui manquait à Jumbo, l'effort précédent, aussi bien en style qu'en qualité. Les arrangements sont toujours signés Jean Musy, avec une préférence pour la couleur variété à orchestre.

Pas de tube, mais "Comment font les ruisseaux et les rivières" et "Comment t'appelles-tu ?", avec sa touche féérique tout en légèreté séductrice, sont de toute évidence taillées pour plaire, avec une femme au centre de l'attention. Nicolas PEYRAC suscite également la sympathie mêlée de sourires avec le "Voyage en ballon", plein de rebondissements. L'homme qui fait le tour du monde dit sans cesse à sa belle qu'il va revenir, mais l'issue, moins frivole cette fois, se trouve être le clocher et les tours de Notre-Dame.

Toujours adressés à des femmes adultes ou non, ou bien alors les considérant de façon indirecte, le slow "Voilà ma vie, Maria", entre Paris et Vénézuela, ainsi que le texte de "Quand pleure la petite fille" à la sensibilité palpable, sur fond de piano dramatique, de cordes et d'accordéon, se révèlent être de bonnes surprises. "Marilyn", mené par un folk à rythme exotique, rend timidement hommage à l'actrice la plus célèbre, mais avec beaucoup d'élégance.

Tout cela laisse peu de place à la chronique sociale à laquelle seule "Habanera" se trouve rattachée. Avec son esprit tango, grâce au bandonéon et au piano, il s'agit d'une critique indirecte du régime militaire en Argentine, et d'une invitation pour venir en France, à Paris même, pour se sentir libéré. "Pour mon anniversaire" est hanté par les rêves d'enfant souvent contrariés par les adultes, avant même de le devenir soi-même. En fin de disque, "Ailleurs si j'y suis" et "Il suffirait", tour à tour funk et ballade, se nourrissent de grands principes universels (changer le monde), de développement personnel avec l'encouragement de sortir du cloisonnement de son quotidien étouffant pour partir en voyage. Un discours cher à Nicolas PEYRAC qui n'hésite pas à le mettre en pratique, comme en témoigne son futur single à succès.

Même si certaines musiques demeurent passe-partout, l'orchestre de Jean Musy est moins lourd que sur l'album précédent, déchargés en cuivres avec juste un peu de hautbois sur la première et la dernière chansons. Les cordes sont à l'avenant, aux côtés de la rythmique de base. Toutefois, en dehors de quelques éléments folk sur la face A, il faut attendre "Comment t'appelles-tu" pour que la guitare acoustique, instrument de prédilection du chanteur, revienne au galop, comme frustrée d'avoir été mise au ban. PEYRAC corrigera le tir et obtiendra une meilleure indépendance lors du prochain 33-tours.

L'ensemble du présent album s'écoute bien, les idées sont là, même si rien ne dépasse le cadre de l'éphémère, d'une publication survenue peut-être trop vite en 1976, peu de temps après le deuxième album. Quelques semaines plus tard, l'artiste et sa maison de disques font deux tentatives de tubes qui demeureront des 45-tours à part entière mais qui resteront dans les mémoires. "Il y aurait du soleil", slow variété classique, ne marque pas autant néanmoins que "Je pars", avec ses boucles électroniques mêlées de picking folk, envoûtante. Nicolas PEYRAC décrit l'ennui à domicile et parmi ses destinations de choix (Bahia, Cuba etc), il dit aujourd'hui n'avoir point été à Buenos Aires dans sa vie et le regretter ! Cette chanson est importante pour lui, pour sa carrière, et si elle aurait effectivement détonné avec ce disque ou le suivant, elle demeure emblématique de la période fin 70's.