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BIOSPHERE - Shortwave Memories (2022)
Par JOVIAL le 8 Avril 2022          Consultée 1140 fois

Si l'on connaît depuis longtemps la passion qu'entretient Geir JENSSEN pour les grands espaces et l'alpinisme, ce n'est sans doute pas le cas en ce qui concerne son intérêt pour les vieux synthétiseurs. Pour s'en convaincre, il suffit d'un rapide tour sur sa page Facebook, via laquelle il partage volontiers quelques-unes de ses trouvailles. Une curiosité sans cesse renouvelée pour les claviers antédiluviens qui l'a même amené à jouer sur le Subhardcord, synthétiseur est-allemand conçu en 1960, longtemps tombé en désuétude jusqu'à sa redécouverte récente.

Avec Shortwave Memories, on saute une vingtaine d'années plus tard. Ce nouvel effort est une déclaration d'amour au post-punk et plus particulièrement aux œuvres réalisées par les producteurs Daniel MILLER (Mute Records) et Martin HANNETT (JOY DIVISION, NEW ORDER). Contrairement à ses dernières œuvres, enregistrées sur ordinateur, le Norvégien prend cette fois-ci le pari de n'utiliser que du matériel analogique de la fin des années 1970 et du début des années 1980, entièrement reprogrammé par ses soins. Une quinzaine de machines au total, dont la liste nous est par ailleurs bien aimablement fournie sur le livret interne.

Mais l'idée n'est pas d'imiter ce qui pouvait se faire il y a quarante ans, et encore moins de se mettre subitement à faire du post-punk. Pour Geir JENSSEN, cet album se présente tel qu'il aurait pu le concevoir si ces instruments étaient restés en usage jusqu'à aujourd'hui, en appliquant également les préceptes des deux producteurs cités plus haut. Mais inutile aussi de s'attendre à un disque rétro, dont la musique électronique est assez friande depuis quelques années : si la signature sonore reste évocatrice, et c'est bien normal, l'entreprise n'a rien d'un retour en arrière. Il s'agit, encore une fois, de créer autre chose, en exploitant au maximum les sons et capacités des synthétiseurs sélectionnés et ne conserver qu'une poignée de liens discrets avec le passé, laissant par intermittence s'échapper quelques 'souvenirs à ondes courtes', comme autant d'images fantômes s'imposant subtilement à notre esprit.

Shortwave Memories avance en territoire connu. On retrouve en particulier les climats minimalistes de N-Plants, dont on en vient par endroits à retraverser les laboratoires désertées. Les textures, plus froides, rappellent The Senja Recordings, mais en évitant de repartir vers les errances arctiques de Substrata ou d'un Cirque. Absents des dernières productions du Norvégien, les rythmes sont également remis à l'honneur. On a ainsi parfois la délicieuse impression de regoûter au psychédélisme synthétique de The HIGHER INTELLIGENCE AGENCY, voire aux modulations crépusculaires de PLASTIKMAN, deux vétérans, tout comme Geir JENSSEN, des scènes ambient et techno des années 90.

Crépusculaire, c'est d'ailleurs l'un des mots qui nous vient sans doute à l'esprit dès les premiers instants. L'auditeur curieux se sera peut-être attardé sur l'étrange pochette, qui signifiait déjà beaucoup de choses en reproduisant les couleurs du ciel visibles entre le coucher du soleil et la nuit complète. Atmosphères vespérales et mystérieuses qui, associées par exemple aux ambiances futuristes de "Interval Signal", "Shruthi-12" et "Shortwave Memories", nous ouvrent les portes de cités tentaculaires éclairées au néon. BIOSPHERE développe là un univers de science-fiction que l'on rencontre tout au long du disque, ailleurs dans les émanations hydrocarburées de "Formanta", ou encore dans les boucles hypnotiques de "Transfigured Express", qui viennent clore l'exercice sur une note plus inquiétante. Mais Shortwave Memories n'est pas seulement cela et voit aussi le Scandinave revenir à ses débuts, en particulier avec les plus rythmés "Night Shift" et "Infinium", deux morceaux très réussis qui donneront envie de ressortir Microgravity et Patashnik.

Après trente ans de carrière, Geir JENSSEN parvient encore à surprendre avec un album riche et soigné, aussi fascinant que pouvait l'être, dans des registres néanmoins différents, Shenzhou ou Dropsonde. Il prouve aussi à certains, après des œuvres conçues en majeure partie par informatique (L'incoronazione di Poppea, Departed Glories, Angel's Flight), qu'il n'a rien perdu de son savoir-faire ni de son intelligence, proposant des titres exigeants mais rarement hermétiques. Shortwave Memories est tout simplement un nouvel incontournable dans la discographie du Norvégien.

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- Geir Jenssen (tout)


1. Tanß
2. Interval Signal
3. Night Shift
4. Formanta
5. Shortwave Memories
6. Infinium
7. Shruthi-12
8. Transfigured Express



             



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