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DISQUE DE REPRISE  |  STUDIO

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RENAUD - Meteque (2022)
Par RAMON PEREZ le 14 Juillet 2022          Consultée 2488 fois

Y a-t-il encore quelque chose à dire sur RENAUD, sur ce qu’il est devenu ? Allez, peut-être une que je n’ai pas lue ailleurs, comme ça tu ne seras pas venu pour rien. Ca concerne son sens de l’humour. Parce que, quand même, c’était drôle RENAUD. Et de pas mal de manières différentes d’ailleurs. Ça lui permettait de maquiller un fond plus sombre. Je ne sais plus pourquoi j’en étais arrivé là, mais j’étais tombé sur une interview de SARDOU qui expliquait que la différence entre eux n’était pas fondamentalement d’ordre politique, mais qu’elle résidait plutôt dans le fait que lui était plutôt optimiste quand l’homme au bandana était carrément désespéré derrière sa volonté de faire rire. Sauf qu’après plusieurs décennies de psychopathologies, ce dernier n’a plus franchement envie de rigoler. Il n’y a qu’à regarder la photo de ce nouvel album pour s’en assurer.

Alors, il essaye toujours, mais le mojo est parti. Ça donne des chansons sensées être drôles mais qui ne font plus rire grand monde : "Ma blonde" (2007), "J’ai embrassé un flic" (2016), "Corona song" (2020). Comme il a perdu également l’essentiel de sa colère, il ne reste plus grand-chose à mettre dans de nouvelles chansons. Cependant, RENAUD a sa seconde casquette au fond de l’armoire, qu’il peut toujours ressortir. Celle pour laquelle il sera subsidiairement salué lorsque l’heure sera venue, en tant que simple interprète, puisqu’il est l’un des rares de sa génération ainsi que de sa catégorie à avoir régulièrement mis sa voix au service d’autres répertoires. Il avait commencé comme ça, en chantant dans la rue les chansons réalistes d’avant-guerre, dont il avait tiré un album live en 1980. Combien d’entre nous sommes entrés en contact avec ce genre particulier grâce à ce disque ?

De même qu’il a contribué à faire connaître le répertoire des bassins miniers avec Cante El’ Nord en 1993, avant de se faire plaisir en reprenant le répertoire de son maître à écrire en 1996. Enfin, en 2009, il tentait un album VF de chansons irlandaises, au résultat contesté mais qu’à titre personnel j’aime assez franchement, ainsi que j’ai eu l’occasion de l’écrire ici. Voici donc le cinquième épisode de cette série parallèle, consacré cette fois-ci aux chansons qu’il aurait aimé écrire. C’est relativement peu connu, mais RENAUD est un très fin connaisseur de la Chanson, voire un encyclopédiste. Les siennes sont d’ailleurs truffées de références à de nombreuses autres. Aussi, quand il parle de celles qu’il aurait aimé écrire, on peut légitimement penser que ce ne sont pas paroles en l’air. Il est d’ailleurs intéressant de noter qu’il rattache ces chansons à des souvenirs personnels très précis lorsqu’il évoque cet album.

Par conséquent, la liste des titres proposés est plutôt intéressante. Quelques classiques, des morceaux pour connaisseurs et d’autres beaucoup plus confidentiels : l’objectif de faire découvrir ou redécouvrir ces œuvres est atteint sans problème. Il y a des artistes qui tombent sous le sens, tant ils ont influencé RENAUD directement : BRASSENS, Boby LAPOINTE, Hugues AUFRAY ou encore Serge REGGIANI (la chanson de ce dernier, "Si tu me payes un verre", est peu connue mais on sent d'emblée pourquoi il y est attaché). D’autres sont plus inattendus, en particulier ses quelques contemporains comme Françoise HARDY (avec qui il s’est pourtant bien crêpé le chignon dans le privé) ou HIGELIN, les deux ayant suivi des routes parallèles. Pour l’essentiel, ces chansons datent des années qui ont précédé sa carrière, ce sont celles de sa jeunesse. Mais on peut toutefois y lire l’histoire tardive de notre chanteur, au travers des thématiques qu’elles évoquent : l’amour (un tout petit peu, version désabusée dans "Ca va ça vient") et "La tendresse", "L’amitié" et la mort. Un peu de poésie, un fond de révolte, notamment au travers des deux chansons plus patrimoniales, dont "Le temps des cerises" qu’il considère comme la plus belle chanson de tous les temps - ce qui se défend.

Un autre bon point, assez inattendu, c’est la relative bonne tenue de l’ensemble. RENAUD chante plutôt bien (tout est dans le plutôt, on y reviendra). Toutefois, lorsque j’entends les difficultés qu’il a simplement à parler, j’ai du mal à ne pas y voir de prouesse technologique derrière cette performance. Il y a sans surprise un titre ou deux où l’usage de correctifs est plus qu’évident. Mais bon, ça s’écoute mieux que prévu et il arrive encore à faire passer des émotions avec le peu qui lui reste. Par exemple, sa voix en bout de course apporte une certaine gravité au texte angélique de "L’amitié". Du côté de l'orchestration, c’est bien produit, arrangé de façon généralement sobre et pertinente (bien qu’un peu sage). Mais il y a des exceptions plus surprenantes. Par exemple, "Le métèque" a un accompagnement qui se termine quasiment façon hard-rock, qu’on dirait presque le final d’ "Allongé sous les vagues" ! Bien sûr, il y en aura pas mal pour être consternés par une telle orchestration, mais personnellement je trouve intéressant qu’il y ait un choix atypique et même un peu d’énergie, car je ne l’attendais même plus. Plus loin, RENAUD a ouvertement souhaité faire une reprise de BRASSENS arrangée différemment des originales, à l’inverse de ce qu’il avait fait sur l’album dédié. Si je n’adhère pas vraiment au résultat, le geste compte.

Venons-en maintenant au revers de la médaille, avec sa voix qui restera bien sûr insuffisante pour beaucoup. J’avoue que j’arrive depuis très longtemps à en faire abstraction. Mais je comprends parfaitement qu’on puisse trouver cela rédhibitoire. A la vérité, ce qui me gêne le plus n’est pas tellement le manque de justesse récurrent, mais plutôt la scansion devenue trop mécanique et qui me rend parfois l’écoute de quelques morceaux difficile. Cela dit, dans l’ensemble, il ne s’en tire là aussi pas si mal au regard de sa production récente. Production d’ailleurs paradoxalement conséquente puisqu’il en est au troisième album en six années, ce que personne de sa catégorie n’a fait. Evidemment, il reste à se prononcer sur l’intérêt de faire un disque de reprises ; débat éternel. Là-dessus, je te laisse seul juge. Derrière cette question, celle de la pertinence d’adjoindre une notation à cette chronique. Comme je n’ai pas le choix, j’en mets une qui dit qu’il n’y a bien sûr pas match lorsqu’on compare ce disque, somme toute plutôt anecdotique, avec les albums de la grande époque ; mais que si on le compare avec ses dernières livraisons, plus encore avec tout ce que nous servent actuellement les producteurs de soupe grand public, ce Métèque n’a finalement pas une si mauvaise gueule que ça.

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   RAMON PEREZ

 
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1. Le Métèque [georges Moustaki]
2. L'amitié [françoise Hardy]
3. Ca Va ça Vient [boby Lapointe]
4. Le Temps Des Cerises
5. Nuit Et Brouillard [jean Ferrat]
6. Si Tu Me Payes Un Verre [serge Reggiani]
7. La Tendresse [bourvil]
8. Hollywood [david Mcneil]
9. Bonhomme [georges Brassens]
10. La Folle Complainte [charles Trenet]
11. Le Jour Où Le Bateau Viendra [hugues Aufray]
12. La Complainte De Mandrin
13. Je Suis Mort Qui, Qui Dit Mieux [jacques Higelin]



             



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