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LAIBACH - Kapital (1992)
Par JOVIAL le 7 Février 2013          Consultée 3760 fois

Printemps 1992. Le Mur de Berlin n'est plus qu'un souvenir, l'URSS n'existe plus et les démocraties populaires sont tombées les unes après les autres. Dans les Balkans, la Slovénie est enfin indépendante après une courte guerre. On pourrait croire les membres de LAIBACH enfin satisfaits, la démocratie triomphant finalement de la dictature. Or, c'est tout le contraire. D'une part, parce que la situation a effroyablement dégénéré en Croatie et devient tout aussi préoccupante en Bosnie, d'autre part parce que ces derniers refusent le 'Nouvel Ordre Mondial' tel que définit par Georges Bush en 1990.

Auparavant fermé au dialogue, c'est à partir de ce moment que le groupe va commencer à expliquer son propos de manière plus lisible en interview. Reprenant cette idée de non-alignement que prônait Tito en son temps, il dénonce l'hypocrisie des systèmes démocratiques obéissant en réalité à une logique capitaliste froide et bureaucratique. Le libéralisme et la promotion d'un libre-marché soi-disant idyllique ne profiteront jamais aux peuples, mais aux grandes multinationales qui négocient désormais directement avec les États. De même, LAIBACH se montre très critique envers l'Union Européenne, union économique et non spirituelle, à l'image des États-Unis, melting-pot impersonnel dont la finalité est la création d'un nouveau bloc où les différences culturelles auront été abolies. En disant cela, le groupe défend une certaine forme de nationalisme, chose qui lui sera reproché par la suite et le condamnera parfois à être encore perçu comme un groupuscule d'extrême-droite. Ce n'est pourtant pas le cas. LAIBACH se réfère en fait à la définition première du nationalisme, c'est-à-dire le développement d'un sentiment d'appartenance à une communauté. Il s'agit ensuite de faire face à une globalisation mondiale de plus en plus prégnante d'un côté, à la montée du patriotisme, du fondamentalisme et de la xénophobie en Europe de l'autre. Le nationalisme, tel que l'imagine le groupe slovène, c'est aussi définir son particularisme afin d'accepter celui des autres. En somme, se connaître soi-même pour mieux accueillir et comprendre l'altérité, se chercher des similitudes plutôt que de cultiver le narcissisme des petites différences dont les Balkans n'ont malheureusement que trop fait l'expérience.

Référence évidente à Marx, Kapital s'efforce ainsi de mettre en lumière tout cela. Comme pour mieux signifier la déshumanisation en cours, LAIBACH transforme sa musique, désormais très froide, austère et synthétique. Si quelques cuivres sont encore utilisés, les rythmes martiaux et les chœurs ont disparu. Le rock n'ayant plus la cote dans les années 90, le groupe s'essaye aussi aux genres nouveaux, techno, trip-hop, IDM et même hip-hop, peut-être parce que ces derniers incarnaient alors une contre-culture échappant encore au contrôle de l'industrie musicale, ou bien au contraire parce que nombre de ces représentants commençaient aussi à lui céder. Pour la première fois depuis 1986, le disque ne comporte cependant aucune reprise.

Malgré un propos très intéressant, ainsi qu'une grande diversité, Kapital est néanmoins, à l'instar de Let it Be ou NATO, un album inégal où l'aspect conceptuel l'emporte souvent sur le reste. La longueur du disque, voire des morceaux eux-mêmes, ne facilite pas non plus l'écoute qui se révèle parfois fastidieuse ("Codex Durex", "Young Europa", "Sponsored by Mars", "Regime of Coincidence, State of Gravity"). D'autres passages éveillent notre curiosité sans pour autant convaincre, par exemple le minimaliste "Le Privilège des Morts" et ses samples du film Alphaville de Jean-Luc Godard, surprenant mais plutôt creux. Heureusement, Kapital propose aussi d'excellents morceaux qui viennent faire remonter la note finale : électro sombre ("Everlasting in Union", "Illumination", "Torso"), hip-hop futuriste ("Hymn to the Black Sun"), distopies dramatiques ("Kinderreich", "Entartete Welt") et prévisions menaçantes ("Decade Null", "The Hunters Funeral Procession"). "Wirstchaft Ist Tot", réalisé en compagnie du boss Daniel Miller, est un petit bijou de musique électronique, entre EBM et indus, l'un des meilleurs singles des Slovènes dans les années 90.

Difficile de donner une note à un album qui ne plaira certainement pas à tout le monde. LAIBACH expérimente et il faudra s'y repencher plusieurs fois avant de réussir à réellement apprécier ses qualités. C'est peut-être la raison pour laquelle Kapital semble avoir été laissé de côté, tant par les fans que par le quatuor lui-même, disque qui n'a toujours pas fait l'objet d'une réédition officielle ni ne figure sur aucune compilation du groupe.

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- Dejan Knez (arrangemments)
- Milan Fras (chant)
- Ervin Markošek (batterie)
- Ivan Novak (arrangemments)


1. Decade Null
2. Everlasting In Union
3. Illumination
4. Le Privilege Des Morts
5. Codex Durex
6. Hymn To The Black Sun
7. Young Europa (parts 1 To 10)
8. The Hunter's Funeral Procession
9. White Law
10. Wirtschaft Ist Tot
11. Torso
12. Entartete Welt
13. Kinderreich
14. Sponsored By Mars
15. Regime Of Coincidence, State Of Gravity



             



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