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- Membre : The Velvet Underground , John Cale , Lou Reed And John Cale , Metallica, Antony And The Johnsons, Reed / Anderson / Zorn

Lou REED - Coney Island Baby (1976)
Par LE BARON le 16 Mai 2016          Consultée 3506 fois

Que faire après Métal Machine Music, le magnifique « Fuck You » de Lou à sa maison de disques, bien sûr, mais également à tous ceux qui apprécient ses textes ? Qu'un grand auteur de chansons n'écrive plus, le temps d'un album, voilà qui est étonnant, et qui n'est curieusement jamais mis en avant lorsque l'on évoque MMM. Passons, là n'est pas le sujet.

Coney Island Baby est de facture bien plus classique. La pochette représente Lou REED se découvrant la tête (notez la taille du galure !), habillé d'un simili smoking. On s'attend à ce qu'il entame un strip-tease tout en poursuivant sa description de cabaret décadent entamée avec Transformer, mais non. Il s'essaie à être cool, à sa manière : sensible et distant, ce qui est peut-être le meilleur moyen de se renouveler après son dernier déluge sonore. Même les textes semblent s'alléger par rapport à la période précédente. Sally Can't Dance creusait la veine la plus sombre, et surtout la plus crue. Lou REED semble avoir asséché le filon de sa propre violence. De plus, s'il continue dans son rôle de témoin d'un monde plus en moins en marge de la bonne société, il entrouvre une porte sur sa propre existence intérieure.

L'album commence par Crazy Feeling, chanson légère, quasi primesautière ! Lou s'adresse probablement à Rachel qui partage sa vie. Bien entendu, il l'a rencontrée dans un bar, bien entendu, c'est une professionnelle, et bien entendu, elle est sa reine. On sait le double usage du mot « Queen ». La légèreté du sentiment est donc là, mais le décor reste celui auquel Lou REED nous a habitués. La voix, un peu geignarde, peut paraître énervante. Cela fait partie du personnage, on sent que la teigne n'est pas loin.

Il y a également de l'humour dans ce disque, ce qui n'est pas vraiment la marque de fabrique de Lou REED. Mais l'entendre nous sussurer qu'il n'est rien d'autre qu'un cadeau pour les femmes de ce monde est évidemment très drôle (A Gift).

Le plat de résistance est cependant ailleurs, et il est double. Kicks, tout d'abord. Le narrateur s'adresse à un tueur. Et dit son admiration pour son interlocuteur, pour sa capacité à tuer, armé d'un simple couteau à cran d'arrêt. Pour ce narrateur, peu importe la mort d'un autre, ce qui fait le lien entre eux, c'est le goût pour l'adrénaline provoquée par la beauté du geste exécuté, si l'on peut dire, avec style. Là où un autre auteur nous décrirait simplement le comportement du tueur, Lou REED écrit une chanson à tiroirs puisque la description passe par un narrateur lui-même psychopathe. Et bien sûr, Lou s'abstient de tout jugement moral. Et ajoute une tension supplémentaire au texte en bégayant à l'envie.

L'autre pépite, c'est évidemment Coney Island Baby, qui peut d'abord laisser croire à une autre tentative d'humour. Le narrateur raconte combien il voulait jouer au football, alors qu'il était au lycée. Cela fait partie d'une tradition américaine, les joueurs de football sont des vedettes au sein de l'école. Et imaginer Lou REED en élève ordinaire, rêvant de rejoindre l'équipe, est drôlatique. Sauf que Lou dévoile peu à peu son désir véritable, qui est double : jouer dans l'équipe c'est aussi côtoyer le « straightest dude I ever knew », le « type le plus droit qu'il ait connu », donc. « Straight » a au moins deux sens : droit, mais également hétérosexuel. Il s'agit donc de cela : admettre une attirance homosexuelle dont il sait qu'elle ne connaîtra pas d'issue. Son autre désir, pour le moins contradictoire, est celui de la normalité : rejoindre l'équipe de football, c'est avoir les mêmes aspirations que l'élève moyen, ce que ne fut certainement pas Lou REED, avec toute la souffrance que cela peut supposer.

Si la musique et l'écriture lui ont sans doute permis d'afficher sa différence, n'oublions pas qu'il était lycéen dans les années 50. Et que son attirance pour les hommes était évidemment encore plus difficile à porter qu'aujourd'hui. S'il n'a d'ailleurs jamais expliqué clairement pourquoi il avait fréquenté les hôpitaux psychiatriques et subi des électrochocs, on peut penser que son ambigüité sexuelle, intolérable pour son temps, fait partie des motifs qui ont conduit ses parents à ce type de « solution ».

Coney Isand Baby est donc un album important parce qu'il marque une nouvelle tendance chez Lou REED  : davantage d'autobiographie et d'introspection dans ses textes, y compris pour décrire des sentiments positifs, le tout avec pudeur et sensibilité. Il se présente dans ces chansons à l'opposé du personnage qu'on lui a souvent reproché de montrer, notamment face aux journalistes : hautain, arrogant, sarcastique, imprévisible et insupportable. Eh, oui ! Sous son écorce de méchante teigne, c'est un délicat.

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   LE BARON

 
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- Lou Reed (chant, guitare)
- Bob Kulick (guitare)
- Bruce Yaw (basse)
- Michael Suchorsky (batterie)
- Joanne Vent (choeurs)
- Michael Wendroff (choeurs)
- Godfrey Diamond (choeurs)


- coney Island Baby
1. Crazy Feeling
2. Charley's Girl
3. She's My Best Friend
4. Kicks
5. Ooohhh Baby
6. Nobody' Business
7. Coney Island Baby



             



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