Après deux albums en demi teintes UB40 nous revient en 1986 avec ce Rat In The Kitchen dont la formule ressemble assez fortement à ses prédécesseurs. En effet, comme cela est le cas depuis Labour Of Love le groupe nous propose un album constitué de compositions assez moyennes au sein desquels surgit une poignée de morceaux marquants.

Ici, les Hits en puissance, ou tout au moins les morceaux notables, sont au nombre de cinq. A savoir "Rat in Mi Kitchen", et ce même si la version album est un cran en deçà de la version single, "Sing Our Own Song", le chaloupé "You Could Meet Somebody", "The Elevator" et "Watchdogs". Ce qui est plutôt une bonne nouvelle car nous avons là une bonne moitié de titres efficaces. Avec au surplus, parmi eux, les deux excellents classiques que sont "Rat in Mi Kitchen" et "Sing Our Own Song".

Pour le reste, ce sont des titres qui manquent un peu trop de relief, de personnalité et de peps, pour générer autre chose qu’une gentille indifférence. C’est notamment le cas de "All I Want to Do", de "Tell It Like It Is" ou de "Don't Blame Me". Mais là encore, la bonne nouvelle est que la production permet à ces morceaux de ne pas sombrer totalement dans l’inutile et le désagréable. Le résultat est de ce fait assez heureux : une (courte) majorité de bons morceaux, une production efficace, et des mélodies accessibles, il en résulte un album de Reggae mélodieux tout ce qu’il y a d’honnête avec même de très bon passages.

On peut cependant regretter que le groupe perde en personnalité, notamment du fait de l’utilisation d’une batterie aux sonorité très mécaniques et redondantes. Et d’une trop grande timidité pour ce qui est de l’usage des cuivres. Cette absence de prise de risque, cette tendance à éviter toute sonorité un peu trop marquante se retrouve même au niveau de la Basse, pourtant un des atouts habituels du groupe, qui est ici bien trop timorée. Et c’est bien dommage, car lorsque celle-ci se fait plus lourde, et que le chant de Ali Campbell monte en intensité, le résultat est immédiatement bien plus percutant. Cela est très sensible sur "Watchdogs" et sur "Rat in Mi Kitchen", des morceaux bien rythmés et séduisants. Dans le cas de ce dernier titre, la trompette de Herb Alpert (co fondateur du label A&M) apporte cette petite touche de folie qui fait désormais trop souvent défaut à UB40.

Malgré ces petits défauts, il y a surtout lieu de saluer un groupe qui est parvenu à rompre la spirale qui semblait l’entrainer inexorablement vers la banalité et le médiocrité. Alors soit, il n’y a plus cette conscience sociale et cette sensibilité Roots qui animaient leurs premiers albums. Mais cela a été remplacé par un savoir-faire indéniable pour ce qui est de pondre des mélodies efficaces, montées sur une structure vaguement Reggae.

Bien que ce Rat In The Kitchen ne soit pas réellement renversant, il n’en demeure pas moins assez facile d’accès et agréable à écouter. En cela il préfigure la future orientation artistique du groupe qui va progressivement privilégier une musique assez mainstream et lénitive au détriment du Reggae plus rugueux et engagé de ses débuts.
3.5/5