Une parenthèse d'un an a été nécessaire à Claude FRANÇOIS à différents niveaux, commençant par digérer le succès inattendu de "Comme d'habitude" ; ensuite fonder une famille et faire fructifier son nouveau label, nommé Flèche, pour lui-même et pour d'autres dont Annie PHILLIPE, reflet féminin de ce qu'il est à l'époque et avec qui il a eu une liaison avant son plus récent mariage.

Le premier de ses deux disques en l'année 1969 propose un franc succès avec "Les Majorettes", la seule armée qui plaît au chanteur selon les paroles de Gilles Thibault, naturellement réemployé après 1967. C'est une adaptation de la pop-song "Abergavenny", du même nom que la ville du Pays de Galles, et qu'a portée le chanteur Marty WILDE (père de Kim, future star des années 80), non sans déjà ce ton de parade en musique. L'occasion pour Claude FRANÇOIS de vouloir la rendre plus sexy, notamment durant les passages télé avec, en plus de ses quatre belles Fléchettes/Clodettes, toute une rampe de mini-jupes dansantes, au pas militaire elles en revanche, mais pour mieux faire ressortir l'esprit sixties et sa liberté revendiquée. Malgré les lourdeurs évidentes, y compris dans les paroles, le titre, aussi efficace que gai, remplit bien son rôle.

"Avec la Tête, Avec le Coeur", composition cette fois-ci que co-écrivent notamment Vline Buggy et un certain Jean-Pierre Boutayre, futur arrangeur d'importance pour Cloclo (et vice-président de la SACEM, société des droits d'auteur), fait ressortir cet aspect très martial du chanteur blond à bougeotte. Le refrain caractéristique fait suite à ce qui sonnait au départ comme une ballade cuivrée et baroque, dédiée aux hommes qui encaissent ou intériorisent tout, en malheur ou en bonheur. Bon morceau et bonne prestation, avec l'effet 'un couplet par époque' que l'on connaît bien désormais.

Plutôt habituelles également ces façons du chanteur qui veut trop en faire là en revanche, comme sur "Te Fatigue Pas", signée Thibault/FRANÇOIS, même si dans l'écriture, c'est une savoureuse exhortation au changement mêlée de cynisme. "Beggin'" des célèbres FOUR SEASONS devient "Reste" grâce à Jacques Plante (SHEILA...), mieux réussi encore parmi les arrangements proposés du chef Red Guest au cours du disque. À l'inverse, le bien senti "Monsieur le Businessman" (homonyme français du tube de Ray STEVENS) clôture l'album avec un propos qui ne reste pas dans les mémoires, surtout pas celles des hommes d'affaires à qui Cloclo conseille gentiment de changer de vie.

"Dans les Orphelinats", toujours en tandem FRANÇOIS/Thibaut, renoue avec l'ambiance froide de "Avec la Tête, Avec le Coeur" (le couplet sur la pension), évoquant ces poupées figées qui crient papa, maman. La hargne convient cette fois fort bien au drame, à l'instar des intentions que met Cloclo sur les ballades plus suaves, notamment "Chut ! Plus un Mot" ("Hush...Not a Word to Mary" du Néo-Zélandais John ROWLES). "Les Petites Souris", quant à elle, se veut mignonne mais ne réussit qu'à être rébarbative. Bons points en revanche : "Le Magicien" et sa folie amoureuse, "Éloïse" des frères RYAN, pour la voix du chanteur méconnaissable dans les graves, l'ambiance acoustique et le piano Fender Rhodes en intro. Un ensemble correct.