Faisant suite au premier des ces opus gospel, le sixième album de Johnny CASH est donc le troisième chez Columbia. On le reconnaît à sa pochette moins rétro sans équivoque. Malgré l'évidence, cet album est l'un des plus sombres de l'homme en noir. Il y évoque la mort avec une certaine obsession. Donc certes, nous ne traînons pas nos guêtres dans une chapelle, ce n'est pas du gospel, mais le sujet religieux n'échappera à personne. C'est noir, noir noir ! Triste triste triste. Par moment, on se croirait dans un roman de Faulkner du genre "Tandis que j'agonise". Ouais, l'écoute d'Elvis est fortement conseillée si vous n'avez pas le moral, pas celle de notre Johnny alors en pleine contemplation. C'est l'époque où sa consommation de benzo et barbituriques en tous genres lui échappe totalement. Son humeur quotidienne s'en ressent, son couple traverse moult difficultés.

Premier constat, une grande majorité des titres ici présents sont de la main de l'artiste. On constate cependant qu'il y a ici peu de classiques, voire aucun. Toutefois, notre chanson préférée de cette livraison est "Drink to Me" qui ne dépareille pas face aux ténors du doo-wop et des teenage idol de l'époque. Ça swingue bien et Johnny y semble très à l'aise. L'orchestration plus poussée que d'ordinaire la rend très attachante. La seule concession au Rock de cet album.

En revanche, la mort : partout, tragique, inéluctable. Sur "Don't Step On Mother's Roses", c'est carrément funèbre. Il ne me viendrait pas à l'esprit d'écrire une chanson qui causerait de ne pas marcher sur la tombe de maman. Johnny n'est pas au mieux ! Sortie du contexte cela dit, la chanson est belle. Il évoque plus loin un cimetière triste au possible dans "The Caretaker". Et même dans les chroniques qu'il conte dans "Hank and Joe and Me" ou "The Man On the Hill", tout se conclut par une mort douloureuse. Petit aparté : on sait notre Johnny très impliqué dans la cause des Amérindiens, il le prouve ici avec "Old Apache Squaw"-qui finit encore mal-, petite chanson simpliste où sa voix abat un boulot conséquent.

Nous avons de la super musique de cowboy avec "Great Speckled Bird" où l'on se croirait autour d'un feu de camp dans les plaines de la corn belt. "I Want To Go Home" est un autre traditionnel qui ressemble furieusement au "Sloop John B" des BEACH BOYS. Je sais, c'était déjà une reprise d'un standard de la calypso "The John B Sails", mais nous sommes habitués avec ce diable de Brian WILSON. "My Grandfather"s Clock" est plus enjouée grâce au tic-tac de la pendule en question - je voua laisse deviner, on évoque le décès d'un grandpa' - . Les choeurs des Jordanaires sur "It Could Be You" la font ressembler à s'y méprendre aux chansons des deux premiers albums du King ELVIS.

Un album très rural, et donc très rustique. Mais le titre annonçait la couleur. Elvis mettra de son côté dix ans de plus pour sortir son album country. En tout cas, Song of Our Soil occupe une place à part dans la discographie de CASH. Nul doute que toutes les petites gens du middle west américain et des champs de coton du sud sécessionniste le voient avec les yeux de Chimène après ça.