Encore ? Mais c'est pas possible, qu'on n'aille pas me dire que c'est Noël tous les ans ? Si ? Alors c'est presque comme les anniversaires, quoi... Bon sang... encore des cadeaux, encore des dindes à fourrer et encore un disque de Noël de Céline DION !

C'est vrai que les plaisanteries les plus courtes sont les moins longues et qu'après deux E.P. de Noël catégorie "erreur de jeunesse" (avec un gros capital sympathie), on redoutait ce moment tant attendu où Céline allait se remettre à chanter du Nowel à la pelle (et les rennes déneigent). Parce que c'est un peu un passage obligé aux USA, le Xmas Album, or c'est très largement confirmé : Céline fait désormais partie du gratin de la variété US. Et on peut même affirmer qu'en 1998 elle n'est plus première dauphine de WHITNEY et MARAH, et est passée en tête (ce n'est donc même pas un gratin dauphinois). Ces "moments très spéciaux" ne sont donc pas une mise à jour des chants de Noël à la sauce René de 1981, mais un vrai disque fait pour cartonner commercialement.

Et il faut admettre que malgré quelques défauts Céline a tapé dans le dur. Elle n'avait certes pas le droit de se louper ; et d'ailleurs elle se fait aider à droite et à gauche pour ne pas rater la cible. Outre les habituels David FOSTER, Walter Afanasieff et autres Humberto Gatica, on retrouve Diane WARREN (qui écrit la chanson-titre un peu anecdotique), Bryan ADAMS, Andréa BOCELLI (joli duo pas trop pyrotechnique), R KELLY (moins joli duo ne servant à rien), jusqu'à Dee Fuckin' SNYDER qui lui écrit un des meilleurs titres : "The Magic of Christmas", massive, rythmée, joyeuse, pop, une vraie réussite. L'anecdote veut que DION ait mis un certain nombre d'années à comprendre qui était le vrai auteur de la chanson.

Avec un orchestre massif et souvent superbe (ce "Holy Night" magnifique qui ouvre l'album), des musiciens globalement bien dans le ton et surtout une belle diversification de genres, de la variété pure au jazz hivernal (très bonne version de "The Christmas Song", "Blue Christmas" avec pas moins que Diana KRALL au piano) en passant par le chant liturgique ("Ave Maria", pas aussi magnifique que prévu), les incursions r'n'b empruntant à la Mariah CAREY de 1993 (la très bonne "Don't Save it All", "Christmas Eve"), Céline tente le grand chelem. Jusqu'à une version très festive, et pour une fois à la bonne humeur non feinte, sur "Feliz Navidad", même si je préfère la version de TARJA. Naaaaan, poisson de Noël.

Le disque est long, vaut mieux prévenir. Très long. Peut-être trop pour certains. Mais il possède deux qualités, outre évidemment la perfection sonore et les arrangements brillants (très peu de fautes de goût). D'une part, bien que ce ne soit pas tout du long, on sent l'esprit de Noël ; c'est bête, mais sur ces grosses machines US trop huilées, parfois ça dérape (vous me direz, normal avec l'huile). Et puis, régulièrement, Céline s'efface. Si elle déploie parfois une technique trop nombriliste, elle sait aussi se taire, laisser s'exprimer l'orchestre, l'ambiance générale. "Brahm's Lullaby" par exemple est devenu un de ses classiques, pourtant elle n'y tente pas le Tonnerre de Zeus vocal. "Adeste Fideles" aussi montre une certaine humilité à laquelle on ne s'attendait pas. Jusqu'au dernier titre qui laisse chanter toute sa famille.

Bien sûr, l'album aurait pu être meilleur s'il avait été coupé de trois ou quatre titres. Et oui, c'est du pur commercial qui risque de vous écoeurer si vous n'aimez pas le principe. Mais dans son genre, il est clair que Céline DION a réussi son "vrai" album de Noël, avec au moins six excellentes chansons et une ambiance entre rêverie et nostalgie exactement comme on aime. Dans quelle catégorie le ranger ? "Sapin", "cadeaux", "cheminée" ou "bourré de la veille" ? Plutôt autoradio en allant chercher la bûche. Ca passe tout seul, et certes, ça ne va pas révolutionner le monde de la musique, mais si c'était le cas, KING CRIMSON et KRAFTERK auraient sorti un album de Noël. Peut-être même en duo. Et ça, les amis, ça serait un sacré drôle de cadeau sous le sapin !