Dans les années 70, Françoise HARDY est une artiste accomplie. Non seulement elle a réussi à poursuivre sa carrière alors qu'elle a commencé avec le yéyé (un vrai exploit) mais, de plus, elle a réussi à sortir en cinq ans trois albums au moins fortement recommandables (Comment te dire adieu, La Question et Message Personnel). Tout roule donc pour la chanteuse ? Non, car sur le plan personnel, c'est une autre histoire. En effet, HARDY est censée être en couple avec Jacques DUTRONC, mais ce dernier semble l'avoir oublié(e), menant ainsi une vie sentimentale dissolue (sans doute aime-t-il montrer son joujou extra). Pire, la naissance de leur fils Thomas ne semble pas changer grand-chose. C'est alors que HARDY décide de manifester de manière explicite son mal-être de femme abandonnée, à travers sa meilleure arme, à savoir la musique. Voilà donc les origines et la raison d'être d'Entr'acte, le treizième album de la chanteuse.

Les ambitions de cet album sont à la fois claires et grandes. Tout au long des 10 chansons qui le composent, HARDY parle du vide, du doute, de la tristesse et de la solitude. Au menu, de la matière première propice à de grandioses chansons, a priori. Dans les faits, ce n'est pas tout à fait la grande réussite à laquelle on pouvait s'attendre. Le concept est assez bien trouvé (c'est le cas de le dire), et les paroles, que HARDY a écrites en intégralité, le servent de bonne manière. C'est la musique qui coince. En premier lieu, le mixage assez approximatif met parfois la voix de HARDY en retrait. Cette dernière, d'ailleurs, n'est clairement pas au mieux de sa forme tout au long des 27 minutes de l'oeuvre, comme en témoignent "Et voilà" ou "Fin d'après-midi". Sur d'autres morceaux, fort heureusement, la chanteuse reprend du poil de la bête et ne se contente plus de susurrer avec peine ses lignes ("Je te Cherche", "Bonjour Bonsoir").
Pour les compositions, il faut noter que le contraste entre les participations des différents intervenants n'est pas énorme, ce qui n'empêche pas d'avoir des hauts bien hauts et des bas bien bas. A ce niveau, c'est Catherine LARA qui tire le gros lot. S'étant déjà occupée de quelques arrangements sur La Question, elle compose ici deux chansons, et non seulement sa patte est reconnaissable, mais en plus il s'agit des meilleures de l'album : "S'il avait été" possède une (trop) courte tension dramatique, alors que les arrangements de "Il y a eu des nuits" soutiennent un texte assez fort, même sorti de son contexte.
Ce qui est dommage, c'est qu'il s'agit des seules chansons qui marquent vraiment les esprits, ou du moins sont susceptibles de le faire. Allez, le synthé sur "Je te cherche" peut attirer l'oreille d'un amateur de musique électronique, mais sans plus, et sans compter qu'il aurait pu être facilement remplacé par une section de cordes. Les autres ne sont pas mauvaises en soi, mais ne sont pas prenantes. L'ennui risque même de frapper sur "Ce soir" qui de surcroît ouvre l'album (en plus de ne pas être représentatif au niveau de la musique).

Globalement, Entr'acte ne possède rien qui puisse en faire un album au moins attractif. Dès lors, il ne faut pas s'étonner de ses ventes assez faibles, surtout en comparaison avec celles de Message Personnel(fi]. La faute peut-être à un projet trop personnel, voire privé, certainement une direction artistique clairement non-commerciale (d'où l'absence de vrais singles, même si "Ce soir" a été exploité ainsi). En tout cas, il s'agit du dernier album de Françoise HARDY avant une pause assez longue de trois ans.