1975, l'année où SHEILA mariée devient maman (Ludovic, leur fils avec RINGO, naît au moins d'avril), est celle de son retour discographique en solo au bout de trois ans. Elle a toujours sa fine équipe, Claude Carrère, les auteurs des disques sortis en compagnie de Ringo (les Sebastian, Michaele, Daniel Vangarde, la future romancière Katherine Pancol), et l'arrangeur Jean-Claude Petit, malgré la discrétion de Jean Schmitt pour le coup (il est mieux présent ans l'album suivant).

Si quelques titres en 74 – on en retrouve deux ici, "Tu es le soleil" et "Ne fais pas tanguer le bateau" - avaient pu mettre la puce à l'oreille concernant la nouvelle orientation musicale, notamment pour RINGO, c'est SHEILA désormais qui surprend le plus car elle se met au disco. Une reprise de Carol DOUGLAS ("Doctor's Orders", "C'est le coeur") par-ci, une autre du groupe 5000 VOLTS ("I'm on Fire", "Quel tempérament de feu") par là. Des choeurs qui font "toudoudou", des riffs de synthés et des attaques de cordes en tous sens, voici l'ancienne icône des sixties prête à devenir une reine du dancefloor, mais pour le succès massif, il faut attendre encore un peu.

"Quel tempérament de feu" exprime d'abord le regret de manquer de temps dans la journée, puis l'envie de croquer la vie à pleines dents ; une entrée en matière joyeuse on peut le dire. SHEILA chante super bien, les choeurs lui offrent un soutien dynamique au milieu de toutes ces cordes échevelées. Idem pour "Le bonheur file et roule entre nos doigts", grâce à l'interprétation mélancolique de la chanteuse, à l'énergie développée sous forme d'alternance entre couplets et refrains.

"C'est le coeur" débute par une conversation téléphonique, la voix se fait encore plus câline et on ne voit pas venir le refrain éclatant : une pilule de groove et de bonne humeur en somme. "Aucune montagne, aucune rivière" joue la même carte, toute en sensualité funk. Le texte de "Glory Alleluia" puise un peu dans l'inspiration religieuse, il fallait bien encore un exemple pour ce disque, mais le refrain puissant et les arrangements (choeurs superbes !) offrent une belle sensation de réussite. Et cette chanteuse, toujours aussi forte et vibrante dès qu'elle se libère, comme à la fin !

Dans le même sens, mais au sein des paroles, il y a la couleur plus aguichante de "Personne d'autre que toi" où SHEILA adulte et désormais trentenaire en cette année 1975 parle de fantasmes sans fard. Et pas que cela bien sûr, toujours des chansons d'amour avec plus de profondeur comme "Aimer avant de mourir", sobre au départ, amorce d'un crescendo ; la ballade acoustique "Laisse-toi rêver" aux arpèges de guitares, cordes hivernales et au ton spatial entretenu par les nappes de synthétiseur ARP.

Les deux repêchages de l'album précédent avec RINGO, dont ils constituaient le plus mémorable, s'insèrent très bien dans un ensemble inspiré. Ce nouveau disque, cette musique conviennent bien à SHEILA et figurent parmi ce qu'elle a fait de mieux durant sa carrière, tant qu'elle se trouve bien épaulée par les meilleurs auteurs et arrangeurs. Chose qui ne sera pas toujours évidente lors des moments de grand succès à venir !