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Bob DYLAN - Shot Of Love (1981)
Par DERWIJES le 10 Mai 2023          Consultée 821 fois

Bob DYLAN est un casse-pieds, on n'a pas attendu ses concerts tout mou du genou de ses dernières années et le vent monumental qu'il a posé à l'académie du Prix Nobel en donnant l'air de se foutre complètement de l'avoir reçu pour le savoir. Ceux qui ont assistés aux concerts donnés pendant sa période chrétienne peuvent en témoigner, eux qui ont dû faire l'impasse sur ses classiques pour se farcir à la place ses derniers morceaux et ses discours sur sa foi chrétienne nouvellement trouvée. Il persiste et signe, pour un peu on dirait qu'il est mesquin et qu'il se venge de ce public qui l'a autant idolâtré qu'harcelé pendant les sixties. Casse-pieds peut-être, iconoclaste c'est certain. Et si tout ce ram-dam autour de sa conversion n'était que du bruit pour rien, une autre manière pour lui de continuer ce qu'il a entamé depuis John Wesley Harding et de briser, de réduire en poussière cette image de « porte-parole d'une génération » qu'on lui a collé de force ? Comme il l'a dit pendant son concert du 25 Janvier 1980 donné à Omaha, Nevada : "Alright thank you. Years ago they used ..., said I was a prophet. I used to say, "No I'm not a prophet" they say "Yes you are, you're a prophet. I said, "No it's not me". They used to say "You sure are a prophet". They used to convince me I was a prophet. Now I come out and say Jesus Christ is the answer. They say, "Bob Dylan's no prophet." They just can't handle it."

Tant pis pour les critiques, ou tant mieux peut-être puisque ça leur fera un défouloir facile, DYLAN sort en 1981 Shot of Love, le troisième et dernier opus de sa trilogie chrétienne. A peine revenu d'une tournée il s'installe dans le studio Rundown à Santa Monica, Californie avec le producteur Jimmy IOVINE. Les deux hommes travaillent sur deux morceaux, d'abord “Caribbean Wind” qui sera mis de côté et "Angeline", qui sera pendant un temps considéré pour finir sur l'album. Mais les sessions traînent et le chanteur finit par se persuader que Iovine ne fait pas l'affaire. Au revoir Jimmy et bonjour...personne, puisqu'aucun autre producteur ne trouve grâce à ses yeux, tous trop...ou pas assez...Et puis le studio non plus ne lui convient pas, alors il en essaie d'autres qui ne lui plaisent pas. Il retourne au Rundown où les sessions traînent jusqu'à l'arrivée miraculeuse et surtout fortuite de Bumps BLACKWELL, producteur de LITTLE RICHARD venu faire un petit coucou et qui va se retrouver à chapeauter la session du jour et redonner un coup de peps à Dylan. Manque de chance des soucis de santé l'empêcheront de revenir mais qu'à cela ne tienne, son intervention à permis au Barde de retrouver du poil de la bête qui embauche sur la suggestion d'une amie Chuck PLOTKIN, producteur de Bruce SPRINGSTEEN. Cette fois-ci c'est la bonne, les deux hommes vont passer le mois de Mai à enregistrer puis ré-enregistrer les morceaux, et le mois de Juin à les mixer. Cette dernière tâche sera plus délicate que prévue, Plotkin souhaitant rendre l'ensemble plus lisse alors que Dylan insiste pour garder un son quasi tel-quel, pas par paresse mais pour accompagner le changement d'atmosphère qui s'opère sur cet album: Shot of Love est un album résolument relaxé et rock, d'où le choix de vouloir garder un son quasi-live, un instantané honnête. Après les ambiances assez lourdes de "Slow Train Coming" et "Saved" ce n'est pas désagréable de revenir à quelque chose de plus léger et de retrouver l'humour taquin de Bob Dylan maintenant qu'il n'est plus comme écrasé par sa nouvelle foi.

Malheureusement si la théorie est convaincante la pratique l'est moins. Les morceaux de l'album sont chargés, très chargés. Il y a beaucoup de monde là-dessus, entre le chant, les choristes, les guitares, la basse, la batterie, les cuivres, le piano...Et avec le choix de conserver un mixage brut tout ce beau monde se marche dessus dans un joyeux bordel. Et d'ailleurs, quid des morceaux ? Au nombre de dix ils sont également répartis: cinq d'entres eux ne sont pas terribles, les cinq autres sont bien. Voilà, aussi simple que ça. Les cinq “ratés” le sont parce qu'ils ne sont pas très intéressants. La ballade “Lenny Bruce” dédiée au fameux comédien ne provoque pas de grand frisson, "Watered-Down Love" ne décolle pas non plus malgré un riff sympa, et le trio "Dead Man, Dead Man", "In the Summertime" et "Trouble" sont des blues-rock on ne peut plus conventionnel.
De l'autre côté il y a le morceau-titre qui ouvre le bal, peut-être le meilleur du disque. Il commence sur les chapeaux de roues avec un cri "I need a shot of love" repris par les choristes, à partir de quoi il conserve un rythme effrené. On enchaîne sur "Heart of Mine" et "Property of Jesus" toutes deux construites autour d'un refrain entêtant et d'un piano entraînant. Et puis il y a les deux classiques de l'album, les deux morceaux où on retrouve un Bob Dylan dont la plume mérite un prix Nobel, celle de "The Groom's Still Waiting At the Altar", un rock très sarcastique, et "Every Grain of Sand", très jolie, vraiment, avec un côté Leonard COHEN assez prononcé. Avec un morceau pareil on peut bien lui pardonner de vouloir prêcher la bonne parole, si un seul devait survivre à cet album ce serait celui-là.
La sortie en 2021 de The Bootleg Series Vol.16: Springtime In New-York City 1980-1986 a offert une réhabilitation à Shot of Love. Petite, certes, mais bienvenue tout de même pour un album pas si bon, mais pas mauvais non plus au point de mériter la réputation qu'on lui accorde. Celui-là peut au moins se défendre d'avoir été fait avec passion !

Couplet favori: "I gaze into the doorway of temptation's angry flame
And every time I pass that way I always hear my name
Then onward in my journey, I come to understand
That every hair is numbered like every grain of sand"
Every Grain of Sand

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- Bob Dylan (guitare, chant, harmonica, piano, clavier)
- Steve Douglas (saxophone)
- Tim Drummond (basse)
- Donald « Duck » Dunn (basse)
- Jim Keltner (batterie)
- Danny « Kootch » Kortchmar (guitare)
- Carl Pickhardt (piano)
- Steve Ripley (guitare)
- William D. « Smitty » Smith (orgue)
- Ringo Starr (batterie)
- Fred Tackett (guitare)
- Benmont Tench (clavier)
- Ron Wood (guitare)
- Monalisa Young, Madelyn Quebec, Regina M (chœurs)


1. Shot Of Love
2. Heart Of Mine
3. Property Of Jesus
4. Lenny Bruce
5. Watered Down Love
6. Dead Man, Dead Man
7. In The Summertime
8. Trouble
9. Every Grain Of Sand



             



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